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Beaux-arts et arts décoratifs au temps d'Auguste.

Doryphore500.jpgPhotographie de gauche : « Réplique du Doryphore de Polyclète. Époque de Tibère (14-37 après J.-C.). découvert à Pompéi. Marbre de Carrare. »

L’expositionVictoire300 Moi, Auguste, empereur de Rome, qui se déroule jusqu'au 13 juillet 2014 au Grand Palais (entrée Clémenceau) à Paris, est beaucoup mieux que le titre ne le suggère.

Tout d'abord dès l'entrée, une surprise de taille à laquelle je ne m'attendais pas … le fameux Doryphore (ou « Porte-lance »), cette statue de Polyclète sculptée vers 440 av. J.-C. Je ne savais pas que c'était elle que j'avais sous les yeux ; mais dès que je l'ai vue j'ai été époustouflé. Il ne s'agit pas de l'original en bronze qui est introuvable, mais d'un marbre de Carrare, de l'époque de l'empereur Tibère, de 14-37 après J.-C., découvert à Pompéi et conservé au musée archéologique de Naples : la meilleure copie antique connue à ce jour.  Polyclète donne à sa statue le nom de Canon qui est aussi celui du traité qu'il réalise sur l'art du sculpteur (Κανών / Kanốn, littéralement la « règle »). À travers elle il met en pratique sa théorie sur les proportions idéales du corps humain. Rien que pour elle, il faut voir l'exposition, et y emmener les enfants afin qu'ils contemplent de visu un chef d'oeuvre qui marque depuis plus de deux millénaires l'art occidental et fait éclore sa passion pour l'harmonie et la représentation, son souci de réalité et de sublime.

Photographie de droite : « Plaque Campana à décor de Victoire dans des rinceaux. Époque d'Auguste. Terre cuite. »

ApollonPhotographie de gauche : « Apollon citharède. Époque d'Auguste. Découvert à Rome, près de la maison d'Augustus sur le Palatin. Enduit peint. »

L'époque d'Auguste (63 av. J.-C. - 14 ap.), qui est le seul empereur à avoir encore aujourd'hui un mois de l'année qui porte son nom (août, august en anglais), est aussi celle de la pax romana (la paix romaine) et d'un épanouissement remarquable des arts et des lettres avec des figures comme Mécène (ami de l'empereur), Virgile, Horace, Ovide (cependant banni) etc.

Cette exposition donne une leçon sur les beaux arts et les arts décoratifs de l'époque. On y contemple de très belles et fines céramiques, du verre, du marbre, de la peinture, de l'orfèvrerie (avec par exemple une partie du trésor d'une ancienne villa de Boscoreale, près de Pompéi conservé au musée du Louvre), et bien sûr de magnifiques sculptures avec notamment certaines grecques ou d'inspiration.

Photographies du dessous : À gauche : « Oreste et Électre. Premier siècle après J.-C. Découvert à Pouzzoles (près de Naples), dans la zone du marché. Marbre. » Cette statue d'inspiration grecque représente l'homme nu et la femme dans une tunique, comme c'est très souvent le cas lorsqu'il s'agit de kouroi ou de corés (ou korê). Le drapé diaphane laisse parfois voir les formes de manière encore plus sensuelle comme l'exemple de droite : « Aphrodite, dite Charis du Palatin. Réplique romaine de la fin du premier siècle avant J.-C. Découverte sur le Palatin, devant le temple de Magna Mater. Marbre de Thasos. »

OresteElectreAphroditePhotographies de dessous : « Autel de la paix d'Auguste. 1 apr. J.-C. Marbre, H. 114 cm, L. 60 cm, prof 55 cm. Narbonne, Musée archéologique. Photo © Angelique Paitrault. »AutelDeLaPaix

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Esprit d'architecture et architecture de l'esprit.

LivresArchitecture100LivresdArchitecturePhotographies : Toutes les photographies de cet article proviennent du catalogue : Bibliothèque d'Architecture d'un Amateur, de Vitruve à Ledoux. © Alde. 

La maison parisienne Alde présente le jeudi 6 mars 2014 une vente aux enchères intitulée Bibliothèque d'Architecture d'un Amateur, de Vitruve à Ledoux. C'est une occasion de vous montrer quelques belles photographies provenant du catalogue et de vous parler rapidement d'architecture. 

