Le galbeux et la galbeuse

1895-JournalDesDemoiselles2-300Photographies : Planches du Journal des demoiselles de 1895. Celle de gauche est du 1er janvier et la seconde du 1er février.

Galbeux et galbeuse sont des noms et adjectifs employés à la fin du XIXe siècle et au début du XXe comme synonymes de chic, raffiné, élégant. Dans le roman d'Octave Mirbeau (1848-1917) Le Journal d’une femme de chambre paru en 1900 on lit « Il connaissait tous les jockeys, tous les entraîneurs, tous les bookmakers, et aussi quelques gentilshommes très galbeux, des barons, des vicomtes, qui lui montraient une certaine amitié, sachant qu'il possédait, de temps à autre, des tuyaux épatants ... »

Avoir du galbe signifie avoir du chic. Cette expression est utilisée en particulier dans la seconde partie du XIXe. Dans Le Vocabulaire et la société sous Louis-Philippe (Slatkine Reprints, 1967), Georges Matoré indique : « " galbe, écrit Balzac, est encore un mot à la mode, un de ces mots qui vous font regarder comme un membre de la société des antiquaires ou de l'académie des inscriptions et belles-lettres. " Avoir du galbe, c'est posséder ce que l'on appelle familièrement aujourd'hui du " chic ", c'est à dire quelque chose d'intermédiaire entre l'élégance et l'originalité. Les Jeunes-France s'efforcent, en 1833, de donner à leur vêtement un galbe artiste et pittoresque, c'est à dire une allure qui n'ait rien de bourgeois, rien de prosaïque. »

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Le poseur et la poseuse

AlmanachduCharivaripour1892LeRdvdErnestine-314lmPhotographie : Dessins humoristiques provenant de l'Almanach du Charivari pour 1892 (21 x 15 cm) : « Le rendez-vous d'Ernestine, par Henriot. » « - Sept heures moins le quart. - Ah ! Mais … mais il me fait poser ! » « - On n'a vraiment pas idée de ça ! »
Le poseur ou la poseuse est une personne qui adopte un comportement artificiel, affecté dans ses attitudes et ses gestes. Cette définition est utilisée à la fin du XIXe siècle et dans la première moitié du XXe.
Gyp (1849 - 1932) offre des descriptions de poseuses et poseurs dans son livre Trop de chic (1900). La poseuse de la vente de charité mondaine : « S’est fait nommer Dame du Repentir momentané, parce que l’œuvre est sous le patronage de la duchesse et que tout ce que patronne la duchesse est forcément chic. S’agite, va, vient, se prodigue, parlant beaucoup et étalant une toilette éblouissante. N’est venue que pour être vue, et se démène pour qu’on la voit. Si demain les chroniqueurs mondains oubliaient de la nommer en énumérant : " l’essaim des toutes radieuses beautés qui illuminaient la vente, dans des toilettes faites de rayonnements d’ailes de colibris, etc. ", elle en mourrait de colère. » La poseuse dans un bal : « Grande, svelte, les cheveux tordus à la grecque. L’oeil à demi voilé, le sourire énigmatique. Toilette très alambiquée, mais très comprise et mettant bien l’objet en valeur. Choisit ses danseurs avec affectation ; leur fait écrire leur nom eux-mêmes sur son éventail ; s’embrouille exprès dans sa comptabilité. Se fait apporter à boire et à manger au lieu d’aller au buffet. Horripile les jeunes gens et les maîtresses de maison. S’accroche généralement à un poseur comme elle. S’imagine qu’à eux deux ils font sensation. »

Photographies suivantes : Assiette de J. Vieillard & Cie, de Bordeaux, du XIXe siècle, de la série « Les ridicules de Paris » : « Des dames qui vont au théâtre pour se mettre en spectacle. » Jusqu'au XXe siècle, le théâtre est un lieu où on aime non seulement voir des représentations mais aussi s'exhiber ou observer les autres. Ici deux poseuses se donnent en spectacle de leur balcon, en robe crinoline.

Poseuses-2-100© Article et photographie LM

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Un livre à la mode au XVIIIe siècle : Angola, Histoire indienne.

angola1erepartie300lmPhotographies : Angola, Histoire indienne ; Ouvrage sans vraisemblance. Nouvelle édition revue et corrigée. Première partie et Seconde partie. « A Agra. Avec Privilège du Grand-Mogol. ». 1747. Les deux parties de cet ouvrage sont reliées avec deux autres d'Abdeker, ou l'Art de Conserver le Beauté (1754), le tout sous le titre général d’Étrennes pour les Dames (1754). Ce livre d'à peu près 15 x 9 cm, est particulièrement précieux puisqu'il rassemble deux fameux ouvrages de petits maîtres de l'époque de Louis XV (qui règne de 1715 à 1774).
Angola, histoire indienne est un conte légèrement érotique, publié pour la première fois en 1746 et dédié aux « petites maîtresses ». 'Angola' signifierait 'Sémillant' dans une langue venue de l'Orient lointain. Jacques Rochette de La Morlière (1719-1785) y dépeint une certaine jeunesse française sous Louis XV, avec ses 'gens du bel air' et tous les plaisirs qui les suivent.
Il s'agit d'un conte pour adolescents avec des fées. Dans l'introduction de l'édition de 2009, Norbert Crochet écrit : « ce qui caractérise Angola est ce ton si particulier et cet angle de vue satirique qui font avec ironie et finesse le portrait de la haute société sous Louis XV. [...] Langage particulier, préoccupations futiles, manières évaporées, culte d'un plaisir que l'on veut angola2emepartie300lmraffiné et sans contraintes, allusions érotiques et atmosphère poudrée : autant de couleurs que La Morlière emploie pour nous peindre les mœurs de cette société [...] fière [...] de ses libertés ; autant d'éléments qui font des mondains du XVIIIe siècle des êtres au moins aussi exotiques que les personnages merveilleux qui peuplent ces contes du lointain Orient. »
On y parle de poupées de mode, de la toilette, de promenades, jeux, spectacles (Opéra, Comédie), vis-à-vis, soupers, cabinets particuliers, parties de campagne, expériences amoureuses ... de beaucoup de choses qui occupent les petites maîtresses et petits-maîtres.
Il y est question de 'gens du bel air', de 'femmes et hommes du bon ton', de 'personnes de qualité', de l'air du grand monde', du 'ton de Cour' … et surtout de l'apprentissage de l'amour sensuel. Ici le plaisir est le maître-mot, comme il l'est particulièrement durant l'époque de l'écriture de cet ouvrage. S'il donne des informations sur certaines moeurs de cette époque : celles des petits-maîtres ; il n'y a cependant pas de cacouacs (voir article sur Le cacouac et le libertin) … enfin des Lumières, même si la fée principale s'appelle Lumineuse ... tout de même !
La première partie du livre est visible ici et la seconde ici.

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Une personne smart, le smarteux et la smarteuse.

Dans la cinquième photographie de l'article Lorgner et oeillades est représenté « un jeune smart ». Une personne particulièrement élégante, bien élevée, brillante … enfin ayant de nombreuses qualités sociales est dite smart. Ce mot vient de l'anglais et est utilisé en France au XIXe siècle. Ont été créés à partir de ce mot les noms de smarteux et smarteuse.

