Prétention

La langue française est jolie, et on devrait toujours essayer de l’embellir, non seulement par le choix des mots, des tournures, le rythme des phrases, mais aussi par la manière de les prononcer et de respirer. La parole est un partage, elle doit tenir compte de ceux qui l’écoutent ou l’entendent, que cela soit les êtres humains, les animaux ou autres.

Les mots ont parfois plusieurs significations ou nuances. C’est le cas pour le terme « prétention » qui possède des tonalités négatives ou positives.

Une prétention est une revendication d’un droit, justifié ou non, ou un mouvement pour obtenir ce droit. Il en est de même pour le verbe « prétendre ».

Être prétentieux consiste à avoir des prétentions, à prétendre. On dit souvent que certains petits-maîtres sont prétentieux, parce que ce qu’ils revendiquent est jugé exagéré, injustifié ou extravagant. Souvent, on considère qu’ils visent trop haut pour eux. Cependant, ils font des efforts pour y parvenir. Beaucoup sont d’une origine populaire, ce qui les ‘oblige’ à être ainsi, afin de cacher une partie de leur origine ou simplement de leur état. Par exemple, au XXe siècle, les sapeurs aventuriers sont à peu près tous d’une origine modeste. Cela ne les empêche pas de s’acheter des habits très chers et de mimer les personnes qui, à leurs yeux, ont réussi : qu’ils appellent « grands ».

Parmi les petits-maîtres, on trouve aussi de vrais élégants, qui placent la beauté de l’esprit au-dessus de tout le reste, puisque ruisselant naturellement, bien sûr si les conditions sont présentes. Pour exister, l’élégance a besoin de contingences, afin de pousser, s’épanouir, fleurir puis donner des fruits et des graines. Comme la sagesse, la graine de l’élégance est indestructible, mais peut tout à fait ne rien donner tant que le terrain n’est pas favorable.

La petite-maîtrise étant aussi et avant tout une affaire de jeunes gens, elle est pour certains une sorte d’apprentissage. Pour les sapeurs, la sape est envisagée comme une initiation. On passe de l’enfant au sapeur, du sapeur à l’aventurier, et de l’aventurier au grand. Chaque étape est très difficile. D’abord il faut se procurer des vêtements et avoir assez de goût et de panache pour être accepté dans le cercle de la sape qui est finalement assez restreint. Puis on prépare son voyage vers une des Jérusalem du bon et grand goût. Enfin il est nécessaire d’acquérir une gamme (tenues complètes de grandes marques… griffées). J’ai déjà écrit sur la sape ici et ici.

Photographies : Justin-Daniel Gandoulou est le sociologue qui parle le mieux de la sape, en particulier dans l’ouvrage intitulé Entre Paris et Bacongo (Paris : Éditions du Centre Georges Pompidou, 1984), réédité en 1989 par L’Harmattan sous le titre Au Coeur de la sape : Moeurs et aventures d’un Congolais à Paris. Il évoque ce mouvement avec simplicité et efficacité, sans se cacher derrière des termes sociologiques déconcertants et décourageants. Il est aussi l’auteur d’une thèse de doctorat en Sociologie. Anthropologie sociale et culturelle, dirigée par Georges Balandier, soutenue en 1988 à l’Université de Paris Cité (Paris V) et intitulée Jeunes de Bacongo : dynamique du phénomène sapeur congolais (voir ici le résumé).

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Petits-maîtres anglais

Merveilleuses et merveilleux

Dans mes livres sur les petits-maîtres, je suis la lignée des merveilleux français depuis l’Antiquité. On trouve une continuité d’équivalents aux petits-maîtres dans d’autres cultures.  Après la descendance française, l’anglaise, l’italienne et l’espagnole sont sans doute les plus faciles à suivre en Europe, mais dans d'autres pays du monde on peut en trouver, par exemple en Chine. C’est le cas surtout pour l’anglaise, car très présente dans notre imaginaire, étant particulièrement virulente au XXe siècle, avec par exemple le play-boy, le teddy-boy, le mod (modernist), le glam, le psychedelic, le ska, le new-wave, le new-lad, etc.

En France, l’anglomanie commence sous Louis XVI, et se poursuit jusqu’à aujourd’hui. J’en parle dans cet article, cet autre, celui-ci et celui-là. En Angleterre, au XIXe siècle, nous avons le dandy (voir cet article, dont le nom vient de l'ancien français dandin : celui qui se dandine), le fashionable (voir cet article), le lion, le poseur, le snob, le smart, le man about town (l’équivalent de nos soireux et autres noceurs), le popinjay (freluquet extravagant)… au XVIIIe le beau (nom déjà utilisé au XVIIe et encore présent au XIXe, voir cet article), le macaroni (voir cet article, et ici une petite maîtresse anglaise de la fin du XVIIIe siècle)… au XVIIe siècle, le fop, le coxcomb (ou cockscomb, terme qui veut aussi dire crête de coq, et on le sait, en France plusieurs noms de petits-maîtres viennent du mot « coq », comme pour le coqueplumet, la coquette, le coquet, la cocotte, la cocodette, le cocodès…), le fribble, le popinjay (perroquet, terme déjà employé au XVIe pour une sorte de petit-maître), le ninny, le petit-maître, le mignon… au XVIe, l’euphuiste… Plusieurs de ces noms viennent du français ou de l'ancien-français, et à partir du XIXe, c'est le contraire qui se produit, le français empruntant plusieurs de ces dénominations à des petits-maîtres anglais !

En cherchant, on pourrait écrire un livre semblable au mien, et sans doute plus compréhensible, justement du fait de la virulence des mouvements de mode anglais au XXe siècle.

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L’esprit et la pornographie

Merveilleuses et merveilleux

Il y a quelques années de cela, des bouteilles de Champagne du XVIIIe siècle ont été découvertes au fond de la mer, je crois du Nord. Elles étaient dans un état parfait de conservation ayant passé plus de deux siècles dans une température d’eau idéale et stable. Les œnologues les plus connus les ont goûtées, mais leurs impressions étaient aussi fraîches que cet alcool. De même, lors d’une exposition (celle-ci), un parfumeur avait reconstitué des parfums du temps de Louis XIV d’après les recettes de l’époque. Là aussi les gens ne semblaient pas très emballés… pas plus que ça, comme on dit…

Notre époque s’acharne sur nos sens, afin de les subjuguer, de leur plaire par mille subterfuges, comme les parfums chimiques de pains et croissants chauds qui sont distillés aux abords de certaines boulangeries-pâtisseries afin d’attirer le client. Une certaine profusion joue aussi ce rôle. Cela fonctionne, transporte nos sens, comme dans la pornographie, mais nos esprits sont complètement inhibés, et les esprits sont comme censurés, c’est-à-dire tout ce qui nous grandit, nous conduit vers des états plus radieux, riches et multiples. La banalité devient le credo pour la plupart et pour les autres la perversion allant toujours plus avant vers l’abject. Ceci est difficile à suivre pour certains comme moi. Comme je l’ai entendu quelque part : « la médiocrité est difficile ». Ce que nos sens ne peuvent appréhender existe pourtant. Seul notre esprit permet d’aller un peu au-delà, notre propension à la spiritualité, une immatérialité pourtant bien réelle et qui s’exprime aussi dans le concret, pour qui sait lire son esprit.

Merveilleuses et merveilleux

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L’honnête homme

Merveilleuses et merveilleux

J’ai déjà écrit sur l’honnête homme dans cet article et cet autre.

Aditum nocendi perfido praestat fides « Se fier à un perfide, c’est lui donner moyen de nuire «  nous dit Sénèque (Ier siècle ap. J.-C.). Cette citation, je l’ai trouvée dans les Essais de Michel de Montaigne (1533 – 1592), un véritable honnête homme et humaniste qui se scrutait et scrutait l’humanité, loyalement, sans faux-semblants, comme le faisait le philosophe Socrate (vers -470/469 – -399). L’honnête homme est un homme nu qui examine le corps de son âme libérée de son habillement. Il n’est pas obligatoirement intellectuel, il peut être tout à fait de nature ‘commune’… simplement il est honnête, d’abord avec lui-même, ce qui lui permet d’accéder à un savoir que l’on peut qualifier à l’échelle humaine de « véritable ». La probité est un élément important, c’est-à-dire d’une manière générale la vertu. L’intellectuel est davantage dans la raison, la pensée, la recherche. Même s'ils résultent d'un certain athéisme, l’honnête homme comme l’intellectuel peuvent suivre une religion ou une ‘structure’, s’en servant comme outil, de la même manière que l’on utilise le langage pour communiquer et même réfléchir. Il s’agit d’un support pour chercher la vérité, et non pas une vérité en elle-même ; et il se libère de ce support dès qu'il le peut. Quant au libre-penseur, il ne suit rien ni personne.

Photographie : Timbre japonais ancien

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La beauté naturelle

Merveilleuses et merveilleux

J’aime beaucoup le chat de mes voisins, un sacré de Birmanie. Entre nous, aucun faux-semblant. Cela ne l’empêche pas de beaucoup communiquer par des miaulements dont les intonations expriment comme des mots. Je vous assure qu’il est doué de raison. C’est un être tout à fait raisonnable avec moi, ce que j’ai observé en essayant le plus possible d’aller dans le sens de ses volontés. M’ayant trouvé raisonnable à son égard, il l’a été en retour au mien. Les gens croient qu’il m’obéit, mais ce n’est pas cela, car nous sommes sur un total pied d’égalité. Il m’est arrivé de le prendre dans mes bras pour le ramener chez lui alors qu’il ne le voulait pas, et il faut avoir vu ses deux grands yeux ouverts en ma direction comme pour me dire « nous sommes deux êtres raisonnables, n’est-ce pas ? » Quand c’est comme cela, je le lâche, et il rentre tout seul ! Son regard est alors d’une limpidité et d’une grandeur vraiment merveilleuses, d’une grande beauté qui m’émeut profondément, à moins que cela soit de la grâce ?