J'aime beaucoup les belles architectures. Pour moi c'est la matérialisation de l'esprit. Marcher dedans c'est comme parcourir une âme. Une belle âme a une belle architecture dans laquelle flânent de belles personnes, des sensations, de la musique, du goût, des reflets changeants, brillants, colorés, des passions, des sentiments, des lumières pour certains, des pensées pour d'autres, des dieux et des déesses ou je ne sais … l'infini étant partout … tout y est possible … et si on le souhaite s'ordonne pour mieux communiquer, pouvoir y être à l'aise, comme dans un château. On y construit des murs avec des fenêtres et des portes donnant sur un merveilleux jardin et des paysages somptueux, où l'on se promène parfois, suivant l'humeur ... L'architecture humaine englobe l'être, comme l'esprit englobe l'architecture. Les jardins sont des architectures aussi, mais plus vivantes, faites des éléments et de la flore. Et puis la nature a son architecture.  

J'ai appris récemment que la cour d'appel a confirmé l'annulation de permis de construire du projet d'extension du musée Dobrée à Nantes. C'est sans doute dommage qu'il n'en ait pas été de même pour l’Hôtel Salé. Ce bâtiment parisien du XVIIème siècle abrite le Musée Picasso depuis 1985. Je passe devant en vélo chaque fois que je vais au travail et j'ai vu l'évolution des travaux qui ont commencé en septembre 2011 (normalement pour 20 mois) et qui devraient s'achever maintenant en juin 2014. Le but est de tripler la surface dédiée aux collections et à l’organisation d’expositions temporaires, c'est à dire de bétonner !! Un peu comme pour le Louvre. J'appelle cela de l''architecture RER'. On la retrouve partout : du béton plat et froid fait pour que les gens circulent sans arrêt. L'esprit du lieu se perd ainsi. Pourquoi ne pas faire du moderne ailleurs et restaurer et conserver les monuments anciens dans leur jus ? D'autres chantiers parisiens actuels sur des hôtels particuliers du XVIIe siècle sont inquiétants comme ceux de l'Hôtel Tubeuf (site Richelieu de la Bibliothèque nationale) ou de l'Hôtel Lambert, qui tous s'éternisent étrangement.

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Livre d architecture

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Palais618Photographies ci-dessous : « RAMELLI (A.). Le diverse et artificiose Machine... Paris, L’Auteur, 1588, in-folio de 354 ff. sign. » « Le plus beau livre de mécanique du XVIe siècle. Dédié à Henri II, ce livre fondamental pour la technologie offre un panorama d’instruments et de machines. Imprimé aux frais de l’auteur, il fit l’objet d’une traduction en allemand en 1620. » La machine de cette gravure fait penser à un ancêtre d'Internet ou de Gallica dans lesquels on peut feuilleter et lire plusieurs livres en même temps comme c'est le cas avec cette mécanique. © Alde.DellArtificioseMachine2-300

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Exposition : Soufflot, un architecte dans la lumière.

2. Jean Luc Paill CMN300Photographie du dessus : « Panthéon, façade occidentale vue depuis la mairie du Ve arrondissement. Soufflot, Jacques‐Germain (1713‐1780). © Jean‐Luc Paillé ‐ Centre des monuments nationaux. »

Soufflot 30x40 cmjn300Photographie de gauche : « Portrait de Jacques-Germain Soufflot par Louis-Michel Van Loo. Musée du Louvre. © RMN-Grand Palais - Christian Jean. »

Du 11 septembre au 24 novembre 2013 le Centre des monuments nationaux présente au Panthéon une exposition, intitulée Soufflot, un architecte dans la lumière, sur Jacques-Germain Soufflot (1713 - 1780) auteur de ce monument néoclassique devant abriter la châsse de Sainte Geneviève, puis après la Révolution dédié aux grands hommes et femmes de France.

M. Soufflot étudie à l'Académie de France à Rome de 1731 à 1738 notamment l'art de la construction et en particulier Les Quatre livres de l'architecture d'Andrea Palladio (1508 - 1580) de la Renaissance italienne.

En 1747 il présente un mémoire sur l'architecture gothique qui est un des plus grands mouvements de l'architecture occidentale. Pourtant depuis la Renaissance, le Gothique n'est plus du tout à la mode, et continue à ne pas l'être au XVIIIe siècle. Voir à ce sujet l'article Les modes gothiques et le style troubadour du XIXe siècle.