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La mode

brancherouzaud1-300Photographie : Passage de La Fin des Branchés de Jean Rouzaud (1983), première édition.
Dans l'article Aperçus de la mode française, je me suis attaché à montrer l'origine très ancienne de la mode en France et même en Occident, depuis l'Antiquité. Il est difficile de dire quand cela commence. Ce qui est sûr, c'est que dès le XVe siècle, de nombreux documents soulignent son caractère exemplaire dans les cours en particulier de Bourgogne. Pourtant je constate en lisant des articles dans la presse que certains pensent qu'elle naît avec le couturier parisien d'origine anglaise Charles Frederick Worth (1825 – 1895) et les débuts de ce qu'on appelle la haute-couture, avec ses défilés etc. Mais la haute couture aussi est beaucoup plus ancienne. Cependant les grands magasins, la confection, la mondialisation et la marchandisation changent la donne. Au lieu de marquer un commencement, la haute-couture est à la fin d'une époque de la mode française. Du moins c'est ce qu'il semble aujourd'hui bien qu'on ne puisse présager du futur. Le grand changement c'est la dernière guerre, celle de 1939-1945. En 1945 la « haute couture » devient en France une appellation juridiquement protégée. A partir de vers 1947-1950, le « prêt-à-porter » fait son apparition dans l'hexagone et les couturiers disparaissent petit à petit. Alors qu'avant on fait le plus souvent fabriquer ses vêtements à sa mesure, à partir de cette période, on n'achète plus que des produits tout faits et de moins en moins souvent en France. Les grands couturiers deviennent avant tout des hommes ou femmes d'affaires : puis leur domaine 'couture' devient accessoire, voire une simple vitrine de leur marque de prêt-à-porte ou de leur firme. Alors qu'avant la guerre la mode est un modèle que l'on suit pour créer ses propres vêtements, elle devient un concept marchand imposé, inspiré (et même de moins en moins) par quelques créateurs. Pour que la mode et Paris retrouvent leur lustre, il faudrait sans doute le retour aux couturiers et aux vêtements sur-mesure ; et même pourquoi pas à l'apprentissage de la couture pour les filles comme pour les garçons dès l'école ; ce qui redonnerait un souffle à la création qui, en ce qui concerne la mode, est souvent l'apanage des adolescents et des jeunes adultes. Deux autres choses sont importantes je crois : avant l'avènement de la haute couture la mode se fait avant tout dans la rue, les promenades, les soirées etc., et pas uniquement dans des maisons de couturiers célèbres. Ensuite les gouvernements français font beaucoup pour supporter la mode française voire créer une industrie d'Etat. C'est le cas notamment sous Louis XIV et Napoléon 1er, mais aussi sous de nombreux autres gouvernements.

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Le viveur, la viveuse et le Paris viveur.

ViveursLaGaudrioleDetail500lmPhotographies : Première page du journal La Gaudriole n°188 du 19 janvier 1893 mettant en scène un dialogue de viveurs intitulé « Joyeux viveurs ». L'illustration a pour légende : « Joyeux viveurs. - Que prenez-vous ? ».
ViveursLaGaudrioleDetail300lmLe terme de viveur semble apparaître dans la littérature à partir de 1841. Il est beaucoup employé sous Napoléon III (empereur des Français de 1852 à 1870). Dans sa série Les Viveurs de Paris datant de 1852, Xavier de Montépin (1823-1902) décrit ces personnages du XIXe siècle dans plusieurs ouvrages : Le Club des hirondelles, Un Roi de la Mode, Un Fils de famille. Il existe aussi une pièce de théâtre du même auteur ayant pour titre Les Viveurs de Paris datant de 1857 (voir ici ou ici). Nombre de ces jeunes élégants viennent à Paris pour profiter du grand monde et de ses plaisirs, cherchent à s’amuser, fréquentent le boulevard des Italiens après minuit avec le café de Paris, Tortoni, la Maison Dorée, le café Anglais, le café Foy … On retrouve dans ces textes de nombreuses résurgences de la mode du XVIIIe siècle : le goût pour les intérieurs, les voitures, la toilette, et d’autres témoignant des modes particulières au XIXe (même si beaucoup naissent au XVIIIe) : la prédilection pour les chevaux et les courses, avoir un cocher anglais, un groom … Et puis il y a tout ce qui concerne la galanterie, les choses de l’amour. Manè (pseudonyme de Henri de Pène : 1830-1888) écrit Le Paris viveur (Paris, Dentu, 1862),ViveursLaGaudriole300lm Xavier de Montépin Montépin (1823-1902) Les Viveurs d'autrefois (Paris, A. Degorge-Cadot, 1880), et d'autres livres sont publiés ayant pour thème ce sujet comme La Fin d'un viveur par Paul Perret (1830-1904).
Le terme s’emploie aussi au féminin. Les viveuses sont des femmes ayant une vie assez dissolue et ne pensant qu’aux plaisirs. Il y a viveuses et grandes viveuses. Un livre du XIXe d’Émile Faure intitulé Les Grandes viveuses (1886) est consacré à des femmes telles que la reine Margot, la duchesse de Mazarin, la Duchesse de Bouillon, la Duchesse de Vendôme, la Duchesse de Berry, la Comtesse de Parabère.
Le monde des viveurs du XIXe siècle est celui de la dépense, de l’argent. Plusieurs écrits nous dévoilent des jeunes prétendants à la vie de viveur comme ces faux vicomtes et vicomtesses du livre d’Albéric Second (1816-1887) La Jeunesse dorée (1878) qui se cassent les dents dans ce Paris dont l’urbanité est faite de murs d’argent (où la monnaie est reine). Même le romantisme passionné des nouvelle-France est confronté à cette réalité. Théophile Gautier (1811-1872) dépeint cela dans son conte (de la série Les Jeunes-France) : Celle-ci et celle-là, ou la Jeune-France passionnée publié en 1833 (voir l'article Les romantiques 'jeune France' et 'nouvelle France') où un jeune romantique cherchant une grande passion finalement se retrouve dans les bras de sa dame de ménage qui elle l’aime vraiment.

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Le perruquier, le coiffeur pour hommes et les perruques masculines.

lesperruquesretravaille300lmPhotographies 1 et 2 : « Les Perruques » Lithographie « de C. Motte, R[ue] des marais » provenant de : « Miroir (journal) ». Charles Étienne Pierre Motte (1785-1836) est l'un des premiers et des plus importants imprimeurs-lithographes du premier tiers du XIXe siècle. Le journal Miroir des spectacles, des lettres, des mœurs et des arts paraît de février 1821 à juin 1823, fourchette de temps dans laquelle on peut situer cette estampe. Celle-ci est moderne pour l'époque car elle utilise le nouveau procédé d'impression qu'est la lithographie qui ne se développe en France qu'à partir de 1817 et surtout 1820. Le papier utilisé pour cette estampe est lui aussi assez nouveau : un papier chiffon de lin vélin peut-être mélangé à de la cellulose de bois. Quant au sujet il met en scène un fabricant de perruques. Celui-ci est dans un style moderne pour l'époque. Par contre ses perruques, toutes masculines, ne le sont pas car on trouve dans son atelier, qui est peut-être aussi sa boutique, des exemples de styles empruntés depuis le XVIIe siècle. Au XIXe les perruques deviennent beaucoup plus rares pour les hommes et c'est sans doute pour cela que celles présentes dans l'atelier semblent faites soit pourlesperruquesdetail300lm le théâtre, soit pour des tenues officielles. Ou bien il s'agit d'une allusion à l'ancien régime. Il se peut que cette estampe contienne un discours sous-jacent. Dans son livre intitulé Histoire de la presse française depuis 1789 jusqu'à nos jours (Paris, Ernest Flammarion, 1900), Henri Avenel relate un procès fait au Miroir en mai 1821 : « le parquet soutint que les rédacteurs de ce journal avaient commis une contravention aux lois de la censure, parce que, si leur journal n'était pas entièrement ni ouvertement consacré à la politique, ils se servaient habituellement d'allusions, d'apologues, de tournures sous lesquels ils parvenaient à communiquer à leurs lecteurs des nouvelles ou des idées politiques. On leur reprochait surtout le fréquent emploi qu'ils faisaient du sarcasme politique. Toute la cause consistait donc en interprétations, à l'aide desquelles l'accusation s'efforçait de transformer en articles politiques des rédactions que les prévenus soutenaient n'avoir point ce caractère. L'accusation s'appuyait sur seize articles dont il fut donné lecture à l'audience, à la grande joie de l'auditoire ; c'étaient notamment : une romance piémontaise, une anecdote sur les parapluies uniformes, un article sur les divers sens de cette expression, faire des brioches, un vocabulaire à l'usage des gens du monde, un article sur les fêtes publiques et sur 25 000 petits pâtés donnés à 20 000 indigents qui n'avaient pas de pain, etc. Dupin aîné défendit brillamment le Miroir avec son esprit plein de causticité et de bonhomie narquoise ; et le journal fut acquitté en première instance d'abord, en appel ensuite. »

leperruquierassiettegien300lmCet article fait suite à celui intitulé Le Coiffeur.