Qu'est-ce que la beauté ? Dans son Hippias majeur, Platon traite de ce qu’est le beau en soi. Le dialogue est entre Socrate et le sophiste Hippias qui, pendant tout le temps que se déroule celui-ci, apparaît prétentieux, vénal, et constamment à répondre à côté aux questions de Socrate. Finalement, la conversation se conclut sans réponse à leur questionnement. Sauf qu’à un moment, Hippias, critiquant ceux qui décortiquent la réalité, exprime quelque chose qui me semble être la définition même du beau : que les objets concrets de la réalité possèdent naturellement grandeur et continuité. Voilà ce qu’il dit (traduction provenant de cette page) : « vous détachez le beau de tout le reste pour voir ce que c’est, et vous coupez ainsi chaque objet par morceaux dans vos discours ; de là vient que tout ce qu’il y a de grand et de vaste dans les choses vous échappe. »

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Réminiscences

Ecologie du Sentiment : Promenades sur une année dans les forêts d'Île-de-France

Dans mon livre Écologie du Sentiment, j’évoque un âge d’or de l’humanité. On en parle depuis la plus haute Antiquité et pendant tout l’Ancien Régime. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, il en est très souvent fait référence. J’ai lu dans un ouvrage du XVIIIe, je ne sais plus lequel mais peut-être se trouve-t-il dans ma bibliothèque, une anecdote révélatrice : Au siècle de Rousseau et de Voltaire, une personne invita des convives à une fête où furent apprêtées quatre grandes tables, chacune symbolisant un âge de l’humanité : d’or, d’argent, d’airain et de fer. La première était garnie simplement, de mets naturels, alors que la dernière comprenait un choix des réalisations culinaires et du service du temps de cette fête. Les invités restèrent peu à la première table de l’âge d’or, un peu plus à celle de l’âge d’argent puis à celle de l’âge d’airain, mais demeurèrent à banqueter à celle de l’âge de fer. Il est difficile de décrire ce qu’est l’âge d’or, car il n’est pas dans ce que l’on prend, mais ce que l’on donne harmonieusement, ceci étant la plus grande des richesses. On est alors dans la beauté et dans la bonté, « bonté » aussi dans le sens de bonheur. Cela est aux fondements des êtres humains. Aujourd’hui, s’il semble que beaucoup croient ne plus savoir le contempler ou n’ont juste pas l’idée que cela existe, ils ont toujours la possibilité d’en avoir des réminiscences. Lire ces lignes est un parfum, certes extrêmement diffus… mais présent…

Dans ses écrits, Platon fait souvent référence à ce souvenir enfoui en nous, cette intelligence que l’on peut qualifier de « divine » et que la maïeutique aide à révéler, par exemple dans Ménon ou de la Vertu dont voici des passages récoltés dans cette traduction :

« SOCRATE. […] c’est Pindare, et beaucoup d’autres poètes ; j’entends ceux qui sont divins. Pour ce qu’ils disent, le voici : examine si leurs discours te paraissent vrais. Ils disent que l’âme humaine est immortelle ; que tantôt elle s’éclipse, ce qu’ils appellent mourir ; tantôt elle reparaît, mais qu’elle ne périt jamais ; que pour cette raison il faut mener la vie la plus sainte possible ; car les âmes qui ont payé à Proserpine la dette de leurs anciennes fautes, elle les rend au bout de neuf ans à la lumière du soleil. De ces âmes sortent les rois illustres, célèbres par leur puissance, et les hommes grands par leur sagesse ; dans l’avenir les mortels les appellent de saints héros. Ainsi l’âme étant immortelle, étant d’ailleurs née plusieurs fois, et ayant vu ce qui se passe dans ce monde et dans l’autre et toutes choses, il n’est rien qu’elle n’ait appris. C’est pourquoi il n’est pas surprenant qu’à l’égard de la vertu et de tout le reste, elle soit en état de se ressouvenir de ce qu’elle a su antérieurement ; car, comme tout se tient, et que l’âme a tout appris, rien n’empêche qu’en se rappelant une seule chose, ce que les hommes appellent apprendre, on ne trouve de soi-même tout le reste, pourvu qu’on ait du courage, et qu’on ne se lasse point de chercher. En effet ce qu’on nomme chercher et apprendre n’est absolument que se ressouvenir. […] SOCRATE. Ces opinions [pensées, idées…] étaient-elles en lui, ou non ? MENON. Elles y étaient. SOCRATE. Celui qui ignore a donc en lui-même sur ce qu’il ignore des opinions vraies ? MENON. Apparemment. SOCRATE. Ces opinions viennent de se réveiller en lui comme un songe. Et si on l’interroge souvent et de diverses façons sur les mêmes objets, sais-tu bien qu’à la fin il en aura une connaissance aussi exacte que qui que ce soit ? MENON. Cela est vraisemblable. SOCRATE. Ainsi il saura sans avoir appris de personne, mais au moyen de simples interrogations, tirant ainsi sa science de son propre fonds. MENON. Oui. SOCRATE. Mais tirer la science de son fonds, n’est-ce pas se ressouvenir ? MENON. Sans doute. SOCRATE. N’est-il pas vrai que la science qu’a aujourd’hui ton esclave, il faut qu’il l’ait acquise autrefois, ou qu’il l’ait toujours eue ? MENON. Oui. SOCRATE. Mais s’il l’avait toujours eue, il aurait toujours été savant : et s’il l’a acquise autrefois, ce n’est pas dans la vie présente ; ou bien quelqu’un lui a-t-il appris la géométrie ? car il fera la même chose à l’égard des autres parties de la géométrie, et de toutes les autres sciences. Est-il donc quelqu’un qui lui ait appris tout cela ? Tu dois le savoir, puisqu’il est né et qu’il a été élevé dans ta maison. MENON. Je sais que personne ne lui a jamais rien enseigné de semblable. SOCRATE. A-t-il ces opinions, ou non ? MENON. Il me paraît incontestable qu’il les a, Socrate. SOCRATE. Si donc c’est faute de les avoir acquises dans la vie présente, qu’il n’en avait pas la conscience, il est évident qu’il a eu ces opinions et qu’il les a apprises en quelque autre temps. MENON. Apparemment. SOCRATE. Ce temps n’est-il pas celui où il n’était pas encore homme ? MENON. Oui. SOCRATE. Par conséquent, si durant le temps où il est homme, et celui où il ne l’est pas, il y a en lui des opinions vraies qui deviennent sciences, lorsqu’elles sont réveillées par des interrogations, n’est-il pas vrai que pendant toute la durée des temps son âme n’a pas été vide de connaissances ? car il est clair que dans toute l’étendue des temps il est ou n’est pas homme. MENON. Cela est évident. SOCRATE. Si donc la vérité est toujours dans notre âme, cette âme est immortelle. C’est pourquoi il faut essayer avec confiance de chercher et de te rappeler ce que tu ne sais pas pour le moment, c’est-à-dire ce dont tu ne te souviens pas. MENON. Il me paraît, je ne sais comment, que tu as raison, Socrate. SOCRATE. C’est ce qu’il me paraît aussi, Menon. A la vérité, je ne voudrais pas affirmer bien positivement que tout le reste de ce que j’ai dit soit vrai : mais je suis prêt à soutenir et de parole et d’effet, si j’en suis capable, que la persuasion qu’il faut chercher ce qu’on ne sait point, nous rendra sans comparaison meilleurs, plus courageux, et moins paresseux, que si nous pensions qu’il est impossible de découvrir ce qu’on ignore, et inutile de le chercher. MENON. Ceci me semble encore bien dit, Socrate. SOCRATE. Ainsi, puisque nous sommes d’accord sur ce point, qu’on doit chercher ce qu’on ne sait pas [se rappeler ce que l'on a oublié], veux-tu que nous entreprenions de chercher ensemble ce que c’est que la vertu ? MENON. Volontiers. Cependant non, Socrate ; je ferais des recherches et t’écouterais avec le plus grand plaisir sur la question que je t’ai proposée d’abord, savoir s’il faut s’appliquer à la vertu, comme à une chose qui peut s’enseigner, ou si on la tient de la nature, ou enfin de quelle manière elle arrive aux hommes. SOCRATE. Si j’avais quelque autorité non seulement sur moi-même, mais sur toi, Menon, nous n’examinerions si la vertu peut ou non être enseignée, qu’après avoir recherché ce qu’elle est en elle-même. Mais puisque tu ne fais nul effort pour te commander à toi-même, sans doute afin d’être libre, et que d’ailleurs tu entreprends de me maîtriser, et que tu me maîtrises en effet, je prends le parti de te céder ; car que faire ? Nous allons donc, à ce qu’il semble, examiner la qualité d’une chose dont nous ne connaissons pas la nature. »

Ecologie du Sentiment : Promenades sur une année dans les forêts d'Île-de-France

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La volupté & la mesure : Horreur de la gêne dans l’existence

Merveilleuses et merveilleux

Ci-dessus et ci-dessous : Chromolithographie de la fin du XIXe siècle, du grand magasin parisien de mode La Belle Jardinière et avec pour légende : « Je l’ai choisi ample, large, parce que j’ai horreur de la gêne dans l’existence. » Cette image a déjà, été présentée dans cet article.

Montaigne écrit au sujet de la volupté cette très belle phrase : « La volupté est qualité peu ambitieuse, elle s’estime assez riche de soy, sans y mesler le prix de la reputation : & s’ayme mieulx à l’umbre. » (voir ici), ce qui peut donner dans un français moderne : « La volupté est une qualité peu ambitieuse : elle s’estime assez riche en elle-même, sans y ajouter le prix de la réputation ; et s’apprécie davantage à l’ombre. » Cette manière est tout à fait dans l’esprit de la douceur dont il est question dans cet article et de celle de la beauté en soi de cet autre. De nos jours, beaucoup pensent que le bonheur est de s’étaler sur internet et autres réseaux sociaux… dans des blogs… qu’on ne peut la trouver qu’en dehors de soi, et notamment par la possession et la consommation. La volupté au contraire ne cherche pas au-delà d’elle-même. Un proverbe indien dit que le contentement est le plus grand des trésors. Sans doute ce contentement nous amène-t-il à nous ouvrir à la beauté et à la volupté… ce dernier état étant bien plus doux, il me semble, que celui de plaisir. Elle nous fait nous ouvrir à ce que nous avons déjà, sans chercher ailleurs et découvrir des trésors qui sont là. Il me semble qu’il y a de la volupté dans cette phrase de Montaigne : « Heureux qui sachent resjouyr et gratifier leur sens par l’insensibilité et vivre de leur mort. » Il s’agit de plonger entièrement en soi, dans ce que l’on est, sans faux-semblant, ni peur, ni peur d’avoir peur et d’être misérable, et accepter (« insensibilité ») nos limites (« mort »).

Les Pythagoriciens considèrent le bien comme certain et fini, et le mal comme infini et incertain. D’après Cléobule, la mesure est la meilleure des choses. Toute proportion gardée, d’après moi celle-ci ne consiste ni à se borner ni à borner, non plus dans la fuite de toute extrémité. La mesure consiste à se connaître soi-même, et connaître ce qui nous entoure le mieux possible. Il ne s’agit pas de se limiter, mais au contraire de s’ouvrir afin de voir les contours des choses, tels qu’ils sont.

Merveilleuses et merveilleux

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Le théâtre à la mode du XIXe siècle, suite…

Merveilleuses et merveilleux

Ci-dessus : « Les montagnes russes au vaudeville ». Cette gravure serait de vers 1816 d’après le musée Carnavalet. Si c'est le cas, on est juste avant la première de la pièce Le Combat des montagnes, mettant en scène le calicot (voir plus loin) et dont l'action se situe au même endroit. Les montagnes russes étaient une attraction très à la mode alors. Le personnage central, en blanc, est la personnification de « LA MODE », entourée d'autres en vogue sans doute dans les vaudevilles alors, comme « Mme. Ducomptoir Limonadière » « Mlle. Crépon. Marchande de Mode ».