7. Caroline Rose CMN300Photographie de droite : « Intérieur du dôme, escalier conduisant au lanternon - Soufflot. © Caroline Rose / Centre des monuments nationaux. »

Il retourne en Italie en compagnie du frère de la marquise de Pompadour (maîtresse et amie du roi Louis XV) : Abel-François Poisson de Vandières (1727 - 1781), futur marquis de Marigny (à partir de 1754) et de Ménars, et directeur général des Bâtiments du roi (en 1751). Ce dernier est lui aussi versé dans les arts. Le premier peintre du roi, Charles Antoine Coypel, est chargé de l'éducation artistique du jeune homme qui très tôt prend des responsabilités dans ce domaine. Le futur marquis de Marigny doit sélectionner, avec l'aide du peintre, les tableaux des collections royales qui composent au palais du Luxembourg le premier musée de France. À 18 ans il obtient la survivance de la direction générale des Bâtiments, Arts, Jardins et Manufactures. C'est de 1749 à 1751 qu'il fait un séjour d'étude en Italie grâce à sa sœur, avec le graveur Charles Nicolas Cochin, le critique d’art abbé Leblanc et Jacques-Germain Soufflot. Ce voyage marque véritablement un renouveau du goût français (le retour au 'grand goût') et s'inscrit dans le mouvement néoclassique qui commence alors et perdure jusque vers 1830. C'est l'époque d'importantes fouilles archéologiques en Italie, à Herculanum et Pompéi, et d'une certaine Renaissance qui aboutit à la fin du siècle à la Révolution française toute emprunte de valeurs antiques.

11. Caroline Rose CMN300Photographie de gauche : « Panthéon, vue d'ensemble depuis le nord‐est. © Caroline Rose ‐ Centre des monuments nationaux. »

Le marquis de Marigny confie à M. Soufflot la construction de son hôtel particulier, le fait nommer contrôleur des bâtiments du Roi et admettre dans la première classe de l'Académie royale d'architecture de Paris en 1749, puis décorer chevalier de l'ordre de Saint-Michel et nommer directeur de la manufacture des Gobelins. Il l'installe au poste d'architecte de la nouvelle église Sainte-Geneviève, commencée en 1757, et appelée Panthéon après la fin de sa construction en 1790, à partir de 1791. Avec ce magnifique ouvrage qui trône au sommet de la prestigieuse colline Sainte-Geneviève, cœur du quartier intellectuel et étudiant de Paris, M. Souffot allie ses connaissances dans les architectures anciennes gothique et antiques, et plus nouvelles (pierre armée …).

ChapiteauxCorinthiens300Photographie de droite : « Péristyle, chapiteaux corinthiens. © Jean‐Pierre Delagarde ‐ Centre des monuments nationaux. »

C'est dans cet édifice que le Centre des monuments nationaux choisit de fêter le troisième centenaire de la naissance de Jacques-Germain Soufflot. Près de 150 œuvres sont présentées : peintures, sculptures, dessins, gravures, livres anciens, objets d’art, maquettes, provenant de grandes institutions françaises ainsi que de particuliers. L'exposition se termine par la maquette du chantier faite au XVIIIe siècle, et peut se poursuivre à travers une visite du Panthéon et notamment un parcours balisé conduisant à la crypte où se trouve la tombe de l'architecte où son corps repose depuis 1829.

Le Panthéon est un bâtiment remarquable. C'est de l'extérieur que je le trouve magnifique ; l'intérieur comprenant des peintures et sculptures des XIXe et XXe siècles qui jurent avec la grandeur et surtout la finesse du lieu. Sa silhouette de pierres, massive et élancée, et surtout son péristyle avec ses immenses colonnes et ses magnifiques chapiteaux corinthiens, sont un délice pour les yeux et pour l'âme.