Comme je l'écris notamment dans deux autres : La mode et l'hygiène et La toilette masculine : l'art du rasage, le métier de perruquier comprend ceux de baigneur, étuviste et barbier au moins jusqu'à la fin du XVIIIe siècle. L'assiette du XIXe de Gien (photographies 3, 4 et 5) prouve que le métier de perruquier peut comprendre encore celui de barbier à cette époque. Cette profession implique la coupe des cheveux des hommes. Ce sont les coiffeurs qui s'occupent de la coiffure des femmes pendant tout le XVIIIe siècle, bien que les perruquiers cherchent à entrer sur ce terrain (voir l'article Le Coiffeur). Dans la définition de la sixième édition (1832-5) du Dictionnaire de l'Académie française, le terme 'coiffeur' désigne aussi bien « Celui, celle qui fait métier de couper, de friser, d'arranger les cheveux » des femmes comme des hommes.

Photographies 3, 4 et 5 : Assiette en « porcelaine opaque » de « Gien », du XIXe siècle, représentant l'intérieur d'une boutique : « 5 Le perruquier » « Salon pour la coupe des cheveux ». Au centre un perruquier fait la barbe à un client pendant qu'un autre s'essuie le visage devant une glace. On reconnaît des têtes à perruque, un plat à barbe, des ciseaux, un aiguisoir, une boîte-à-chapeau, une aiguière (pour se rincer), des vitrines avec de nombreux flacons et petites boîtes à crème ou autres dont la vente permet aux coiffeurs-perruquiers d'augmenter leur chiffre d'affaire.

leperruquierassiettegienmedaillon300lmLes premières perruques semblent dater de Louis XI (1423-1483). C'est plutôt un retour de celles-ci, puisqu'elles sont utilisées depuis la plus haute antiquité (les égyptiens aiment beaucoup s'en parer etc.). Au XVe siècle on les appelle 'fausses perruques' ou 'perruques feintes', car le terme de 'perruque' désigne alors une chevelure abondante, longue et ébouriffée ou frisée. Louis XIII (roi de France et de Navarre de 1610 à 1643) aurait lancé la mode des perruques pour hommes à la Cour vers les années 1620. A l'époque de Louis XIV celles-ci sont particulièrement volumineuses avant de devenir plus sobres au XVIIIe et passer de mode à la fin de ce siècle où les cheveux courts remplacent les coiffures aux cheveux longs réels ou factices (voir article sur Les cheveux courts).

Voici quelques images de perruques des XVIIe et XVIIIe siècles : 17e, 17e, 17e, 17e, 17e, 1672, 1680, 17e, 17e, 17e-18e, 17e-18e 17e-18e 1700, 18e, 18e, 18e, 18e, 18e, 18e, 18e, 18e, 18e, 18e, 1768 et 18e. Les perruques sont disposées sur un porte-perruque, dont deux sont représentés sur la table de la photographie 5. En voici d'autres : 1, 2 et 3. Le fauteuil à coiffer est quant à lui particulier : avec une échancrure en haut du milieu du dos comme sur le fauteuil cabriolet (entre 1750 et 1760) visible ici. Un autre est présenté dans l'article intitulé Fauteuil à coiffer du XVIIIe siècle.

Avant la Révolution, on va chez le perruquier pour s’y informer, se faire frisotter et coiffer comme l’écrit P.-F. Tissot (1768-1854 et qui a donc 21 ans en 1789) dans Les Français peints par eux-mêmes (tomes édités entre 1840 et 1842) : « Les cheveux d’un jeune homme du temps, relevés à racines droites sur son front, couronnaient sa tête par un toupet crêpé, pommadé, poudré à frimas, et accompagné de deux rangs de boucles circulaires qui rejoignaient la queue enfermée dans un ruban de soie noire. Cette modeleperruquierassiettegieninterieur300lm exigeait des papillotes deux fois par semaine avec frisure complète, opération fort longue, pendant laquelle jeunes et vieux, grands et petits, prenaient un singulier plaisir à écouter les nouvelles dont les artistes en perruques étaient toujours abondamment pourvus. » Les petits-maîtres du XIXe siècle y apprécient en plus la lecture des journaux et des derniers ouvrages à la mode qu'ils trouvent chez leur coiffeur (il est question de cela dans un passage de l'article sur Le gommeux). Quant aux cheveux frisés, ils sont une des marques du petit maître. Ils sont très à la mode, et ceci pendant tous les XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. De nombreuses images du XIXe représentent des hommes se faisant mettre des papillotes dans les cheveux par leur amie ou un coiffeur : les jeunes comme les vieux (voir l'article Boucles, macarons et papillote). Quant à l’expression « poudrer à frimas » employée dans la citation, cela consiste à lancer la poudre en l’air avec une houppe pour qu’elle retombe uniformément sur les cheveux, en ayant pris la précaution préalable de couvrir la personne d’un drap et de lui faire tenir un masque devant son visage.

La coiffure est une affaire sérieuse dans la France de la mode. Depuis l'Antiquité on la porte tantôt longue, tantôt courte. Au Moyen-âge, chez les hommes, la mode est pendant un temps aux cheveux longs ; puis le clergé les impose courts ; avant qu'ils reviennent à l'état précédent et parcourent ainsi les XVIIe et XVIIIe siècles avant d'être coupés à nouveau au XIXe (ou plutôt à partir de la toute fin du XVIIIe). Mais les boucles restent d'actualité dans les deux cas. La tendance des cheveux bouclés oblige certains à se faire deux fois par semaine des frisures ; quand ils ne portent pas tout simplement une perruque frisottée. Chez les dames, les frisures permettent aux cheveux de monter toujours plus haut en de gracieuses vagues (voir une caricature populaire de coiffure à frisure : « Frisure à la grenade sur laquelle se repose un fameux marin [le comte d'Estaing] au milieu de ses triomphes ».

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Le calicot

calicotentrevuefrontispiceet titre300lmCet article suit celui intitulé Les petites mains de la mode française 3 : les calicots et les arthurs.
Photographie : Frontispice et première page de Entrevue singulière et comique de Monsieur Calicot et de Monsieur Pigeon de vers 1818. Cette petite pièce parsemée de chansons s'apparente à un livre de colportage. Il n'a pas de reliure et fait seulement 12 pages plus la gravure qui représente un calicot. Il y est question de la pièce Le Combat des montagnes ou La Folie Beaujon. Monsieur Pigeon cherche à persuader Monsieur Calicot que si on se moque de lui dans cette comédie il ne doit pas en être chagriné mais en rire aussi car il devient grâce à elle un véritable personnage de théâtre. On « y tourne en ridicule les bals, les spectacles, les cafés et les commis marchands » qui s'habillent comme des militaires et prennent des apparences martiales pour vendre des tissus. Ils portent moustache, éperons, bottes, pantalon, triomphent dans les boudoirs, conquièrent des coquettes ...
Le calicot est un petit-maître de l'époque des mirliflores, bolivars, morillos, dandys et gandins qui tous ont des apparences militaires et par là suivent les incroyables et les muscadins. Ils se donnent comme eux des airs d'élégance, de virilité et de modernité particuliers à la comédie parisienne de la mode. A partir de 1830, les romantiques opposent à celle-ci la folie artistique, la passion ...

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La crevette

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A la fin de l'article sur Les petits crevés, il est question de la crevette.
C'est la compagne du crevé ou du gommeux avec qui elle partage la jeunesse, l’insouciance et les manières. Le Trombinoscope décrit une crevette dans un numéro qui lui est consacré. Mais l'intérêt de celui-ci réside plus dans l'illustration que dans le texte.
Photographies : Deux caricatures d’une crevette provenant de deux différentes éditions de Le Trombinoscope de la fin du XIXe siècle. Sur la première on remarque l’usage des mouches sur le visage et du rouge sur les joues comme au XVIIIe siècle. Sur la seconde, l’ombre de la caricature représente une cocotte (voir la définition dans l'article La cocotte et le coco) en papier.