Le théâtre joue depuis l'Antiquité un rôle important dans la mode jusqu’à l’avènement du cinéma. Petits marquis, coquettes, petits-maîtres et autres modernes parsèment les pièces des XVIIe et XVIIIe siècles. Tenues, manières de parler, de bouger, moeurs… le théâtre en partie fait et porte les modes de son époque.

Au XIXe, les exemples sont très nombreux. En voici quelques-uns :

Dans l’article précédent, j’évoque le travail sur les merveilleuses et les incroyables de l’auteur Victorien Sardou (1831 – 1908). Il écrit beaucoup d’autres pièces, dont une qui donne le nom à un type de petite maîtresse de l’époque : la benoitonne.  Elle est représentée pour la première fois en 1865 dans la pièce qui la met en scène intitulée La Famille Benoiton dont je parle dans cet article. La benoitonne est l’éternelle mais toujours changeante jeune fille moderne, ici à l’apogée des robes crinolines.

En 1817, dans la folie-vaudeville en un acte intitulée Le Combat des montagnes, ou la Folie-Beaujon, MM. Eugène Scribe (1791 – 1861) et Henri Dupin (1791 – 1887) mettent en scène un nouveau genre de merveilleux : le calicot, dont il est question dans cet article et cet autre. Le texte de cette pièce est lisible ici.

En 1819, MM. Gabriel de Lurieu (1792 – 1869) et Armand d’Artois (1788 – 1867) créent Les Bolivars et les Morillos ou Les Amours de Belleville dont je parle dans cet article.

En 1822, les mêmes auteurs font jouer Les blouses, ou La soirée à la mode, avec son blousé. Voir cet article.

En 1830, Hernani, la pièce de Victor Hugo (1802 – 1885), permet aux jeune-France romantiques de jouer, comme spectateurs, le personnage principal de cette pièce. Voir cet article.

En 1832, MM. Jacques Ancelot (1794 – 1854 ) et Léon Laya (1811 – 1872) mettent en scène Le Dandy. Voir cet article.

Alexandre Dumas fils (1824 – 1895) crée l’expression de « demi-monde » que l’on retrouve dans La Dame aux camélias (1852) et Le Demi-Monde (1855) où évoluent des cocodès et autres lions, et dans lequel se retrouvent quelques cocottes.

En 1857, Xavier de Montépin (1823 – 1902) propose Les Viveurs de Paris. Voir cet article.

Émile Augier (1820 – 1889) s’est un peu occupé des lions, avec en 1858, avec Édouard Foussier (1824 – 1882) : Les Lionnes pauvres. J’en ai parlé rapidement ici.  En 1869 est sorti Lions et renards. En 1866, François Ponsard (1814 – 1867) écrit la comédie Le Lion amoureux. Il en est question succinctement ici.

En 1865, MM. Xavier de Montépin et Jules Dornay sont les auteurs de Les Cocodès : vaudeville en 5 actes et 6 tableaux. Voir cet article.

En 1867, sont jouées Nos petits Crevés, attaque et riposte, une pièce de théâtre d’un auteur inconnu et Les Petits crevés de MM. Alexandre Flan (1824 – 1870), Émile Lazare Abraham (1833 – 1907) et Jules Prével (1835 – 1889). Voir cet article.

Je viens de citer quelques pièces pour la plupart présentées dans des articles de ce blog. On pourrait peut-être en citer beaucoup d’autres. Sans doute, chacun des petits-maîtres du XIXe siècle a son alter-ego interprété sur les planches, dans des opéras-comiques, vaudevilles et autres opérettes, pleins de couleurs, chants, musiques, décors fabuleux… remplis de merveilleux !

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Le théâtre à la mode du XIXe siècle de Victorien Sardou

Merveilleuses et merveilleux

Comme on le constate dans cet article que j’ai publié il y a peu, les merveilleuses et les incroyables retrouvent une seconde jeunesse dans la seconde partie du XIXe siècle et le début du XXe. Ils sont alors le thème de nombreux objets et œuvres d’arts (peintures, sculptures, littérature…). Au théâtre, Les Merveilleuses de Victorien Sardou (1831 – 1908) obtient un vif succès. Le sujet et les costumes… incroyables… font rêver. On est en pleine époque des gommeux et des gommeuses, de l’opérette, du chic et du tralala, des boulevards, des avant-gardes impressionnistes et autres… La Belle Époque s’annonce.

Victorien Sardou, qui a à son actif de nombreuses pièces, commence sur ce thème avec Monsieur Garat, une comédie-vaudeville en deux actes jouée pour la première fois en 1860. Il y met en scène le fameux chanteur incroyable. On peut la consulter ici. Suit, en 1873, la pièce Les Merveilleuses. En 1893, avec Émile Moreau (1852 – 1922), il crée le personnage de Madame Sans-Gêne thème rappelant celui de Mme Angot que j’évoque dans cet article, et qu’en 1872 les auteurs Louis-François Clairville (1811 – 1879), Victor Koning (1842 – 1894) et Paul Siraudin (1812 – 1883) reprennent avec La Fille de Madame Angot, sur une musique de Charles Lecocq (1832 – 1918). En 1898, Victorien Sardou poursuit avec sa comédie intitulée Paméla, marchande de frivolités, qui évoque ce même univers des merveilleuses et des incroyables. Sa dernière oeuvre, écrite une nouvelle fois en collaboration avec Émile Moreau qui la termine, est sur Madame Talien, une merveilleuse célèbre ! Des photographies de ces pièces sont visibles ici, ici, ici, ici, ici, ici et ici.

Photographies ci-dessus et ci-dessous provenant de l’ouvrage Costumes du Directoire (1875) comprenant trente eaux-fortes de A. Guillaumot fils (d’après des dessins de « MM. Eigène Lacoste et Draner »), avec les costumes de merveilleuses et d’incroyables tirés de la pièce de Victorien Sardou. Le site Gallica propose un exemplaire à la consultation numérique ici.

Merveilleuses et merveilleux
Merveilleuses et merveilleux
Merveilleuses et merveilleux
Merveilleuses et merveilleux
Merveilleuses et merveilleux
Merveilleuses et merveilleux
Merveilleuses et merveilleux

Ci-dessous : Ces images ont été déjà présentées dans ce blog, comme certaines ci-dessus. Cette fois, il s’agit de photographies sur cartes postales, de la fin du XIXe siècle ou du début du XXe, d’acteurs jouant un incroyable de la pièce Les Merveilleuses de Victorien Sardou. Le premier est Félix Galipaux (1860 – 1931) et le second Charles Prince (1872 – 1933). Les dessins originaux sont de Draner (voir description suivante).

Merveilleuses et merveilleux
Merveilleuses et merveilleux

Ci-dessous : Dessin, en vente dernièrement sur eBay, étant très certainement de Draner (de son vrai nom Jules Joseph Georges Renard : 1833 – 1926), qui non seulement compose les costumes de la pièce Les Merveilleuses de Victorien Sardou, mais est aussi un des caricaturistes du XIXe s'intéressant aux drôles de pistolets de son temps (voir cet article). La BNF conserve d'autres de ses dessins, comme celui-ci.

Merveilleuses et incroyables Pièce Victorien Sardou

Ci-dessous : Meuble daté de 1890 et vendu aux enchères (voir ici), où sont peints des merveilleuses et des incroyables réalisés à partir du livre cité ci-avant.

Merveilleuses et incroyables Pièce Victorien Sardou
Merveilleuses et incroyables Pièce Victorien Sardou

Ci-dessous :  Image d’Épinal illustrant un passage de l’opéra-comique La Fille de Madame Angot (1872) de Charles Lecocq (1832 – 1918). L'image est intitulée « Les conspirateurs ». Les conspirationnistes et les complotistes comme moi existent donc déjà à cette époque !

Merveilleuses et merveilleux
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Cravate écrouellique

Le vendredi 10 février dernier, la maison de ventes aux enchères Daguerre proposait une peinture représentant un portrait d’un jeune homme (16 – 18 ans ?), de vers 1800 (photographie ci-dessus et lien ici) portant une cravate à la manière des incroyables de l’époque, que certains qualifiaient d’« écrouellique », car semblant cacher des écrouelles. Ce genre de cravate s’enroulait de nombreuses fois autour du cou. Certains l’avaient couvrant tout le menton. Les femmes aussi en portaient, et j’en donne des exemples dans cet article.

Dans cet autre article sur l’histoire de la cravate, on retrouve de ces cravates 'écrouelliques', pas toutes blanches, certaines de couleur rouille, rayées, à pois, etc.

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Merveilleuses et incroyables oeuvres d'art du XIXe siècle

Les courants artistiques français du XIXe siècle sont pléthore. L’un d’entre eux, l’art historique, prend ses sujets dans les évènements du passé. Même les modes s’inscrivent dans ce mouvement. Sous les Romantiques (années 1830), la vogue est en particulier au Moyen-Âge. On prend des aspects médiévaux, emprunte aux accoutrements d’alors et du XVIe siècle, parle ‘médiéval’, etc. J’évoque cela dans Les Petits-maîtres de la mode à travers le jeune-France-Moyen-Âge. Dans l’art aussi, les modes changent rapidement. Vers le milieu du XIXe, le mouvement néo-grec est en vogue et à partir de 1860 l’histoire de France. La peinture et la sculpture historiques sont à leur apogée et cela pendant tout le reste de ce siècle, dans ce que l’on appelle « l’art académique » ou plus péjorativement « l’art pompier », auquel ‘s’opposent’ les impressionnistes. Les merveilleuses et les incroyables font partie des scènes représentées par ces artistes ‘académiques’. En France, nous avons un collectionneur sur ce sujet, sans doute le plus important, qui m’a gentiment envoyé quelques photographies d’oeuvres de sa collection que je présente ici.

 

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Le goût et la saveur

Merveilleuses et merveilleux

Je ne suis pas du tout un spécialiste du goût, mais écrire sur lui m'en donne une saveur, même si je suis très éloigné d'en avoir. J'aime écrire, comme autrefois un épistolier le faisait à un ami. Mon plaisir est dans l'écriture même. Là, pas de rendement, pas de propagande, pas de retombées, juste des mots lancés dans le vent, comme ceux venant du coeur, chantonnés par une bouche et s'échouant dans l'oreille de l'esprit qui l'émet.

Si je ne suis pas du tout un spécialiste du goût, ce que je sais, c’est qu’il avait beaucoup d’importance autrefois… en particulier le « bon goût ». Il n’est plus d’actualité. Par contre, le mauvais goût s’étale tous les jours dans la vie contemporaine. Évidemment, le goût est une notion subjective… subjectivité qui tout de même a ses limites, qui sont celles de l’être humain.

Avoir du goût, ce n’est pas seulement savoir choisir et agencer ce qui donne le plus de plaisir à nos sens, c’est aussi et avant tout trouver ce qu’il y a de meilleur, dans tous les sens du terme. Il faut y ajouter ce supplément d’âme qui fait toute la différence.