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Musiques

HarpePhotographie : Harpe Erard (détails) © J.-M. Anglès - Cité de la musique.
La musique est un thème que j'affectionne tout particulièrement, puisqu'elle est aux fondements du rythme qui est le sujet de nombreux articles de ce blog.
Si le musée de la Cité de la Musique se trouve dans un lieu peu imprégné d'histoire contrairement à nombre d'autres musées parisiens, il n'en reste pas moins magistral de par le corpus qu'il rassemble : faisant se côtoyer, dans une mise en scène gracieuse et riche, de nombreux instruments de musique d'exception et quelques oeuvres d'art. Parcourir ce chemin d'objets dont les formes jouent un mouvement dans notre regard c'est  voyager à travers quatre siècles en suivant un air qui malgré les multiplicités d'instruments garde un fondement semblable : l'héritage fabuleux de la musique occidentale. Ce parcours chronologique nous fait voyager du XVIIe siècle au XXe en Occident et traverser les principales cultures musicales du monde. Quatre espaces témoignent chacun d'un siècle de l’histoire musicale occidentale et une double salle est dédiée aux musiques du monde.
ClavecinPhotographies : Clavecin de Ioannes Couchet (Anvers, 1652) © J.-M. Anglès - Cité de la musique. « D’une grande qualité d’exécution, cet instrument confirme l’attrait des clavecins flamands en France au début du XVIIIe siècle. Ravalé en 1701, il reçoit à cette occasion un nouveau décor de grotesques sur fond doré, appelé « à la Bérain » du nom du célèbre ornemaniste. Le piétement avec cariatides est un des rares originaux de l’époque de Louis XIV. L’ensemble compose un mobilier homogène élégant. »
ClavecinLa première étape du musée est consacrée au XVIIe siècle, depuis L'Orfeo de Monteverdi, premier opéra à nous être parvenu, jusqu'à la musique à la cour de Louis XIV. Un ensemble d’instruments reflète cette époque : un régale-bible, une contrebasse de viole, des cornets à bouquin, des cistres et luths, une remarquable collection d’instruments des célèbres luthiers Sellas, des claviers italiens, des guitares baroques, des violes de gambe et clavecins flamands et français, une flûte traversière en cristal, une flûte à bec , une contrebasse de 2 m de haut. Le tableau de Nattier La Leçon de musique apporte une illustration raffinée à ces objets d'art qui ne le sont pas moins, et qui nous emportent littéralement sur les notes qu'ils gardent en sommeil, comme c'est le cas pour les trois autres parties.

Photographie : ClavecinClavecin d'Antoine Vater (Paris, 1732) © J.-M. Anglès - Cité de la musique. « La rareté et l’état de conservation de ce clavecin sont exceptionnels. Cinq instruments seulement de ce facteur, d’origine allemande et membre de la corporation des facteurs de Paris, sont répertoriés. L’instrument nous est parvenu dans un état proche de celui d’origine avec une table d’harmonie aux couleurs préservées. »
La seconde section est dédiée au XVIIIe siècle. Comme on peut le lire sur le site : « Une sélection d’instruments originaux évoque le salon de La Pouplinière, mécène de Rameau pendant 20 ans : une délicate harpe ornée de chinoiseries, une cithare sur table appelée tympanon, une paire de cymbales frappées aux armes du Duc de Richelieu... Époque également marquée par un discours esthétique sur une nature idéalisée, dont Rousseau se fait le chantre, le XVIIIe siècle connaît une vogue éphémère pour les musiques pastorales, et ses musettes et vielles à roue jouées par d’aristocrates bergères. En parallèle, la pratique des concerts publics se répand et permet la diffusion de répertoires de compositeurs italiens, viennois et allemands. En 1778, le Concert spirituel accueille Mozart pour sa Symphonie en ré majeur dite « parisienne » au Palais des Tuileries, salle dont le Musée présente la maquette.  »
Piano Pleyel de ChopinPhotographie : Piano à queue de Chopin d'Ignace Pleyel (Paris, 1839) © J.-M. Anglès - Cité de la musique. « Au XIXe siècle, le piano symbolise l’aisance matérielle et la bonne éducation, témoignant de l’avènement de la bourgeoisie. La sonorité riche et puissante du piano, résultat d’innovations successives, offre des effets de nuances très contrastés répondant aux exigences de la musique romantique et plus particulièrement à une nouvelle forme de concert, le récital. Le public est fasciné par le musicien soliste : compositeurs et interprètes virtuoses, Franz Liszt, Sigismund Thalberg et Frédéric Chopin élaborent de nouvelles techniques de jeu sur lesquelles repose l’enseignement moderne du piano. Sensible à la douceur et l’intimité du son des pianos Pleyel, Chopin apprécie tout particulièrement la mécanique à simple échappement, à laquelle la firme restera fidèle jusqu’à la fin du siècle. »
Le « ... XIXe siècle est présenté dans le Musée sous ses multiples facettes. En réaction au classicisme et au règne de la raison du siècle précédent, le langage musical du XIXe siècle, influencé par les mouvements littéraires germaniques, témoigne d’un goût marqué pour l’expression des sentiments, Harpele mysticisme et le surnaturel. […] Une vitrine consacrée aux cinq violons du célèbre Stradivari [Antonio Giacomo Stradivari dit Stradivarius, né en 1644 à Crémone] que comptent les collections, et une dévolue à la symphonie Eroica de Beethoven, illustrent les deux formations dominantes au XIXe : le jeu soliste et la musique symphonique. Liszt et Chopin, dont le Musée possède des pianos sur lesquels ils ont joué, incarnent la figure du musicien romantique, virtuose et passionné, pour lequel les facteurs d’instruments rivalisent d’ingéniosité. Motivés par les besoins croissants de timbres et de puissance de l’orchestre, notamment celui de Berlioz, qui atteint des dimensions démesurées, de nouveaux instruments voient le jour. Si le plus spectaculaire du Musée est sans conteste l’octobasse de Vuillaume, immense contrebasse de 3m50, le plus célèbre reste le saxophone dont le Musée possède plusieurs pièces de l’atelier même de Sax.  »
Je ne vais pas trop m'étendre sur les autres pièces de ce musée mais plutôt présenter un antiquaire. Les antiquaires sont parfois des défricheurs qui retrouvent des objets à qui ils redonnent leur lustre, et dont certains parcourent les ventes aux enchères internationales. Le site de William Petit propose de nombreux instruments de qualité.
Photographie : Harpe de Sebastian Erard à la galerie William Petit.
A noter aussi le Musée des instruments de musique de Bruxelles.