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Le petit-maître

P.-F. Tissot (1768-1854) dans Les Français peints par eux-mêmes (tomes édités entre 1840 et 1842) décrit les habits d’un petit-maître d’avant 1789 : « Pour qu’un jeune homme fut à la mode, il lui fallait un habit de drap fin ou de soie, suivant la saison, qui serrât exactement la taille et les bras, car on avait la prétention de paraître mince ; l’embonpoint sentait la roture, et le ventre était à l’index, comme chose prohibée. L’élégant petit-maître sortait encore un gilet d’une étoffe chinée ou d’un drap chamois, des culottes de sénardine couleur jaune pâle ou gris de lin, des bas de soie à raies longitudinales et variées, des souliers étroits et lustrés à la cire luisante, des boucles d’argent taillées à facettes comme le diamant. L’été, on lui voyait un léger bambou à la main ; l’hiver, il jetait sous son bras gauche un énorme manchon à longs poils soyeux, dans lequel il se serait bien gardé de cacher ses mains quand il se promenait aux Tuileries et au Palais-Royal. N’oublions pas le chapeau de castor qui, pendant un ou deux ans, fut d’une hauteur démesurée. Paris l’avait emprunté aux Hollandais. Je pourrais bien retracer ici ce qu’on appelait le négligé pour une certaine classe de jeunes fashionables du haut parage, auxquels on pouvait appliquer ce trait de Gilbert : / En habit du matin, / Monsieur promène à pied son ennui libertin. / Je me contente de dire que ces dandys portaient alors des pantalons de peau de daim très-fine qui étaient si étroits, qu’on ne pouvait les mettre la première fois qu’avec le secours de deux personnes. De là, un mot plaisant du comte d’Artois qui, jeune, évaporé, se montrait fort attentif à suivre la mode. Son valet de chambre lui présentant un pantalon de cette espèce : " S’y j’y entre, dit-il, je ne le prends pas. " » Le « ton de fausset » est une façon de parler dont les petits-maîtres usent, c'est à dire une voix au registre très aigu et grêle. Ils ont du blanc, du rouge et des mouches au visage.

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Le grelotteux, le poisseux, le pommadin, le boudiné, le gratiné, la fine fleur, le gilet à cœur, la plastronneur, le vibrion, le huileux, la juteuse, le fin de siècle, la snobinette ...

petitjournalpourrire1856p3detail300lmPhotographie 1 : Détail d'une page du Petit journal pour rire n°33 de 1856 avec une série de caricatures : « Une espèce de monde » « par Marcelin ».
Photographie 2 : Partition de la fin du XIXe siècle ou du debut du XXe.
Photographie 3 : Détail d'une estampe du XIXe siècle.
Le grelotteux, le poisseux, la poisseuse, le pommadin, le boudiné, la fleur de pois, le gratiné, la fine fleur, le gilet à cœur, la plastronneur, le vibrion, le tchink, le tchock, le petit verni, le gluant, le huileux, la huileuse, la juteuse, le juteux, le fin de siècle, le fin de globe, la snobinette sont des petits maîtres, ou des faux petits-maîtres, du XIXe siècle. Ils semblent tous apparaître dans la seconde moitié du XIXe siècle.
Albert Millaud (1844-1892) nomme rapidement LE GRELOTTEUX dans ses Physiologies parisiennes (1886) : voir la définition du faucheur. Dans son Le Langage parisien au XIXe siècle : Facteurs sociaux, contingents linguistiques, faits sémantiques, influences littéraires (Paris, de Boccard, 1920) L. Sainéan (1859-1934) l'inclut dans la généalogie des petits-maîtres de la seconde moitié du XIXe siècle : « Gommeux, remplaçant du cocodès, appelé aussi poisseux, pommadin, petit crevé, boudiné, grelotteux, derniers représentants plus ou moins ridicules de ce qu'on a appelé " les héros du chic et de la distinction vestimentale " : " Tout le Royal gommeux et l'Impérial grelotteux avait été conviés à cette crémaillère des plus vlan. Les horizontales de la grande marque étaient représentées par... ", Gil Blas, 29 janvier 1885. » Dans Modernités de Jean Lorrain (1885) on lit : « Sa traîne triomphale Est d'un satin si blême et sa chair idéale Si frêle, qu'au milieu des énormes bouquets, Outrageusement blancs des Grelotteux coquets, … » ; et dans Dictionnaire de la langue verte (1883) d'Alfred Delvau :filsaSebastien300lm « On rencontre des grelotteux (c'est, je crois, le dernier terme en usage) avec l'habit [...] Aujourd'hui le clubman est remplacé par le grelotteux ... » Dans ces citations on y croise aussi  le poisseux, le pommadin, le boudiné.
LE POISSEUX et LA POISSEUSE sont définis dans le Dictionnaire de la langue verte d'Alfred Delvau et Gustave Fustier de 1883 : « Gandin ; fashionable. Le successeur du petit-crevé. " Ils se réunissent six ou sept viveurs ou poisseux au café. " (Siècle, 1882) Poisseuse, compagne du poisseux. " Dans un boudoir de la rue des Martyrs, une jeune poisseuse, étendue sur une chaise longue, lit ... " (Henri IV, 1882). »
LE nom de POMMADIN vient de 'pommade'. Il désigne un garçon-coiffeur et un petit-maître joli et à la chevelure soignée. Il s'agit d'un jeune homme dont l’élégance exagérée rend grotesque. De même on appelle ainsi certains garçons coiffeurs. Il est possible que l’origine de ce mot soit ancienne. Au Moyen-âge on désigne par pomander, pomme de senteur, pommander, pomandre, pomme d'ambre, pomme à musc ... un petit réceptacle que l’on porte sur soi, dans lequel on place des odeurs (musc, pâtes odoriférantes ou autres parfums secs). Il est le plus souvent de forme ronde, avec un anneau de suspension fixé au dôme faîtier qui se dévisse et permet l'ouverture du corps divisé en compartiments (voir l'article Les Objets de parfums que l'on porte sur soi au XVIII e siècle). Il semblerait que ce soit M. Fortuné Calmels qui utilise le terme de pommadin pour la première fois en littérature (Delvau, Alfred, Dictionnaire de la langue verte, deuxième édition, Paris, E. Dentu, 1867).
LE nom de BOUDINÉ vient sans doute du fait qu'au XIXe siècle, les habits sont particulièrement serrés pour les hommes. Les gommeux aiment à exagérer cela (voir l'article intitulé La gommeuse et le gommeux, ceux du caf'conc, le dégommé, la gommeuse excentrique et la gommeuse épileptique). Peut-être faut-il rapprocher ce nom du 'petit gras' ou de l''aminci'.
LA FLEUR DE POIS est le titre d'un roman d’Honoré de Balzac paru en 1835 aux éditions Charles-Béchet dans les Scènes de la vie privée et publié de nouveau aux éditions Béchet sous le titre Le Contrat de mariage. C'est l'histoire d'un lion, un dandy en vogue, héritier bordelais qui quitte sa ville d'origine pour Paris, avant d'y revenir après s'être fait remarquer dans tous les lieux à la mode de la capitale. De retour à Bordeaux, il est accueilli par la haute société de cette ville. Une marquise d'un certain âge le surnomme la fleur de pois c'est à dire : le gratin (ou LE GRATINE), LA FINE FLEUR. Au XIXe siècle, il n'est pas rare qu'une désignation de personnage nouveau de théâtre ou de roman se retrouve employé dans la vie réelle : c'est le cas du 'calicot', de la 'dame aux camélias' ou au XXe siècle de 'Marie-Chantal'.
LE GILET A COEUR est un gilet que les petits maîtres de la seconde moitié du XIXe siècle modedetrouvillequandMThierdetail300lmportent parfois. On utilise cette expression pour les désigner. Il ne se ferme qu'avec un seul bouton et s'ouvre largement sur la poitrine, formant une sorte de cœur. On trouve de tels exemples dans certaines des illustrations des articles sur le gommeux : 1 (deux dernières images) et 2 (première et quatrième). On peut rapprocher ce petit-maître du 'plastronneur'.
LE VIBRION est un petit maître sans grande consistance. Ce nom désigne aussi une personne agitée.
Dans le livre L'argot au XXe siècle (1901 et 1905 avec un supplément) écrit par Léon de Bercy et le fameux chansonnier et écrivain Aristide Bruant (1851-1925) dont les portraits à l'écharpe rouge de Toulouse-Lautrec sont assez célèbres (voir ici et ici), quelques autres noms de petits maîtres sont ajoutés dans un passage les répertoriant succinctement comme LE LUISANT à rapprocher du TCHINK (venant sans doute de l'anglais 'chink' signifiant clinquant), LE TCHOCK (chock = calé, informé en anglais), LE PETIT VERNI (expression qui existe encore), LE GLUANT, LE HUILEUX, LA HUILEUSE, LA JUTEUSE, LE JUTEUX, LE FIN DE SIÈCLE, LE FIN DE GLOBE et LA SNOBINETTE. Voici plus exactement quel est ce passage : « Les termes pour désigner les Élégants changent avec la mode. Nous les mentionnons ici à titre de curiosité, en les plaçant dans leur ordre chronologique : Petit Maître, Muguet, Roué, Merveilleux, Muscadin, Incroyable, Mirliflor, Agréable, Lion, Lionceau, Luisant, Daim, Pommadin, Fionneur, Fleur des pois, Gant-jaune, Gandin, Cocodès, Col-cassé, Plastronneur, Crevé, Petit crevé, Poisseux, Gâteux, Gluant, Huileux, Psitt, Gommeux, Aminci, Boudiné, Petit Gras, Petit verni, Vibrion, Grelotteux, Pur, Copurchic, Ah, Ha, Bécarre, Genreux, Gilet à cœur, Vlan, Tchink, Tchock, Fin de siècle, Fin de globe, Gratiné, Pschutteux, Snob, Juteux, Smart, Smarteux. La femme-élégante, du monde de la galanterie, est appelée successivement : Petite maîtresse, Merveilleuse, Muscadine, Lionne, Biche, Cocotte, Cocodette, Crevette, Poisseuse, Huileuse, Gommeuse, Genreuse, Pschutteuse, Juteuse, Smarteuse, Snobinette. Cette dernière expression désigne également les précieuses de nos jours. »