Avoir du goût n’est pas suffisant, encore faut-il donner de la saveur. Le goût est intelligence et la saveur est partage. Un individu de goût se contente de peu mais cherche toujours la qualité. Il est une personne de qualité. Si cette dernière se contente de peu pour elle, elle partage beaucoup et toujours la qualité. Elle n’est pas un personnage de surface, dans la montre comme on disait autrefois, c’est-à-dire l’apparence. Ce qu’elle donne à voir, à attendre… elle y ajoute un ‘souvenir’ agréable, un savoir goûteux que l’autre peut conserver et dans lequel il a la possibilité de puiser constamment. Il est comme un vin qui est bon lorsqu’on le boit, se garde longtemps en bouche apportant de nouvelles saveurs en continuant de surprendre, laisse un bouquet agréable même longtemps après ouvrant l’esprit à d’autres ‘plaisirs’ et s’accordant avec ceux-ci merveilleusement. Surtout, il doit apporter une bonne santé, ne pas l’altérer comme le font certains vins au goût fin mais contenant par exemple du sucre raffiné et des résidus de pesticides. La personne de goût propose ce qu’elle peut faire de mieux. Bien sûr elle ne peut faire des miracles, et c’est à chacun de disposer. On apprécie avec la mesure parfaite, ajoute de la grâce, ou au contraire transforme même ce qu’il y a de mieux en un poison.

Merveilleuses et merveilleux

La saveur apporte de la longueur dans la jouissance. Le goût est tel un interrupteur que l’on met en marche, et la saveur comme la lumière qui en découle. L’idéal est que le goût apporte une saveur qui ne s’éteigne pas et dont l’autre puisse disposer aussi longtemps qu’il le souhaite, s’il a l’intelligence pour cela. Au sujet de la jouissance, Montaigne écrit : « Qui n’a jouïssance qu’en la jouïssance […] il ne luy appartient pas de se mesler à nostre eschole : plus il y a de marches et degrez, plus il y a de haulteur et d’honneur au dernier siege ; nous nous debvrions plaire d’y estre conduicts, comme il se faict aux palais magnifiques, par divers portiques et passages, longues et plaisantes galleries, et plusieurs destours. »

Certains trouvent que jouir consiste à accumuler les jouissances, ce qui est très dans l'esprit bourgeois particulièrement intéressé par le nombre, la quantité. Mais ainsi de quoi jouit-on vraiment ? Cela ne fait que laisser un goût amer à longue échéance et rend pauvre, voire misérable quand c’est le moment de rendre des comptes. Savoir savourer des choses qui nous ont été données, comme simplement le fait d’être en vie, est déjà un programme immense, non ? Pourquoi toujours vouloir davantage ? Je crois même que la meilleure des jouissances est de s’oublier et de ne faire uniquement que le bien. Seul le bien est véritablement bon. Apporter ce bien… ce bon… cette bonté… est ajouter de la saveur au goût et n’est que le prolongement de cette intelligence.

La bonté a moins à voir avec la morale qu’avec la vertu, de même qu'une saveur au palais à moins à voir avec la recette qu’avec celui qui l’a accomplie.

Merveilleuses et merveilleux

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La Sape de Kinshasa à Paris

Ci-dessus et ci-dessous : Ma Vie dans la sape de Séverin Mouyengo, Rennes : Librairie petite Égypte, 2020.

Jean Baudrillard (1929 – 2007) a dit : « On voit déjà les prémices d’un monde atone, monotone, où la tonalité aura disparu. » On y est, et rares sont ceux qui en France ont su conserver de la tonalité ! Les sapeurs en font partie.

Dans Les Petits-maîtres de la mode, je consacre une longue partie à ces merveilleux, écrite en particulier à partir du très bon livre de Justin-Daniel Gandoulou (1953 – …), intitulé Au coeur de la Sape : moeurs et aventures des Congolais à Paris (Paris : Éditions du Centre Pompidou, 1984). J’ai aussi parlé un peu des sapeurs dans cet article. Dans les années 1980, j’ai croisé quelques-uns d'entre eux, en particulier aux chaînes, place de la République (aujourd’hui les chaînes ont été enlevées et les sapeurs ne se retrouvent plus là), sans jamais les aborder… De toutes les façons cela était impossible, car ils sont par nature d’un certain précieux qui les rend comme des images… Cela aurait sans doute rompu le charme… le charme étant un élément important de la mode. De nos jours, on peut toujours en voir à Paris, capitale de la SAPE. La vieille garde se retrouve notamment devant la boutique de Fred Sape & Co située au 12 rue Panama au cœur du quartier Château-Rouge. Le samedi et le dimanche des sapeurs habillés avec des griffes à l’ancienne s’assoient devant cette marque d’habits congolaise. Il paraît que la nouvelle génération se retrouvait à Montreuil… mais je n’ai pas vérifié si c’est encore le cas.

Cet article, je l’écris après avoir lu Ma Vie dans la sape par Séverin Mouyengo (Rennes : Librairie petite Égypte, 2020). Ce que l’on remarque en premier lieu, c’est la jolie couleur bleue de la couverture… comme quoi il suffit d’un rien pour faire beau… Pour le reste, cet ouvrage autobiographique se lit rapidement, comme un roman, et est très instructif sur l’univers de la SAPE de Kinshasa et ses ramifications.

Les sapeurs sont un exemple que la petite-maîtrise de la mode est innée, car ceux-ci usent de codes qui en font partie sans pourtant le savoir intellectuellement mais de manière beaucoup plus profonde. On y retrouve le goût pour la parade (le persil…), l’esbroufe (la frime, l’allure, la posture, la pose…), le merveilleux (l’excentricité, l’extraordinaire, le féérique, l’aventure…), le beau en particulier dans le costume, l’harmonie, la tonalité juste, le bâton, la joie de vivre et le bien être, la sensibilité voire la délicatesse, le rythme et les rythmes (la danse, la musique, le pas cadencé…), l’instinct aristocratique couplé à une ouverture démocratique à toutes les classes de la société pourvu que l’on ait la grande classe, la grâce qui approche parfois l’euphorie voire l’extase, avec au revers d’une admiration de certains un dédain et même une agression d’autres, la liberté, la guise personnelle ou nouvelle, la rigueur et le nonchaloir, etc.

Le sapeur est « bien gammé », avec une « gamme » la plus « chaude » possible (de grande valeur avec des griffes onéreuses), « bien alluré ». Son « réglage » se veut parfait, cela lui permettant de faire des poses, « des mines », de la « surjouer », « de frimer ». Il sait « harmoniser les couleurs ». Il a cette connaissance qui le rend spécial, d’une autre classe à laquelle le président de la République comme le manœuvre peut appartenir. Il place la recherche de l’habit parfait avant celui du manger. Il fait le matalana, le « m’as-tu vu ». La sape est pour lui une transe. La rue est son principal théâtre d’action. Il a ses lieux de prédilection… à la mode… les belles avenues, certains endroits où l’on consomme ou danse (dancing-bar, super-boum, night-club où commet le discothécaire…), un cercle auquel il appartient. Il se considère comme « beau-garçon » et la rue est son miroir. Il était un « crack », un « play-boy »… Il est devenu un sapeur. Sa démarche est fière. Il appelle cela « faire diattance » (écrit aussi « diatance »). Tout cela se retrouve chez tous les merveilleux dont je parle dans mes livres et dont l’histoire remonte à la nuit des temps… d’autant plus loin que le merveilleux et la beauté y règnent !

Ci-dessous : Jocelyn Armel Le Bachelor, né en 1961 en République du Congo, et arrivé à Paris en 1977, dans sa boutique située au 12 rue Panama dans le quartier de Château-Rouge à Paris.

Ci-dessous : Deux lieux de rendez-vous des sapeurs dans les années 1980 : les chaînes, place de la République (il y avait à l’époque des chaînes), et la fontaine des Innocents près des Halles. Personnellement, je verrais bien dans cet ancien emplacement des chaînes de République une belle statue de sapeur ! Ce serait un bel hommage.

Des informations sur les sapeurs se glanent dans les livres déjà cités, dans de nombreuses vidéos, sur des sites, des expositions, etc.

Autres ouvrages :

  • Gandoulou, Justin-Daniel, Entre Paris et Bacongo, Paris : Éditions du Centre Georges Pompidou 1984.
  • Kingue Epanya, Christian, Les rois de la sape, Océan, 2014. Bande dessinée pour la jeunesse (à partir de 3 ans).
  • Mediavilla, Héctor, S.A.P.E., Éditions Intervalles, 2013.
  • Un rêve d’aller-retour. La Sape congolaise, catalogue de l’exposition présentée à Casa Africa du 3 mars au 29 avril 2011. Voir ici.

Ci-dessous : Petit documentaire de 1984.

Dans la vidéo à voir ici, le chanteur du Zaïre (aujourd’hui République du Congo), grand représentant de la SAPE, Papa Wemba (1949 – 2016), introduit des sapeurs dans une émission de télévision française de 1980. Un moment un sapeur réalise un rapide pas cadencé, et le présentateur croit que celui-ci a failli tombé ; du coup, le reste de la présentation reste très sobre ce qui est très dommage. Je me rappelle m’être fait la même réflexion lors de la diffusion en directe de cette émission. Ce genre de quiproquo a fait que les sapeurs en France sont souvent beaucoup plus sobres dans les rues parisiennes qu’ils ne le sont au Congo. Quand je parle du Congo, je comprends en particulier Kinshasa (ville de la République Démocratique du Congo : RDC) et Brazzaville (ville de la République du Congo) et dans une moindre mesure, d’autres villes comme Pointe-Noire, ainsi que tous les sapeurs de ces deux pays. Derrière la SAPE, il y a toute l’originalité et le tendre (comme on dit au XVIIe siècle en France) d’une culture africaine, du Congo et autour. Comme l'a écrit un commentateur de la vidéo ci-dessus : « Ça se froisse avec noblesse, ça se tremble avec élégance. » En utilisant des archétypes (les marques) du colonisateur et de son consumérisme, les sapeurs parlent aussi de leur culture. Certains évoquent un message d’amour. Il me semble que cela est vrai : un amour de l’autre (de son style de vie, ou pour mieux dire une ouverture vers l’autre) et de soi-même (élégance, appartenance assumée à une famille, un groupe ethnique, des valeurs…), ainsi qu’un goût pour une intégration dans une société sans pour autant abandonner leur liberté, en surjouant les codes de cette société, comme un adulte agite une marionnette pour faire plaisir aux enfants. On est dans le jeu et le surjeu, dans le futile et le grave… et un peu plus… beaucoup plus… pas seulement dans un jeu d’ombres et de lumières, mais aussi et surtout de couleurs ! La gamme est infinie, mais le sapeur bien gammé est dans la juste mesure… et là aussi avec le plus, le davantage qui fait la différence : la démesure que permet la mesure, un peu comme pour faire des choses compliquées il faut d’abord maîtriser les simples. En France on peut croiser un sapeur sans le remarquer, car le regard de l’autre est important, son admiration, voire son amour (amitié ou jeu amoureux comme le coq qui parade dans le poulailler, le cocodès au milieu des cocottes et des cocodettes…). LA SAPE est majoritairement masculine, et intensément masculine dans le sens vrai du terme. Comme je le dis souvent, dans la nature les mâles jouent beaucoup plus sur l'apparence que les femelles, ceci afin de séduire ces dernières et d'impressionner les concurrents. Voyez le lion et la lionne, le chant des oiseaux mâles, etc. La masculinité est avant tout cela, et cela l'était en France, ce dont je parle dans mon article sur Le grand renoncement. Le sapeur est intensément congolais, intensément français, intensément parisien, intensément universel ! Comme le dit le début de la chanson de la vidéo ci-dessous : « Il est toujours plus difficile d'être aimé que d'aimer. »

Ci-dessous : L’exposition L’Art d’être un homme qui s’est tenue du 15 octobre 2009 au 11 juillet 2010 au Musée Dapper à Paris) présentait des photographies de sapeurs.

