Dernièrement, plusieurs documents sur les merveilleuses et les incroyables ont été proposés dans des ventes aux enchères parisiennes. Régulièrement, je vois passer de tels témoignages, notamment des miniatures, qui ne sont pas dans mes budgets, aujourd’hui particulièrement où je me restreins drastiquement, surtout que j’ai déjà beaucoup. Mais je profite de ce blog pour me faire plaisir et en parler, comme je le fais des documents en ma possession.
La maison Valetoux proposait le 10 décembre dernier une page manuscrite recto-verso, écrite sans doute à la fin du XVIIIe siècle ou au début du XIXe, avec sur le recto et une partie du verso une Chanson sur les incroyables & les impossibles. On m’a informé de cette enchère ; je ne me suis donc pas permis d’enchérir sur la personne qui a eu la gentillesse de le faire, bien que la pièce soit rare, émouvante et ait été achetée bien au-dessous de sa valeur… si on peut mettre une valeur sur le patrimoine…
« Impossibles » était un des autres noms affublés aux merveilleuses, comme celui de « inconcevables ». Je donne ces synonymes dans mon livre sur Les Petits-maîtres de la mode. Le premier est très rare, et par sa présence légitime en grande partie l’authenticité de ce feuillet, avec d’autres éléments bien sûr, comme le reste du texte, l’écriture, le papier… Ses précédents acquéreurs étaient le « Fonds Saint-Hélion puis [la] Bibliothèque de Madame H. »
Voici ce que j’ai réussi à déchiffrer du texte de cette chanson :
« Chanson
Sur les incroyables & les impossibles
Aux femmes faciles pour
éprouver xxx du secret
1er [couplet]
Quand un merveilleux séducteur
En bégayant vous peint sa flamme
Jurant sa Pa-ôle don-eur
qu’il vou-aime du fond de l’âme
Quand sa toilette & son maintien
Semblent dire je suis aimable
Jeunes femmes pensez y bien
Ce jeune homme est un incroyable (Bis)
2e [couplet]
Mais quand pour voler chez xxx
Écrasant la foule éperdue
Sur les ailes de son wisk [attelage léger d’origine anglaise]
Je vois xxx à demi nue
Son air secret ses jolis bras
Cette gaze à peine visible
Ses yeux surtout disent tout bas
Madame n’est pas impossible (Bis)
3[e couplet]
Jadis un fak[in] au moins avait
L’air xxx, vif & plein d’ardeur.
Quand une femme minaudait
Elle minaudait avec grandeur.
Mais aujourd’hui nos jeunes gens
Aveugles, bossus & risibles
Semblent être les impuissants
De tant de femmes très possibles. (Bis) »
Cette chanson se termine ainsi. Le manuscrit se poursuit : « Logogriphe » [divertissement consistant à composer avec les lettres d’un mot d’autres termes]. Pour le reste, je n’ai pas réussi à déchiffrer assez d’éléments pour que cela soit cohérent.
J’évoquerais d’autres de ces documents prochainement.