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Bêtises et autres culbutes, gourgandines ou tâtez-y.

LaCrinolineEn Temps dHiver300lmPhotographie : Lithographie originale de la série « Croquis d'hiver » extraite du journal Le charivari publié en 1858 : « La crinoline en temps d'hiver. - Ma belle dame..... faut-y vous donner un coup d'balai ? ..... »

Depuis le XVe siècle, les manières de rendre plus amples les robes portent divers noms : le vertugadin, le panier, la bêtise, le boute-en-train, la culbute, la gourgandine, la crinoline, la tournure, le  faux-cul sont quelques-uns de ces termes auxquels on peut ajouter : le tâtez-y, le laisse-tout-faire, le mensonge de Paris, la gondole, le cadet, le panier à bourrelet etc.
crinolines500lmPhotographie : Page de 36 x 25,5 cm de L'Illustration, journal universel du 27 décembre 1856. Première page d'un article intitulé « Origine et histoire du jupon dit Crinoline » qui commence par quatre représentations : « Le vertugadin », « Le panier », « La bêtise » et « La crinoline ». Voici le début de cet article : « Les gens superficiels qui s'indignent, au nom de l'art et de la forme défigurée, contre les artifices de la toilette, ignorent sans doute que, pour trouver l'origine et les premiers usages de la plupart d'entre eux, il faut remonter l'histoire jusqu'aux peuples artistes de la Grèce et de l'Italie antiques. Quand la jeunesse ou la nature ne soutenait plus la gorge des femmes athéniennes, elles y suppléaient par un corset ; à Rome, les élégantes patriciennes donnaient de l'ampleur à leurs robes en les étageant de riches volants ... »

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La mini-jupe

1881ModesdAutomneLeCharivari300lm

Photographie : « 1881 – Modes d'Automne. Chaussures naturalistes pour averses. » Image provenant de la rubrique 'Actualités' du journal Le Charivari. Alors qu'à cette époque les robes des femmes ne montrent pas même une cheville, nous avons ici la prémisse de la mini-jupe.

Photographies suivantes : Assiette de Creil et Montereau « N°7 » de la série « Bal masqué » représentant un homme d'un certain âge et une jeune femme habillés en 'masque' ; le premier reconnaissant la fille d'un ami : « Est-ce possible, la fille à Roland. ». Celle-ci danse frénétiquement dans un accoutrement particulièrement osé pour l'époque, avec ce qui ressemble à une mini-jupe. Cette assiette date entre 1840 et 1876 comme le prouve la marque au dos. 
assiettecarnavaljeunefemme2-300lm.gifC'est entre 1962 et 1965, en pleine période pop, qu'entre autres la couturière britannique Mary Quant et le français André Courrèges lancent la mode de la mini-jupe
Photographies du dessous : Paris Match du 16 avril 1966 avec en page de titre une photographie ayant pour légende : « Les mini jupes se risquent dans les rues. Vont-elles conquérir Paris ? » et à l'intérieur un article illustré sur ce sujet.

MiniJupe1968ParisMatch-2-300lm© Article et photographies LM

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La carte de visite et le portrait-carte

PortraitsCartes-4-300crinoline10,5x6,4cm300lmPhotographies : Quelques portraits-cartes allemands de la fin du XIXe et début XXe.  Ces cartes font à peu près 10 x 6 cm chacune.
La carte de visite est d'un usage ancien. Déjà au début du XVIIe siècle, sous Louis XIII, la 'carte d'adresse' permet à un fabricant ou à un marchand de communiquer ses coordonnées en y ajoutant une note sur des objets qu'il fabrique ou qu'il vend. Le terme de 'carte de visite' est attesté dans le sens que nous lui connaissons dès le XIXe siècle, et est utilisé dans plusieurs langues en français. Durant ce siècle il devient à la mode de se faire faire un portrait photographique en plusieurs exemplaires, de la taille d'une carte de visite, appelé portrait-carte, carte-album ou carte-photographique. Dans l'article intitulé 'Un franc la pièce' du blog lescocodes.blogspot.fr une citation de Paris Vivant, par des hommes nouveaux : Le Gandin (1861) explique un des usages de ces cartes. A une époque où les femmes de condition ne travaillent pas et font presque quotidiennement une ou plusieurs visites à leurs homologues, il est de bon ton, si la personne n'est pas présente, de laisser son portrait-carte-de-visite. Les hommes se font faire aussi de telles cartes qui témoignent d'un certain statut social.
Louis Dodéro est considéré comme le créateur de ces portraits. C'est un photographe actif dans les années 1850 à Marseille comme on peut le lire dans Wikipédia. André Adolphe Eugène Disdéri (1819 – 1889) dépose un brevet en 1854 et lance à grande échelle cette idée.

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La chevalerie à la mode : pages, écuyers et menins.

page300lmVous savez que ce blog est particulièrement consacré à l'histoire des modes en France et des individus qui les portent et les renouvellent. Certains des codes utilisés par cette jeunesse mignarde sont empruntés à la chevalerie. A ce sujet j'ai déjà publié un article sur Le gentilhomme et un autre sur Le prince. Voici maintenant présentés brièvement les pages, écuyers et menins.
Photographie 1 : Gravure du début du XIXe siècle représentant une actrice jouant le rôle d'un page : « Madame DESMARES, T … Y. Artiste du Vaudeville. Rôle du Page dans AGNES SOREL. Vaudeville en 3 Actes. Chez Martinet, Rue du Coq ». La feuille fait 18 x 12 cm et le cadre 16,8 x 12 cm.
leschevaliersfrancaistitrerecadre300lmPhotographies 2 & 3 : Page de titre représentant un écuyer provenant  de l'almanach de 1823 intitulé Les Chevaliers Français suivi de Petit Souvenir des Dames. L'intérieur contient des histoires de chevaliers illustrées par six gravures hors texte. Nous sommes là en plein dans la mode romantique 'néo-gothique' que je traite dans l'article intitulé : Les modes gothiques et le style troubadour du XIXe siècle.
L'édition de 1762 du Dictionnaire de l’Académie française donne cette définition de l'écuyer :  « Se disait autrefois d'un Gentilhomme qui suivait & accompagnait un Chevalier, & portait son écu, lui aidait à prendre ses armes & à se désarmer. Un Chevalier était accompagné de son Écuyer. Autrefois les jeunes gens de la plus haute qualité ne portaient leschevaliersfrancaistitredetailnb300lmque le titre d'Écuyer, jusqu'à ce qu'ils eussent été faits Chevaliers avec les cérémonies qui se pratiquaient en pareil cas. Aujourd'hui, Écuyer est le titre que portent les simples Gentilshommes & les Anoblis. Il est défendu de prendre la qualité d'Écuyer, si l'on n'est noble. [...] »
Dans l’ancienne chevalerie, avant d'être un écuyer, on est page à peu près jusqu’à l’âge de quatorze ans. D’après la première édition du Dictionnaire de l’Académie française (1694), le page est un « Jeune Gentilhomme habillé de livrées, & servant auprès d'un Roi, d'un Prince, d'une Princesse, d'un Seigneur, ou d'une Dame. ».
L'édition de 1762 définit le menin comme étant : « un homme de qualité attaché particulièrement à la personne de M. le Dauphin, de M. le Duc de Bourgogne, &c. » Le nom peut être employé au féminin comme au masculin pour une jeune personne noble au service d'un membre d'une famille royale. Il désigne de même des jeunes gens extrêmement élégants et dignes. Ce genre de raffinés de haute naissance existent depuis la haute Antiquité. Les peintures présentant des familles nobles de la Renaissance italienne en offrent des exemples fameux.