Ci-dessous : Des sapeurs en 2015.

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Petit dictionnaire de la novlangue contemporaine : Cinquième partie

Ci-dessus : Quelques images-mots de la novlangue.

Cet article suit ceux-ci : Première partie, Seconde partie, Troisième partie et Quatrième partie.

Avant de commencer, je dois préciser une chose : Lorsque je personnifie la novlangue, disant par exemple « la novlangue utilise le procédé de… », je signifie ceux qui l’utilisent, bien évidemment. Il s’agit d’une manière incorrecte de s’exprimer, mais je n’ai pas réussi à faire mieux. Comme l’écrit la précieuse Madeleine de Scudéry (1607 - 1701) à la fin de son ouvrage intitulé Les bains des Thermopyles (édition posthume de 1732), citation que je répète souvent : « Si j’avais eu plus d’esprit et plus d’art, cette Relation vous aurait été plus agréable. »

À noter que j’ai puisé certains des termes chez François Jarrige, Xavier-Laurent Salvador, Jean-Dominique Michel et Ariane Bilheran. Xavier-Laurent Salvador a dit notamment que « le problème est quand derrière [le vocabulaire] vient se cacher une morale […] les bons parlent la bonne langue et les méchants la mauvaise. » Il est vrai qu’il ne faut pas être trop manichéen et j’espère ne pas l’être trop dans ce Petit dictionnaire de la novlangue. Simplement il faut savoir, connaître étant un apprentissage vers la liberté : savoir sans juger, mais en disant que, lorsque l’on marche sur nos libertés, cela nous fait mal ! Personnellement je n’ai pas de message à faire passer, étant un simple et simplet être humain, et c’est pour cette raison que je parle principalement des petits-maîtres et de la mode, considérés comme si futiles. Et puis tout cela n’est-il pas absurde… tragiquement absurde quand cela conduit à la misère ou à la guerre ? Tout ce vocabulaire est importé de combats venus d’Outre-Atlantique n’ayant jamais eu cours en France… Alors ne faudrait-il juste pas les écouter et laisser tomber cette agitation fiévreuse ? En parlant de novlangue on la concrétise un peu davantage, même en la critiquant. Et comme disait Panglof, « il faut cultiver son jardin »… Cependant, Voltaire savait qu’il fallait aussi s’impliquer pour la communauté.

BIEN-ÊTRE. Selon la novlangue : « Impossible à atteindre sans développement économique », ou pire sans emprise sur les gens… sans totalitarisme.

ACADÉMIE DU CLIMAT. La novlangue crée des institutions complètement inutiles, donnant bonne conscience, sans réellement agir. L’Académie du Climat de Paris en est une, fondée par la Mairie de Paris en 2021. Elle aurait « pour objectif de répondre aux enjeux du réchauffement climatique par tous ». À noter le « par tous », comme si la responsabilité était dans les mains du péquin moyen. Les institutions se déchargent des problèmes qu’elles créent en partie ou refusent d’aborder en profondeur en créant des organismes fantômes et en rendant responsables les citoyens : triez vos déchets, n’utilisez pas trop d’électricité, portez un masque… autant de mesures de façade qui ne règlent aucun problème.

ASYMPTOMATIQUE. Sans aucun symptôme. Dans la novlangue nous sommes tous malades… même quand on ne le sait pas ou ne le voit pas… ou ne l'est pas…

BIENVEILLANCE. La novlangue use de termes positifs pour les détourner. Elle est une rhétorique d’enfermement qui conduit à des claustrations réelles, et pas seulement dans le cadre de réclusions, mais aussi de marginalisations, comme pour le personnel soignant ou d’autres n’ayant pas voulu se faire vacciner ou par des gardes à vues arbitraires et des emprisonnements politiques comme pour certains gilets jaunes. On est très loin de la bienveillance, mais le mot ne coûte rien à formuler et permet de cacher en partie la malveillance et la maltraitance de ceux qui utilisent la novlangue. Voir RELIGIEUX.

Ci-dessous : Un exemple de fausse bienveillance : portez un masque, ne soyez pas trop bruyants, tout cela dans une atmosphère d'affairement consommatrice entretenue. On n'est pas dans le domaine du rationnel mais dans celui du religieux, d'une sombre croyance digne d'âges obscurs.

BLACK BLOC. Il est évident que les black bloc, que la novlangue a assimilé à des gilets jaunes, sont des éléments rapportés. Le nom même, en anglais, en dit long sur leur qualité de chien de garde de l’impérialisme actuel. Pourtant ils se prétendent anarchistes, ce qu’ils ne sont évidemment pas.

BLANCHITÉ. On parle aussi de « privilège blanc », expression mettant en avant l’aspect de domination.

CERTIFIER. La novlangue utilise l’incertitude inhérente à l’être humain, par nature très limité, pour imposer ce qu’elle établit comme des certitudes, ce qui rassure l’homme qui possède un instinct animal de conservation et de peur. Le domaine médical est envahit de certifications et normalisations (ISO…)

CHIFFRES. Dans la novlangue, les chiffres sont généralement falsifiés ou cachés, car le bilan est avant tout catastrophique. Elle règne donc par la duperie. Elle cherche à faire croire à une réalité différente que celle que chacun vit. Elle le fait d’autant plus facilement qu’elle dispense des attirails technologiques dans lesquels chacun peut créer sa bulle et s’y enfermer. Parmi les chiffres falsifiés ou cachés en France, il y a ceux de la pauvreté (des bidonvilles pullulent en Île-de-France, et des dizaines de milliers de personnes vivent dans des tentes, des misères esthétiques, morales, intellectuelles, sociales ; il suffit de prendre les transports en commun pour s’en rendre compte)… une immigration et une émigration de folie, la fin de l’unité, etc.

COLONISER. La novlangue est tel un animal qui colonise le nid d’un autre, comme un virus prenant possession du corps qui le nourrit. Elle occupe littéralement le refuge d’autres et les soumet. Elle envahit en particulier ce qui est le plus cher aux êtres humains, comme la santé. Lors de la crise orchestrée autour du coronavirus, on a vu une multitude de gens incompétents, manipulateurs ou pervers utiliser la rhétorique de la santé pour aller dans un sens opposé à celle-ci mais du côté de leurs ‘intérêts’, ceci afin de berner. Beaucoup de professionnels de santé ont joué ce jeu nauséabond par peur, par auto-censure et surtout en s'enfermant dans une rhétorique médicale utilisée par d’autres à des fins autres que la pure médecine.

COMMUNIQUER. La novlangue est experte en communication. Elle utilise toutes ses ficelles afin de persuader, manipuler et confondre. La novlangue ne se soucie pas de plaire, c’est-à-dire d’être aimable, propre, affable… mais de persuader, voire d’endoctriner. Elle ne peut cacher sa vulgarité, voire elle la revendique (voir VULGARITÉ.), sauf si cela dérange ses plans.

CONSCIENTISATION. Essayer de faire prendre conscience à une personne ou à un groupe de problèmes qu’il n’a peut-être même pas.

DÉCARBONER. L’arbre qui cache la forêt des multiples pollutions.

DÉCOLONISATION. On en parle beaucoup, et comme le dit Xavier-Laurent Salvador, on le fait en anglais ! Xavier-Laurent Salvador et Jean Szlamowicz ont écrit Le sexe et la langue. Petite grammaire du genre en français, où l’on étudie écriture inclusive, féminisations et autres stratégies militantes de la bien-pensance, Paris : Éditions Intervalles, 2018.

DÉCONSTRUCTION. Détruire est dans l'ADN de la novlangue. Elle n'avance que comme cela.

DÉCRÉDIBILISER. La novlangue utilise plusieurs techniques de décrédibilisation de ceux qu’elle considère comme ses adversaires : diffamation, mise à l’écart… L’une d’entre elles consiste à faire dire par des soi-disant opposants à son univers des choses ridicules. Par exemple, pour le téléphone portable, on avait fait croire qu’il chauffait tellement qu’avec plusieurs on pouvait cuire des œufs, ou bien que des végétariens préconisaient de se débarrasser des animaux domestiques parce qu’ils mangent trop de viande, ou bien que les décroissants prônaient un monde horrible, digne de la préhistoire, ou bien que les anarchistes sont extrêmement violents, etc. Tout cela pour qu’ils aient à dos la majorité de la société qui se considère comme « bien-pensante ».

DÉRESPONSABILISATION. La novlangue responsabilise le citoyen pour se déresponsabiliser elle-même… se dédouaner. Elle l’a fait pour la crise orchestrée autour du coronavirus, elle le fait avec la crise orchestrée autour de la pénurie d’énergie. Voir RESPONSABILITÉ.

Ci-dessous : EDF, qui depuis des décennies rançonne les Français afin d’être plus compétitif à l’étranger et pour soutenir des projets nucléaires et renouvelables fous, n’est pas dans la possibilité d’assurer un service de qualité et peu cher. Elle cherche donc à rendre responsables les citoyens. « Dans la novlangue « responsabiliser » signifie « rendre responsable ».

DISRUPTION. En français ce mot signifie rupture, fracture, mais comme anglicisme, le wiktionnaire nous explique qu’il s’agit d’une « Stratégie d’innovation par la remise en question des formes généralement pratiquées sur un marché, pour accoucher d’une “vision”, créatrice de produits ou de services radicalement innovants. » Dans la novlangue, cela consiste à détruire le passé et le présent jugé non dans la ligne, pour imposer une vision unique qui est la sienne. Voir DISTANCIEL.

DISTANCIEL. « Distanciel » est un des mots de la novlangue utilisé de manière massive depuis la crise orchestrée autour du coronavirus, comme ceux de « disruption » (voir DISRUPTION.) ou « présentiel » (voir PRÉSENTIEL.). Cela veut dire ce qui se fait à distance… La société de la novlangue voudrait que tout se fasse ainsi, cela permettant de savoir ce que chacun fait.

DIVISER. Individualiser et communautariser afin de diviser. Chaque groupe doit être une minorité, même les Français en France. Pour cela on divise le plus possible : les gilets jaunes contre la police, les gilets jaunes contre les Français (dans ces deux cas avec les black bloc, voir BLACK BLOC), les noirs contre les blancs, etc.

ÉCO-ANXIEUX. Voir PHOBIE.