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Le berger et la bergère

lebergerfidele1661acteV1blancrecadre300lmJusqu’au XIXe siècle, la pastorale occupe une place importante dans la vie artistique. Elle représente la réminiscence d’un âge d’or, la beauté simple, vraie, en opposition à celle très sophistiquée que l’on rencontre dans les villes. Certains petites-maîtresses et petits-maîtres ne rechignent pas à s’habiller avec des éléments empruntés aux bergères ou bergers. Le berger Céladon, le héros de L'Astrée d’Honoré d'Urfé (1568-1625), avec son noeud vert peut être regardé comme le chantre d’un aspect de l’élégance française. La mode des pastorales est restée très vive en France jusqu’à la Révolution. L’exemple de Marie-Antoinette qui se fait construire à Versailles une bergerie est connu. Il ne s’agit pas là d’une simple lubie, mais d’une véritable recherche de la beauté et des plaisirs vrais ; ce besoin de parfois se baigner dans des valeurs simples, belles, amoureuses et humectées de fantaisies.
Photographie : Frontispice de Le Berger fidèle de 1661. Dans la couronne de fleurs on lit : « Vieni Sto. Imeneo Venez Saint Hyménée ».

lebergerfidele1661acteV1blancdetail300lm© Article et photographies LM

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Le journaliste de mode et le frivoliste

J'ai déjà écrit un article sur les Reporters de mode au XVIIIe siècle. Parmi ces journalistes on peut inclure les graveurs, dessinateurs et photographes spécialisés dans ce domaine. Il sont très nombreux.
Dans le dernier tiers du XVIIIe siècle, de grands noms de la gravure ou de la peinture prêtent leur talent aux revues et gravures de mode, avec parmi eux Pierre-François Courtois (1736-1763), Louis Darcis (? - 1801), Claude-Louis Desrais (1746-1816), Nicolas Dupin le Jeune (1753 - ?), Philibert Louis Debucourt (1755-1832), A. B. Duhamel (1736-après 1800), baron Pierre Narcisse Guérin (1774-1833), Pierre Adrien Le Beau (1748-1773), Jean-Michel Moreau le Jeune (1741-1814), Augustin De Saint-Aubin  (1736-1807), Étienne Claude Voysard (1746-?) etc. Au début du XIXe siècle (et à la toute fin du XVIIIe), le Journal des Dames et des Modes fait travailler de nombreux artistes graveurs et dessinateurs dont certains célèbres ; cependant la plupart des estampes n'étant pas signées il est difficile de savoir pour lesquelles. Dans la suite de cette revue, les journaux de mode se font de plus en plus nombreux. C'est sans doute à cette époque que chroniqueur de mode devient un métier à part entière.
Le frivoliste est un « Littérateur léger, écrivain de journal de modes, - dans l’argot des gens de lettres. Ce mot a été créé par Mercier. »  d’après Alfred Delvau : Dictionnaire de la langue verte (1866).

© Article LM

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L'avant coureur et l'avant-gardiste

LAvantGardeAuXXeSiecle300lmLes avant-gardes sont un élément important du ‘gandisme’ puisque la modernité et la création font partie de la panoplie des petits-maîtres. La définition militaire d’avant-garde existe au moins depuis le XIIe siècle. Elle est réutilisée pour désigner les précurseurs d’un mouvement artistique. On trouve des exemples d’une telle acceptation du terme datant de la seconde moitié du XVIe siècle. Il s'agit donc d'un concept de l'époque moderne (de la fin du XVe siècle à aujourd'hui). En suivant l’histoire des mouvements littéraires et artistiques français on rencontre ces avant-gardes. Au XIXe siècle, elles ont pour noms : néoclassiques, romantiques, parnassiens, réalistes, naturalistes, symbolistes … Ils ont leurs quartiers, salons, sociétés, cafés, théâtres … au XXe siècle : École de Paris, surréalistes, futuristes, constructivistes, dadaïstes, expressionnistes, Bahaus, décontrusctivistes, post-modernistes et beaucoup d'autres ... Au XXe siècle l'avant-garde ne se contente plus d'être en avance, d'être la nouveauté, mais s'amuse à déconstruire et à renchérir toujours vers la rupture avec presque tout ce qui précède. On assiste même à un surenchérissement dans le nihilisme.
Photographie : L'Avant-garde au XXe siècle, de Pierre Cabanne et Pierre Restany, Paris, André Balland, 1969.

© Article et photographie LM

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Bijoux féminins du XVIIIe siècle

1aaoiseaux2a300.gifPhotographies du dessus : « Bijou d’accordailles : broche aux colombes. France, fin XVIIIe - début XIXe. Or, argent, diamants, rubis. Collection privée, Belgique. » © Exposition Le XVIIIe, Le Bijou, La Femme.

Photographie de gauche : Bague du XVIIIe siècle avec portrait. © Exposition Le XVIIIe, Le Bijou, La Femme.

Photographie de droite : « Bague cœur avec boîtier caché. France, XVIIIe. Or, argent, diamants, rubis « balais ». Collection privée, Belgique. » © Exposition Le XVIIIe, Le Bijou, La Femme.

3album-33-pic-222-expandDu 6 octobre 2012 au 17 février 2013 le château de Seneffe en Belgique accueille une exposition intitulée Le XVIIIe, Le Bijou, La Femme.

Des parures d'époque y sont présentées ce qui est rare ; essentiellement des broches, colliers, bagues, c'est à dire des genres que nous connaissons bien aujourd'hui. Pourtant les exemples d'époque sont peu nombreux : « Les raisons sont diverses : la transformation des bijoux à chaque changement de propriétaire, le départ à l’étranger des plus belles parures, la disparition volontaire des bijoux politiques et corporatifs, la déchristianisation ... »

Des formes oubliées comme la châtelaine sont aussi proposées à la contemplation. Beaucoup sont laissées de côté car éloignées de la définition contemporaine du bijou et n'ayant rien à voir avec une parure comme tous les objets précieux de toilette que l'on porte sur soi (voir les articles Les Objets de parfums que l'on porte sur soi au XVIIIe siècle, Boîtes à mouches ou Boîtes en or et objets de vertu au Musée Cognacq-Jay) ou d'autres comme les tabatières, les billets doux etc., les plus précieux étant considérés alors comme des bijoux, mais que notre époque contemporaine ne voient plus ainsi. Le XVIIe siècle définit le bijou comme étant une « Espèce de petit meuble curieux ou précieux, servant aux ornements des personnes ou d'un cabinet, d'une chambre, &c. » (première édition du2coeurcouronne300 Dictionnaire de L'Académie française : 1694). Le XVIIIe change le terme de 'meuble' en 'ouvrage' et ajoute celui de 'parure' : « Espèce de petit ouvrage curieux ou précieux, servant à la parure d'une personne, à l'ornement d'un cabinet, d'une chambre, &c. » (édition de 1762 du Dictionnaire de L'Académie française). Au XIXe le sens glisse pour ne désigner au XXe qu'une parure.

L’exposition s’organise autour de sept thèmes choisis avec sensibilité. Le premier propose des objets liés à « 1 - L'expression des sentiments » : portraits, symboles amoureux, bijoux en cheveux etc. Certains figurent « 2 - Une société en pleine mutation » et ses valeurs changeantes particulièrement à l'époque de la Révolution. D'autres sont des accessoires (« 3 - Accessoires, faits et gestes ») ayant leur utilité pratique (épingles, châtelaines, montres, boucles de chaussures …). Évidemment ils suivent « 4 - L'esprit du temps » : les modes. Ils accompagnent les inventions qui leur permettent de « 5 - Briller autrement » : la taille à facettes du diamant est conçue au XVIIe siècle par un  artisan vénitien ; des bijoux de substitution ou d'imitation sont élaborés, « la technique du strass est mise au point vers 1750 »  et de nouvelles pierres précieuses sont importées des colonies. Les bijoux religieux occupent une place importante (« 6 - En compagnie de l'abbé ») excepté à la révolution où on les cache. Et dans la seconde moitié du XVIIIe de nouvelles formes font leur apparition avec « 7 – Le retour à l'Antiquité ».

Photographie du dessous : Collier © Exposition Le XVIIIe, Le Bijou, La Femme.4album-33-pic-214-expand

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L'incroyable

incroyables-les2-300lmPhotographies 1 et 2 : Page recto-verso avec personnages de théâtre à la mode, datant de vers 1814, avec pour légende :  « Acteurs et actrices des différents théâtres de Paris en nouveaux costumes français. ». La page fait 18 x 23 cm.
Cet article fait suite à plusieurs autres :
Café des Incroyables : Ma parole d'honneur ils le plaisante (1797) ; Les Oublies ; Incroyable ; Incroyables chapeaux ; Exemples de tenues du début du XIXe siècle ; Les Merveilleuses, Incroyables, Muscadins … leurs cannes et leurs bâtons ; La rencontre des incroyables ; Les méprisants et la réponse inc'oyable. Voir aussi les définitions de l’inconcevable, de la merveilleuse et du muscadin.
L’incroyable est un personnage historique au même titre que la merveilleuse ou le muscadin, car tous se distinguent pendant la Révolution par la force de leur affirmation en un temps particulièrement troublé, et sont les seuls à vraiment ‘tenir le coup’ en limitant au maximum les dégâts. Leur force ? Leur jeunesse, leur joie, leur modernité exacerbée ! Napoléon lui-même suit leur mode et s’habille en incroyable ainsi qu’une grande partie de son armée comme expliqué dans l'article Les oublies.
Il est amusant de constater que l’image du couple de l'incroyable et de la merveilleuse devient petit à petit, au XIXe siècle et au début du XXe, une iconographie ‘fleur-bleue’ (un exemple ici).
MuscadinIncroyablesXIX300Photographies du dessus 3 , 4 et 5 : Un muscadin et deux incroyables représentés sans doute au milieu du XIXe siècle. Ici les personnages ne sont pas fleur-bleue comme ils le seront à partir de la fin du XIXe, mais les habits des incroyables sont assez exubérants.
lebongenren2-300lmPhotographie de gauche 5 : Merveilleuses et incroyables sont réunis dans cette estampe de Le Bon Genre du début du XIXe siècle intitulée « L’embarras des Queues. » Elle représente deux merveilleuses suivies de deux incroyables s’étant pris avec leur bâton dans la traîne des élégantes. L’humour est dans le trait caricatural et dans le titre qui peut être interprété de différentes façons.. On remarque outre la panoplie caractéristique, les binocles-ciseaux à la taille de l’un des protagonistes qui sont du genre de face-à-main (lunettes que l’on tient entre ses doigts) utilisés par les merveilleuses et incroyables. Le Bon Genre est édité de 1800 à 1822, tout d’abord en 115 dessins humoristiques, au format de la cuve d'à peu près 22 x 25 cm, commencés en avril 1800. En 1817 les 104 premières planches sont rééditées.
Photographie de droite 6 : « Coryphées d'un Bal Paré » de Le Bon Genre, n°23. Dimensions de la feuille : 25,2 x 32,6 cm.
corypheesdunbalpare300lmLes incroyables, pendant la période tournant autour du Directoire (1795-1799), sont des hommes, élégants, qui affichent une recherche extraordinaire dans leur mise et leur langage. Ils prennent l’habitude de prononcer les 'r' d’une façon particulière. C'est ce qu'on appelle un 'garatisme' qui consiste en un grasseyement mis à la mode par le chanteur Garat. On formule par la gorge certaines consonnes et en particulier les 'r' ; on zozote un peu (le ch devient s et le g : z), le 'l' disparaît ou est rajouté inopinément … Ils parlent d’une manière assez incompréhensive pour les non-initiés. Ils blèsent (pratique ancienne que l'on trouve par exemple chez les mignons du XVIe siècle), ont leur prononciation, leurs mots ; ils s’expriment par circonvolutions. Ils ont leurs gestes etc. Une gravure d’époque représente deux incroyables se saluant en croisant le petit-doigt ou d'autres se faisant des signes.
La tenue caractéristique consiste en des souliers ou bottes pointues, des bas souvent rayés, une culotte tombant à mi-mollet qui semble tellement comprimer le sexe qu’on ne le devine souvent pas, un habit carré avec un haut collet noir ou vert, un gilet à motifs rayés ou de pois, de hautes cravates blanches ou ‘rouillée’ qui touchent ou couvrent le menton. Les rayures ou les motifs à pois sont fréquents. Leurs cheveux ou leur perruque sont souvent blonds, en oreilles de chien, c'est-à-dire avec des mèches tombant sur les tempes ou plutôt pour parler à la façon du XVIIIe siècle, de longues faces (cheveux des tempes). Une grande tresse dans la nuque est parfois retenue par un peigne. Les longs cheveux et les tresses sont très fréquents au XVIIIe siècle chez les hommes.  La cadenette, avec ses tresses (généralement une dans la nuque et deux sur les côtés) est une coiffure de rigueur chez les militaires jusqu’à la fin de l’usage du sabre, car ces cheveux sont un rempart à ces armes dont la lame glisse dessus protégeant le cou. Les incroyables ont de grandes boucles d’oreilles rondes. Ils portent un chapeau bicorne ou rond qui est la prémisse du haut-de-forme. Leur canne est généralement un bâton noueux.  Pendant la Révolution, afin de ne pas s’engager, ils se font passer pour myopes, et gardent l’habitude de porter sur eux un ou plusieurs instruments de vue, en particulier un face-à-main en forme de ciseaux. La fausse myopie permet aussi d'éviter les inopportuns.
Si pendant la Révolution, les incroyables sont parfois les victimes de rixes et pourchassés par les jacobins ou les militaires ; à la fin de celle-ci, ils représentent l’ordre établi et la mode à suivre … même chez les militaires. Des nouveaux riches s’habillent en suivant cette mode de même que ce qu’on appelle la jeunesse dorée. Ils suivent les nombreuses gravures publiées à cette époque figurant ces élégants. Les graveurs les plus connus sont sans doute Carle Vernet (1758-1836) et Louis Léopold Boilly (1761-1845). Les lieux de rendez-vous des incroyables sont le Palais-Royal, le jardin de Tivoli (vers l’actuelle gare Saint-Lazare), les boulevards (Capucines, Italiens, Montmartre) et les nouveaux cafés qui s’embellissent en affichant un certain luxe et un décor néo-antique comme le Frascati, et de nombreux autres lieux.