ÉCOCITOYENNETÉ. Rendre les citoyens responsables pendant que les plus grands pollueurs s'accroissent.

ÉCOLOGIE DE CROISSANCE. Je ne sais pas si la décroissance est la solution collective ; ce que je sais, c’est que la croissance est un leurre. Elle fait penser aux invasions de sauterelles ou autres animaux et végétaux qui détruisent tout sur leur passage.

EFFONDREMENT. Si la novlangue distille la peur, c'est qu'elle-même a peur, de même qu'un grand nombre de ses opposants. Tous évoquent un effondrement.

ÉLECTRICITÉ. Alors que Big Brother use de plus en plus d’électricité pour la vie moderne qu’il impose par l’intermédiaire du « tous connectés » (5G…), dans le même temps il demande que les citoyens fassent des économies d’électricité. L’électricité est un de ses supports. Ainsi demande-t-il une chose et son contraire en même temps… en pleine schizophrénie.

Ci-dessous une facture d'électricité : Cela fait des années qu'EDF rançonne les Français qui paient l'électricité, avec un abonnement + l'acheminement (x2) + une taxe sur la consommation + une taxe pour le service public (!?!?) + une taxe d'acheminement (alors que l'on paie l'acheminement déjà dans l'abonnement et la consommation) + la TVA sur le total, même sur les taxes !!!!

FAÇADISME. Cette politique est celle du façadisme dont je parle dans la conclusion de mon livre sur les architectures RER et le façadisme, ouvrage que l’on peut télécharger gratuitement (cliquer sur le livre dans la colonne de droite), cela sans problème, puisqu’il s’agit d’un simple PDF réalisé par mes soins et hébergé dans mon propre nom de domaine entièrement réalisé en HTML, sans utilisation de logiciels tiers. Le façadisme ne consiste pas seulement à détruire un bâtiment ancien remarquable pour n’en garder que la façade et prétendre qu’il a été conservé, mais se retrouve aussi dans la vie de tous les jours et notamment en politique, où beaucoup portent le masque de la bien-pensance pour cacher ou ne pas regarder en face leur vrai visage. Dans la novlangue on aime à parler de droits de l’homme et de beaucoup de choses considérées comme ‘bonnes’ tout en faisant exactement le contraire. Notre démocratie n’est plus qu’une façade, ainsi que notre République, nos politiques… et même nos amis sont souvent de façade. Face à cela, que faire d’autre que garder en notre coeur le feu de l'honnêteté, ne pas être des êtres de façade mais entiers ?

GOUVERNEMENT FRANÇAIS. Il s’agit de la plus grande imposture de ce pays. Les instances qui gouvernent la France ne sont pas les officielles (État, Gouvernement, Parlement…) mais celles qui favorisent une immigration massive et un délitement de la société française.

HISTOIRE. Gros mot, surtout si elle est nationale.

HUMANISME. Dans la novlangue, l’humanisme est considéré comme une erreur dans l’histoire.

INFANTILISATION. La novlangue semble constamment s'adresser à des demeurés.

Ci-dessous : On vous explique ce qui est bon pour votre budget et la planète. Dans le même temps, les gouvernants gèrent le parc électrique français de manière ubuesque, et augmentent toujours plus la facture d'électricité et les dépendances électriques et énergétiques. Autonomie et liberté disparaissent de la novlangue qui cherche cependant à rendre responsable les citoyens de manière cauteleuse. Ici, la RIVP (Régie Immobilière de la Ville de Paris) fait glisser sa responsabilité sur le locataire, alors que depuis des années elle favorise le tout électrique et pratique intensivement ce que j'appelle l'architecture RER (voir mon livre sur le sujet).

INNOVATION VERTE. Produits phytosanitaires (pesticides), internet, OGM, etc.

INVERSION ACCUSATOIRE. Technique de la novlangue qui consiste à accuser les autres de ce qu’elle fait. Elle traite de « menteurs » ceux qui disent la vérité, de « complotistes » ceux qui cherchent la vérité, de « anti-démocrates » ceux qui prônent les valeurs de la démocratie, de « fascistes » ceux qui sont contre la guerre, de « racistes » ceux qui souhaitent une vraie diversité (des nations, des peuples souverains, des cultures…) et non pas un mélange qui nivelle et détruit, de « homophobes » ceux qui croient en une véritable égalité de tous les êtres, de « anti-écologistes » ceux qui sont contre le nucléaire,  de « sectaires » ceux qui prônent la liberté, etc.

Ci-dessous un exemple d’inversion accusatoire. Alors qu’ici Elon Musk rétablit la vérité, on l’accuse de faire le contraire.

INVISIBILISER. La censure s’invente constamment dans la novlangue. Invisibiliser (shadow ban en anglais) consiste à faire en sorte que certains travaux, sites… ne soient pas mis en avant voire rendus invisibles. Les monopoles fleurissent sur Internet, comme Google ; et il est très simple pour eux de favoriser et de défavoriser…

MANIPULATION. Voir COMMUNIQUER.

MARQUE. La marque est un élément de la novlangue. Elle est un de ses marqueurs. Il s’agit de mettre sous influence… si possible de faire en sorte que les citoyens recherchent les marques et demandent d’eux-mêmes de devenir esclaves.

Ci-dessous : La banque n'est plus un service mais une marque.

MENSONGE. La novlangue n'hésite pas à mentir et utiliser toutes les autres ficelles du vice. Voir DÉSINFORMATION, RÉPÉTITION  et VULGARITÉ.

NATIONALISME. Dans la novlangue, le nationalisme est considéré comme du racisme, mais elle n'hésite pas à l'utiliser quand cela l'arrange, comme en Ukraine.

NOYER. Une autre technique de la novlangue est de noyer les auditeurs et spectateurs dans des flots de paroles et d’images. Quand ils sortent la tête de cette eau insalubre, ils en ont encore plein la bouche, et la déversent eux aussi sans s’en rendre compte.

PERSONNE DE COULEUR. Dès le début du XXIe siècle, avant même la grande vague d’immigration, les instances publiques françaises ont commencé à envoyer des messages et élaborer des sites internet avec toujours au premier plan des personnes originaires d’Afrique noire, très rarement d’un autre Continent, comme la Chine ou l’Inde. Plus de petits blonds ! Difficile de s’identifier avec un grand noir quand vous êtes un petit blanc. Même dans la publicité, l’objectif n’est plus de plaire ou d’influencer, mais de faire de la pure propagande, dans ce cas pour une immigration massive. La question du grand remplacement est honnie par la novlangue. Dans les faits on le constate dans la vie de tous les jours. Voir PROPAGANDE.

PEUR. La novlangue distille la peur : terrorismes, virus, problèmes d’approvisionnement électrique, pénuries… afin de se décharger de ses responsabilités et de faire oublier sa gestion catastrophique, pour le coup véritablement effrayante.

PHOBIE. La novlangue emploie ou crée de nouveaux mots en remplaçant le suffixe « - pathie » par un autre lié à une maladie mentale qui est « -phobie » : « xénophobie », « homophobie », « islamophobie », « LGBT-phobie,», « lesbophobie », « europhobie », etc. Si vous n’êtes pas d’accord, vous êtes considéré comme un malade mental juste bon à enfermer, piquer ou reléguer à des emplois de caissier ou au RSA.

PLAIRE. Voir COMMUNIQUER.

POST-CROISSANCE. De la croissance réinventée. La novlangue ne pense que croissance. Quand elle évoque une décroissance, c’est toujours pour le peuple, afin que ses élites poursuivent leur croissance…

PRÉSENTIEL. Ce mot est utilisé comme adjectif ou nom pour des personnes qui sont en contact direct. Être en présence des gens pour communiquer avec ceux qui nous sont le plus proches n’est plus la norme. Dans la novlangue, cela n’est plus la meilleure manière de communiquer. La présence principale doit dorénavant se faire devant son smartphone ou son ordinateur. Voir DISTANCIEL.

PROGRESSISME. Voir PROGRÈS. Dans le terme de « progressisme », la novlangue entend le BIEN… et ne tolère aucune critique à ce sujet. Le progrès dont il est question est une fuite en avant, à la manière de ces insectes qui se multiplient et ravagent tout sur leur passage. Il ne s’agit pas de progresser vers le bien, le bon ou le beau, mais d’aller vers davantage de profits et de pouvoir, tout cela concentré dans quelques mains. Critiquer ce progrès est un acte conspirationniste.

Ci-dessous : Chaque fois que la France est amputée de quelque chose on lui fait croire qu'elle s'en libère. Ici la désindustrialisation de l'Hexagone est présentée comme une libération ou une parano... un leurre.

PROPAGANDE. Évidemment, la novlangue utilise la propagande, d’une manière extrême, et dans tous les domaines, du public au privé, de la publicité aux informations, de l’école au Gouvernement… Rien n’y échappe. Voir PERSONNE DE COULEUR et RACISER.

Ci-dessous : Les médias dits sociaux sont les premiers, avec ceux de la presse subventionnée et l'AFP (oui c'est grave !), à pratiquer la désinformation, voire la censure. Ce sont pourtant les mêmes qui prétendent lutter contre cela.

RACISER. La novlangue remet sur le devant le concept de races en invoquant pour tout et n’importe quoi le racisme. Voir PERSONNE DE COULEUR.

RÉALITÉ. La novlangue ne tient pas compte de la réalité, elle la crée. Pour elle, un problème n'existe que si on en parle... et comme elle tient tous les grands médias, la réalité qu'elle donne est éloignée de celle que l'on peut vivre.

RÉFLÉCHIR. Réfléchir est considéré comme complotiste. La pensée complexe est éliminée.

RELIGIEUX. Un aspect important de la novlangue n’est pas nouveau : l’utilisation de concepts liés au bien, pour s’en servir comme d'une armure inattaquable derrière laquelle tout et n’importe quoi peut se cacher et même ce qu’il y a de plus horrible. Toutes les organisations politiques, religieuses ou autres ont leurs mots et concepts utilisés comme des leitmotive, des vérités intouchables même si elles sont grotesques. En cela, le discours de la novlangue donne une impression religieuse. Rentrer en novlangue est comme le faire dans une secte ayant des velléités d’universalité. Voir BIENVEILLANCE et FAÇADISME.

REPÈRES. Faire sauter les repères, culturels, politiques, etc. Voir DÉCONSTRUCTION.

RÉPÉTITION. La novlangue répète les mêmes messages afin de les faire croire vrais, même si ce sont des mensonges.

RESPONSABILITÉ. La novlangue responsabilise les citoyens afin de se déresponsabiliser. Voir DÉRESPONSABILISATION.

RESTRICTIONS. Synonyme de « censure », « suppression de libertés », « domination », « manipulation »…

SEXUALITÉ. La novlangue s’occupe de la sexualité des citoyens, car c’est un outil de domination. Elle déteste l’hétérosexualité. Elle ne la montre que sous une forme pornographique. Du reste, elle ne met en avant que des sexualités ‘déviantes’ (homosexualité, saphisme, transgenre…) pour au final banaliser la pédocriminalité, de plus en parlant d’elle constamment. La novlangue véhicule l’immondice et l’horreur. Voir VIOLENCE.