ParisEtSesModes1803OrpheeFrancais1-500lmLes chanteurs à la mode sont Pierre-Jean Garat (1762-1823) et Pierre-Jean-Baptiste François Elleviou (1769-1842). Une gravure d’époque représente Garat sur une scène devant un parterre de merveilleuses debout, comme dans un concert de rock. C’est un chanteur d’exception, à la mode déjà sous Marie-Antoinette qui l’invite plusieurs fois à jouer devant elle. A la Révolution il émigre pour revenir sous le Directoire. Il est très apprécié de Napoléon. Type même de l’incroyable, extraordinairement raffiné, c’est aussi un mirliflore. Le XVIIIe siècle compte quelques idoles, dont certaines à la vie assez tapageuse comme celle du comédien et chanteur lyrique Clairval (1735-1795). Citons aussi la famille Vestris qui offre du XVIIIe siècle au XIXe des danseurs célèbres. La nouvelle danse à la mode chez les merveilleuses et les incroyables est la valse qui se pratique d’une façon très différente qu’actuellement. Après la Révolution, on danse dans les salons puis les bals reprennent. Louis-Sébastien Mercier écrit dans Le Nouveau Paris (1794) qu’il y a à Paris 1800 bals ouverts tous les jours : « Ici des lustres embrasés reflètent leur éclat sur des beautés coiffées à la Cléopâtre, à la Diane, à la Psyché. Là, une lampe fumeuse éclaire des blanchisseuses [cette citation est une preuve que les merveilleuses ne sont pas obligatoirement issues de familles riches de même que les incroyables] qui dansent en sabots avec leurs muscadins au bruit d’une vieille nasillarde. […] Je ne sais si ces premières danseuses chérissent beaucoup les formes républicaines des gouvernements de la Grèce ; mais elles ont modelé la forme de leur parure sur celle d’Aspasie ; les bras nus, le sein découvert, les pieds chaussés avec des sandales, les cheveux tournés en nattes autour de leurs têtes ; c’est devant des bustes antiques, que les coiffeurs à la mode achèvent leur ouvrage. […] cent tables offrent des arbres ployant sous les fruits de toutes les saisons, fruits en glace, tandis que des fontaines versent en abondance l’orgeat, la limonade, les liqueurs des îles […] Qui l’eût dit, en voyant ces salons resplendissant de lumières, et ces femmes aux pieds nus, dont tous les doigts étaient parés avec des diamants, que l’on sortait de la terreur ? […] Croira-t-on dans la postérité que des personnes dont les parents étaient morts sur l’échafaud, avaient institué, non des jours d’affliction solennelle et commune […] mais bien des jours de danses où il s’agissait de valser, de boire et de manger à coeur joie. Pour être admis au festin et à la danse, il fallait exhiber un certificat comme quoi l’on avait perdu un père, une mère, un mari, une femme, un frère ou une soeur sous le fer de la guillotine. La mort des collatéraux ne donnait pas le droit d’assister à une pareille fête. » Il s’agit là de ce qu’on appelle alors les « bals des victimes ». Il y a bien d’autres bals et pour tout le monde : les bals de printemps, d’été et d’hiver et toutes sortes de guinguettes dans tous les endroits de Paris : les plus connus étant peut-être sur les Champs-Elysées, sur les boulevards et le long des ports. Toutes les classes sociales (le riche comme le pauvre) ont leurs lieux à danser, mais le plus souvent se mélangent. On assiste à une certaine frénésie de la danse qui continue pendant tout le XIXe siècle. Et on danse merveilleusement bien ! Non seulement les professionnels de la danse mais aussi les amateurs exhibent leurs talents dans le grand monde avec une grâce et une perfection remarquables. « Et dans chacun de ces bals si renommés, il y a des salles de jeu, puis des buffets de rafraîchissements, des illuminations d’un côté, de l’autre des parties ombreuses, des demi-jours favorables ». Les bals de l’hôtel de Richelieu sont fameux et ont y trouvent merveilleuses, incroyables et muscadins : « bal de l’hôtel richelieu, qui rassemble un monde, un monde incomparable. C’est l’arche des robes transparentes, des chapeaux surchargés de dentelles, d’or, de diamants, de gaz, et des mentons embéguinés ! […] flottent dans des robes athéniennes, exercent et poursuivent tour à tour les regards de nos incroyables à cheveux ébouriffés, à souliers à la turque, et ressemblant d’une manière si frappante à cette piquante et neuve gravure qui porte leurs noms, que je ne saurais en vérité la regarder comme une caricature. […] Dans ce lieu enchanté cent déesses parfumées d’essences, couronnées de roses … » Après la danse, c’est le concert, puis les soupers. De nombreuses gravures représentent des incroyables, et beaucoup des merveilleuses en « costume de bal ». La danse est tellement populaire que l'on peut lire au début du chapitre intitulé « Éducation des jeunes Demoiselles » de Paris et ses Modes, ou les soirée parisiennes (Paris, Marc, 1803) : « Depuis trois ans, il s'est fait dans la manière d'élever les enfants, et surtout les jeunes demoiselles, un changement total … mademoiselle sait-elle danser ? Valse-t-elle ? Sont les premières questions que fait un homme qui se présente pour épouser. »

Photographie de gauche au dessus 7 : Chapitre intitulé « L'Orphée Français » de Paris et ses Modes, ou les soirées parisiennes (Paris, Marc, 1803).

Photographies du dessous 8 et 9 : Suite du chapitre « L'Orphée Français » de Paris et ses Modes, ou les soirées parisiennes (Paris, Marc, 1803) et début de « Concert de Cléry ». Au-dessous : suite de « Concert de Cléry ».ParisEtSesModes1803OrpheeFrancais2a-500lm.jpg
ParisEtSesModes1803OrpheeFrancais3-300lmPhotographies du dessous 10 et 11 : Chapitres intitulés « Élisée – Bourbon » et « Frascati » de Paris et ses Modes, ou les soirées parisiennes (Paris, Marc, 1803).
ParisEtSesModes1803ElyseeFracati500lmPhotographie de droite 12 : ParisEtSesModes1803Tivoli500lmChapitre intitulé « Tivoli » de Paris et ses Modes, ou les soirées parisiennes (Paris, Marc, 1803).

Dans Les Français peints par eux-mêmes (tomes édités entre 1840 et 1842), P.-F. Tissot (1768-1854), qui est le témoin de tout cela, décrit les incroyables de ses vingt ans : « On les rencontrait partout avec ce qu’ils appelaient des cadenettes, c’est-à-dire avec leurs cheveux nattés et relevés derrière la tête comme ceux des soldats suisses de la garde royale ; sur les deux côtés de leur figure descendaient des touffes de cheveux qui représentaient des oreilles de chien ; leurs cols étaient emprisonnés dans une cravate énorme qui, enveloppant le bas du visage et le menton, semblait cacher un goitre ; ajoutez à ce bizarre déguisement une espèce de sarreau de drap qui descendait le long du corps sans marquer la taille, et dont les larges manches permettaient à peine la vue de l’extrémité des doigts. Ces mêmes coryphées de la mode portaient à la main un bâton noueux et tortu, pour attaquer leurs adversaires lorsqu’ils croiraient l’occasion favorable. Tels étaient les chevaliers des plus brillantes femmes des salons de Paris la milice volontaire qu’on appelait la jeunesse dorée de Fréron, et qui faisait avec un  zèle gratuit et une vigilance passionnée la police de la capitale dans les spectacles , dans les jardins publics, sur les boulevards, contre les révolutionnaires désignés sous le nom de terroristes. » Louis-Sébastien Mercier les dépeint ainsi dans Le Nouveau Paris (1794) : « Les hommes portent l’habit carré, dont la taille est d’une longueur démesurée : les basques reviennent sur les genoux ; les culottes descendent jusqu’aux mollets ; les souliers à la pointe du pied, et minces comme une feuille de carton, la tête repose sur une cravate comme sur un coussin en forme de lavoir ; à d’autres, elle leur ensevelit le menton. Les cheveux sont, ou hérissés ou séparés sur le front : les faces pendantes voltiges derrière les oreilles ; par derrière ils sont nattés. Plus de manchettes ni de jabots : la manie du linge fin, comme la batiste, est universelle. Une aiguille d’or en forme d’étoile ou de papillon, indique la finesse et la blancheur de la chemise. L’individu costumé de la sorte, marche comme un Hercule, un bâton noueux à la main, et des lunettes sur le nez. »
Photographie montage du dessous : Incroyables et mirliflores du début du XIXe siècle provenant de diverses gravures.

incroyablesmontage© Article et photographies LM

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