SURVEILLANCE. Les deux maîtres-mots pour comprendre la novlangue sont « propagande » et « surveillance ».

TRANSITION. Mot dont la novlangue se sert pour cacher les bouleversements profonds qu’elle met en place et qui sont particulièrement néfastes : fin de la démocratie, pouvoir dans les mains de quelques apparatchiks, empire mondial, destruction des cultures et des environnements, fin des libertés… Elle se sert de ce mot pour mettre en son pouvoir ceux qui ne le sont pas encore. C’est un synonyme de « rupture » voire de « guerre ».

UTILISER. SE SERVIR DE… La novlangue contemporaine utilise diverses ‘tactiques’ pour dominer. L’une d’entre elles consiste à voler la rhétorique des mouvances importantes ou nouvelles. Cela lui est d’autant plus facile, que beaucoup de personnes suivant un mouvement en adoptent la rhétorique afin de s’y réfugier, et continuent à la suivre même si elle est exploitée par des personnes en total opposition avec ces idées. On l’a vu en France par exemple avec la rhétorique de gauche (voire d’extrême gauche) utilisée par l’impérialisme mondialiste pour asservir, aveugler et culpabiliser.

VIOLENCE. Elle est partout dans la rhétorique de la novlangue, et en particulier dans les images. Combien d’affiches de films américains sans présentation d’armes ? Combien de morts jouées dans ces mêmes films. Elle banalise la violence aussi par d’autres moyens, comme l’information. La novlangue elle-même est violence. Elle viole le langage et donc la réalité pour la faire sienne.

Ci-dessous : Derrière cet acteur et ce cinéma, des centaines de milliers de morts européens (rappelons que la Russie a toujours été un pays européen). A bien y regarder, l'image ci-dessous est vraiment orwellienne.

VISION UNIQUE. La novlangue ne donne pas le choix. Elle balaie les alternatives quand elle ne peut pas les corrompre, ou bien les monopolise. Pour elle, le seul avenir envisageable est celui qu’elle propose. Elle mélange volontairement les notions de vision unique et d’unicité. Elle en appel à l’union, après avoir divisé, cela pour mieux régner.

VULGARITÉ. Elle est présente de bien des façons dans la novlangue, notamment dans la manière de s’exprimer, comme l’emploi systématique de mots américains ou franglais et même de gros mots. De nos jours, ces derniers se retrouvent dans les discours des plus hautes instances de la République. La vulgarité ne devrait pas être dans la bouche de représentants de citoyens, comme le sont les avocats, les ministres ou les présidents de la République. Cette vulgarité des représentants est nouvelle en France et déprécie fortement ses institutions. On la retrouve même chez les opposants à la novlangue. Elle peut se comprendre quand elle est spontanée, mais pas lorsqu’elle est assumée, comme intégrée dans un discours officiel ou réitérée lors de plusieurs discours. La vulgarité est un des outils de la novlangue de sape de toutes les institutions et paroles sensées auxquelles peuvent se raccrocher les citoyens, qui se retrouvent ainsi encore plus marginalisés et démunis. Lorsque le président de la République française dit vouloir ‘enquiquiner’ (le mot employé est plus vulgaire) certains citoyens, il marginalise non seulement une partie de la population mais aussi tous les Français. En même temps cela les pousse à rentrer dans la gueule d’Enfer de la Macronie.

Ci-dessous : Monster veut dire « monstre » en anglais. C’est le nom d’un des principaux sites de recherche d’emploi en France. Dans la novlangue, la monstruosité est partout. On remarque l’utilisation systématique de termes anglais. Sur les sites de recherche d’emploi, la plupart des sociétés de médiation d’emploi en France (recruteurs, agences d’interim…) ont des noms anglicisés : LHH Recruitment Solutions, Upskills cadres et experts, Work & You, Fyte Sales & Marketing, BDO Talent Management… Un très grand nombre des entreprises qui recrutent sur ces sites ont aussi des noms en anglais, et demandent des qualités dans cette même langue : « Chargé de Sourcing », « Journaliste podcasts », « Responsable Marketing », « Office Manager », « Business Développeur », « Chief of Staff », « Consultant Marketing Digital »… Les instances publiques françaises ne dérogent souvent pas à cette règle de la novlangue. Le français est pourtant une langue très parlée dans le monde.

Ci-dessous : Paris Musées est un établissement public parisien qui gère des bâtiments et des collections de quatorze des dix-sept musées de la capitale française. On pourrait croire que l'un de ses fût de défendre la culture et la langue françaises... et bien pas du tout.
 

Ci-dessous : Les organismes publics français utilisent de plus en plus l'américain, ce qui est particulièrement inquiétant, surtout qu'aujourd'hui l'Amérique représente l'impérialisme, la guerre, la mafia, la drogue, la pollution... Il y a de quoi devenir déprimé et alcoolique...

Ce ‘dictionnaire’ de la novlangue est très loin d’être complet. Je ne décortique pas les articles, ne m’informe qu'un minimum et que sur Internet, n’ai pas de télévision et n’achète comme journaux et revues que La Décroissance, Kairos et Nexus… sinon des revues sur le jardinage et l’apiculture, car je m’exerce depuis peu dans ces deux domaines. Ce n’est que très fortuitement que ces mots qui nous envahissent arrivent à mes oreilles, comme l’air pollué à mes narines… L’ère macronienne est un condensé de novlangue et de l’horreur qu’elle porte avec elle.

Résister à la novlangue est une chose facile et sans danger. Il s’agit d'essayer de ne pas écouter ceux qui l'utilisent et surtout simplement de ne pas l’utiliser ! Pour ceux qui sont profondément dépendants de ces vendeurs de narcotiques rhétoriques électroniques, il y a un petit effort à faire pour se sevrer, plus difficile si on est entouré uniquement d’autres drogués. Cherchons des mots et expressions françaises au lieu d’anglaises ; essayons de nous exprimer dans un joli français, voire avec poésie ; n’acceptons pas des concepts prêts à consommer mais réfléchissons, ou plutôt ouvrons-nous, non seulement aux autres mais aussi à nous-mêmes, à notre histoire, notre culture… à la vérité. Parlons francs… comme les Francs !

Ci-dessous : Les commerces avec des noms et formules d'introduction en anglais stupides pullulent toujours davantage. La photographie ci-après a été prise en face de chez moi. Be Salad signifie « Être salade » !!?! Il faut dire que les Français ressemblent de plus en plus à des légumes !

Ci-dessous : Pour conclure cet article très positivement, voici la chanson Ils sont Beaux nos Sourires écrite par Francis Lalanne lors de la crise orchestrée autour du coronavirus. Rappelons que le terme de « tact » vient du latin tactus (« toucher ») issu du verbe tangere (« toucher »). Dans le contexte, toute cette folie masquée, gel hydroalcoolique, couvre-feu, confinement, distanciation… était une horreur, un anti-savoir-vivre, une impolitesse caractérisée, un manque de tact total, une bêtise très triste. Si beaucoup d’artistes étaient et sont toujours contre la folie actuelle mise en place, Francis Lalanne a été un des rares à s’être mis en pleine lumière au milieu de cette obscurité, ce qui ne manquait pas de courage !

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Drôles de pistolets XXIV par Charles Vernier

Merveilleuses et merveilleux

Charles Vernier (1813 – 1892) est un artiste ayant dessiné de nombreux drôles de pistolets, en particulier aux époques de la crinoline et des cocottes. J’en donne des exemples ici, ici, ici. et il est possible qu’il soit à l’origine de cette estampe.

Il les représente dans des scènes de la vie quotidienne, par exemple dansant comme ici et ici, ou bien la crinolinomanie comme ici et ici. Ceci dit, la plupart des caricaturistes de son époque se sont amusés des crinolines, comme Félix Nadar (1820 – 1910) dont je possède de nombreux exemples, ce qui sera sans doute le sujet d’un autre article. Citons aussi Cham (1818 – 1879) et bien d’autres.

Quand je regarde les images de tous ces caricaturistes du XIXe siècle ayant portraituré des drôles de pistolets, j’y trouve de la bonté lumineuse et riante, un amour drôle de la vie parisienne… du coeur, de la liberté et de la joie…

Merveilleuses et merveilleux

Ci-dessus : « Les merveilleux en et les merveilleuses en 1854 ».

Ci-dessous : « Excellent moyen d’arriver au bal sans être chiffonnée. »

Merveilleuses et merveilleux

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La politesse de l’amour

Commençons cette année sous le signe de l’amour ! Je rechigne toujours à en parler, car ce n’est qu’un mot… bien vite galvaudé, alors que ce qu’il représente est indestructible et merveilleux.

Ceci dit, la langue française a de très beaux termes et expressions, « être aimable » par exemple. Cela consiste à susciter chez les autres l’amour, c’est-à-dire une ouverture, de la bienveillance.

La mode et l'art en général sont amour quand ils donnent à chacun de quoi être rassasié, en paix et plein de joie. Qui a-t-il de plus joli qu’un être comblé ? C’est ce que je vous souhaite ainsi qu’à votre entourage pour cette nouvelle année !

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Merveilleuses & incroyables

Le 16 décembre, a été vendu par la maison Thierry de Maigret, une miniature (voir ici) attribuée à Anthelme François Lagrenée (1774 – 1832) d’un « Portrait de Madame de Bussière, née de Bouvyer-Cepoy […] Circa 1798-1808. H : 4,5 - L : 3,4 cm. Marguerite Françoise (dite aussi Agnès) Bouvier de La Mothe de Cepoy, par son mariage comtesse de Buffon (1784), puis Madame Renouard de Bussière (1798), née en 1767 et morte en 1808, fut la maîtresse en titre du prince Louis Philippe d’Orléans, duc d’Orléans, connu sous la Révolution sous le nom de Philippe-Égalité. » On m’a fait remarquer que celui-ci a voté la mort de Louis XVI, et « fut tellement à la mode et adulé en son temps qu’avec ses appuis maçonniques, il a décrédibilisé son cousin au pouvoir !… faisant ainsi le lit de la Révolution. » Le duc d’Orléans a été guillotiné lui aussi en 1793, quelques mois après Louis XVI. Mme Bouvier de la Mothe de Cepoy avait 20 ans de moins que lui, et elle désapprouvait ouvertement les exactions de la Révolution. Elle était sans doute une merveilleuse à l’époque du Directoire, comme cette miniature le prouve. Peu de choses sont toutes blanches ou toutes noires… mais il y a des dominances. Rappelons que des merveilleuses connues étaient dans l’entourage de Napoléon et de ses généraux… qui n’étaient pas royalistes, bien que Bonaparte se soit fait couronner empereur. Ce dernier a même commencé sa carrière en massacrant des royalistes sur le parvis de l’église St-Roch. À cette époque, les petits-maîtres royalistes étaient surtout appelés des « muscadins ».

Madame de Bussière est donc ici peinte avec une cravate haute jusqu’au menton, que les femmes aussi portaient (voir ci-après un détail d’une de mes gravures) et un ruban rouge dans ses cheveux rappelant le sang de la révolution sur le blanc des aristocrates. Il peut s’agir d’une perruque. Le détail qui m’a surpris, et qui est à l'origine de ce début d'article, est son collier qui rappelle tout à fait des cicatrices dans le cou, et donc les têtes coupées de la Révolution. Je me suis alors aperçu que l’on retrouve ce genre de collier dans d’autres portraits de merveilleuses. Voilà donc un autre élément de la panoplie des merveilleuses rappelant le sang de la Révolution à ajouter aux autres, comme les cheveux coupés « à la guillotine », les chemises blanches très échancrées comme celles des condamnés, les rubans d’un rouge-sang

Merveilleuses et merveilleux

Ci-dessous, nous avons une autre façon de nouer la cravate des incroyables : en oreilles de lièvre (voir cet article). Cette miniature, vendue dernièrement à un chanceux, est un portrait d’incroyable de vers 1807. Je possède une gravure avec au centre un personnage semblable, avec la même coupe de cheveux courts, frisés et blonds (voir ici et ci-dessous après les photographies de la miniature). Sans doute s’agit-il d’une perruque.

Incroyable blondin
Incroyable blondin 1807
Portrait miniature ncroyable blondin
Miniature incroyable blondin 1807

Pour terminer ce petit tour des ventes de maisons et d’antiquaires, voici ci-dessous un autre témoignage d’époque, sans doute Directoire (1795 – 99), proposé par l’antiquaire de St-Ouen Le Curieux mais à un prix assez prohibitif. Les merveilleuses sont vraiment dans le style, et la légende en rajoute : « Ma Pa’ole d’honneur ! elle est ! Cha’mante ! »

Merveilleuses et incroyables
Merveilleuses et incroyables
Merveilleuses et incroyables
Merveilleuses et incroyables

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Les incroyables & les impossibles

Dernièrement, plusieurs documents sur les merveilleuses et les incroyables ont été proposés dans des ventes aux enchères parisiennes. Régulièrement, je vois passer de tels témoignages, notamment des miniatures, qui ne sont pas dans mes budgets, aujourd’hui particulièrement où je me restreins drastiquement, surtout que j’ai déjà beaucoup. Mais je profite de ce blog pour me faire plaisir et en parler, comme je le fais des documents en ma possession.

La maison Valetoux proposait le 10 décembre dernier une page manuscrite recto-verso, écrite sans doute à la fin du XVIIIe siècle ou au début du XIXe, avec sur le recto et une partie du verso une Chanson sur les incroyables & les impossibles. On m’a informé de cette enchère ; je ne me suis donc pas permis d’enchérir sur la personne qui a eu la gentillesse de le faire, bien que la pièce soit rare, émouvante et ait été achetée bien au-dessous de sa valeur… si on peut mettre une valeur sur le patrimoine…

« Impossibles » était un des autres noms affublés aux merveilleuses, comme celui de « inconcevables ». Je donne ces synonymes dans mon livre sur Les Petits-maîtres de la mode. Le premier est très rare, et par sa présence légitime en grande partie l’authenticité de ce feuillet, avec d’autres éléments bien sûr, comme le reste du texte, l’écriture, le papier… Ses précédents acquéreurs étaient le « Fonds Saint-Hélion puis [la] Bibliothèque de Madame H. »

Voici ce que j’ai réussi à déchiffrer du texte de cette chanson :

« Chanson
Sur les incroyables & les impossibles
Aux femmes faciles pour
éprouver xxx du secret

1er [couplet]
Quand un merveilleux séducteur
En bégayant vous peint sa flamme
Jurant sa Pa-ôle don-eur
qu’il vou-aime du fond de l’âme
Quand sa toilette & son maintien
Semblent dire je suis aimable
Jeunes femmes pensez y bien
Ce jeune homme est un incroyable (Bis)

2e [couplet]
Mais quand pour voler chez xxx
Écrasant la foule éperdue
Sur les ailes de son wisk [attelage léger d’origine anglaise]
Je vois xxx à demi nue
Son air secret ses jolis bras
Cette gaze à peine visible
Ses yeux surtout disent tout bas
Madame n’est pas impossible (Bis)

3[e couplet]
Jadis un fak[in] au moins avait
L’air xxx, vif & plein d’ardeur.
Quand une femme minaudait
Elle minaudait avec grandeur.
Mais aujourd’hui nos jeunes gens
Aveugles, bossus & risibles
Semblent être les impuissants
De tant de femmes très possibles. (Bis) »

Cette chanson se termine ainsi. Le manuscrit se poursuit : « Logogriphe » [divertissement consistant à composer avec les lettres d’un mot d’autres termes]. Pour le reste, je n’ai pas réussi à déchiffrer assez d’éléments pour que cela soit cohérent.

J’évoquerais d’autres de ces documents prochainement.

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Le petit verni

Dans ce blog, quand je parle des petits-maîtres, je présente des documents m’appartenant, sauf indication contraire. Ici, la partition que je souhaiterais vous montrer, je ne l’ai pas encore trouvée… seulement une plus récente dont la photographie est à la fin de cet article. La plus ancienne est visible ci-dessous. Les paroles de cette chanson mettent en scène le petit-verni dont il est question dans mon premier livre, et en évoque d’autres aussi présents dans cet ouvrage, comme le pschutteux, le vlan, le chic ou le gommeux. Dans ce texte, on retrouve des expressions et occupations de ces petits-maîtres fin-de-siècle.

Il s’agit de la partition de 1893 de la chanson intitulée Les Petits vernis, avec un autre exemple ici, interprétée par Yvette Guilbert (1865 – 1944) qui serait à l’origine de la musique, alors que les paroles sont de Jacques Redelsperger (1847 – 1930).

Voici ces paroles :

« Mouv[emen]t de Marche.

1er COUPLET. C’est eux qu’on voit passer avec des nœuds d’cravate,
Qu’ils ont mieux travaillés qu’leur baccalauréat.
Leur vrai rôle ici-bas c’est fair’ de l’épate.
Ma chèr’ si tu savais comm’ c’est un drôl’ d’état !

REFRAIN. Voilà les vernis, Les petits vernis,
Les pschutteux, les vlans, les chics, les fleurs d’gomme ! voici les vernis,
Les petits vernis,
Qui de leur vernis épatent tout Paris !

2 C’est dans les acacias que ces aimables merles
Étal’ de cinq à sept des grimpants à carreaux.
Des chapeaux épatants ! avec des gants gris-perles.
Ma chèr’, si tu savais c’ que ces gens-là sont beaux !
Au Refrain.

3 Ils aiment à casquer pour des femmes très chères ;
Chères ? tu m’entends bien ! je crois qu’on s’est compris ?
Car pour le sentiment, les amours printanières,
Ma chèr’, si tu savais c’ que c’est peu dans leurs prix ?
Au Refrain.

4 Ils ont des chevaux primés dans les concours hippiques.
Les plus beaux les plus chouettes et les mieux harnachés !
Ils conduis’nt des mail-coachs sans mett’ la mécanique.
Ma chèr’, si tu savais c’ qu’ils ont l’air de cochers !
Au Refrain.

5 Dans leurs cols empesés ils n’tourn’nt jamais la tête.
Et comme il est très pneu d'avoir l’air fatigué,
On dirait des croqu’- morts les jours qu’ils font la fête.
Ma chèr’, si tu savais c’ que ces gens-là sont gais !
Au Refrain. »

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Dessins, estampes et pastels au Louvre

Merveilleuses et merveilleux

Jusqu’au 16 janvier 2023, le musée du Louvre sort de ses collections des Dessins bolonais du XVIe siècle. Cette exposition illustre la parution du tome XII de l’Inventaire général des dessins italiens, dédié aux dessins bolonais du XVIe siècle dans les collections du Louvre. Je n’ai pas assez de connaissance artistique pour savoir apprécier les dessins anciens, l'âme du trait, le processus d'élaboration, de création… car j'y vois le plus souvent des esquisses, des essais, et non pas des œuvres à part entière, ou du moins sans doute pas dans le sens trop figé que je m'en fais. Cependant, ces inventaires de musée sont primordiaux pour la conservation des œuvres. J’en parle parce que cette exposition se termine, ou débute si on se trompe d’entrée comme moi, par une salle d’exposition permanente sur l’histoire du papier en Occident, de la gravure et du dessin. Il s’agit de la salle de médiation des Arts Graphiques consacrée aux Dessins, estampes et pastels.

Pour ceux qui s’intéressent aux dessins et gravures anciens, c’est une aubaine… surtout pour les novices qui apprendront beaucoup sur les divers papiers, leur histoire, leur fabrication, les différents supports du dessin (pas seulement le papier mais aussi la miniature, le parchemin…), les diverses techniques de gravure et de dessin et les outils permettant leur réalisation. Plusieurs pastels de Maurice Quentin de La Tour (1704 – 1788) sur papier marouflé sur toile sont aussi présentés, avec en ce moment des portraits de Louis XV, Marie Leszczyńska, Louis de France, Marie-Joseph de Saxe, du comte de Provence… De telles salles didactiques sont vraiment très bien !

Merveilleuses et merveilleux

Les photographies ci-dessus sont empruntées au site du Louvre.

Les iconographies ci-dessous proviennent de ma collection sur les estampes et livres de mode anciens.

Ci-dessous : Matrice en cuivre pour impression d’une gravure intitulée : ‘Le Contrôleur de toilette’. Elle est signée du sculpteur (graveur) « Mixelle jeune » (Félix Mixelle : 1763 – 1837), d’après un dessin de Claude-Louis Desrais (1746 – 1816). L’indication : « À Paris chez Pavard rue S Jacques N°240 APDR » signifie que l’éditeur est Pavard (fin du XVIIIe siècle) et que ce cuivre date d’avant 1789, car il y a un APDR (Avec Privilège Du Roi). C’est peut-être un cuivre original ou peut-être une copie. Format total du cuivre : 27,2 × 21 cm. Il a quelques traces de rayures, des taches et petites taches d’oxydation. L’ecclésiastique représenté est le religieux de la maison, ou celui qui vient visiter régulièrement, et qui donne ses avis sur la bonne moralité des tenues de la maîtresse du lieu, quand il n'est pas un abbé de Pouponville ou abbé coquet (voir mes livres). On le trouve sur quelques gravures représentant une dame à sa seconde toilette comme dans celle intitulée « Qu’en dit l’abbé ? ». Les présentées ici et ici, ont une cuvette (empreinte laissée par l’épaisseur de la plaque dans le papier) moins grande que celle de ma plaque, ce qui me fait dire que cette dernière n’est pas celle d’origine. Cet élément d’identification est à ajouter à cet article (Expertiser une gravure ancienne) que j’ai écrit en 2008, et qui est toujours très lu.

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Ci-dessous : Plaque avec deux cuivres d’un journal de mode des années 1880, et exemple d'une estampe de la même période provenant de Le Coquet, Journal des Modes.

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