© Article LM

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La planète du petit prince découverte ?

Un astéroïde prénommé TK7 a été découvert récemment. Sa circonvolution semble montrer qu'il est en orbite autour de quelque chose d'invisible. Comme on peut le lire dans Le Petit prince d'Antoine de Saint-Exupéry (1900-1944)  : « l'essentiel est invisible pour les yeux ».


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L’Horlogerie à Genève : Magie des métiers, trésors d’or et d’émail.

Montredepocheapendulumvers1700300Photographie 1 : « François Dentand, Genève. Montre de poche à pendulum, vers 1700. Écaille cloutée d'or, émail peint, laiton doré. © MAH, photo : M. Aeschimann . Inv. H 2008-137. » Exposition  L'horlogerie à Genève : Magie des métiers, trésor d'or et d'émail.
Pendant des siècles l'Europe excelle dans de nombreux arts ; comme celui de l'horlogerie dont les fabrications les plus fines sont des témoignages émouvants et précieux alliant les beaux arts, les nouvelles technologies issues des sciences et la philosophie dans une harmonie émouvante de beauté. Les arts de l'orfèvrerie, de la bijouterie, de l'horlogerie, des émaux, de la miniature, se mêlent avec bonheur dans ces petites pièces, véritables 'bijoux de poche'.
Montredepochedoublefacevers1770300J'ai déjà écrit un long article traitant d'un aspect de l'horlogerie au XVIIIe siècle intitulé Les mécanismes du temps, où je présente des cartels et un régulateur.
Voici quelques exemples de montres conservées au musée du Louvre : XVIe siècle : 1, 2, 3 (musée national de la Renaissance d'Ecouen) ; XVIIe siècle : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17 ; XVIIIe siècle : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11.
L'exposition L'horlogerie à Genève : Magie des métiers, trésors d’or et d’émail qui se déroule du 15 décembre 2011 au 29 avril 2012 au musée Rath de Genève, présente plus de mille œuvres du XVIe siècle à nos jours avec des pièces que le public peut admirer pour la première fois et des chefs-d'oeuvre où « la beauté s’allie à la haute précision et à la technicité ». Les montres, pendules, bijoux, émaux, miniatures, proviennent tous des collections d’horlogerie, d’émaillerie et de bijouterie du Musée d’art et d’histoire de Genève. Sont exposées des œuvres monumentales comme des pièces minuscules de quelques millimètres. « La constitution des collections étant intimement liée à l’activité industrielle et à la culture artistique genevoise, cette exposition entend également souligner le lien qui existe entre les œuvres et les métiers d’art. Elle évoque le rôle des ateliers comme lieux de création et souligne l’actualité d’une tradition horlogère, ininterrompue à Genève depuis cinq siècles. À ce titre, de prestigieuses maisons seront ponctuellement présentes durant l’exposition avec leurs propres collections historiques et des démonstrations dans les domaines de l’horlogerie, de l’émaillerie et de la bijouterie. » « Le Musée d’art et d’histoire conserve 20 000 pièces liées au savoir-faire local et international de l’horlogerie, de la bijouterie, de l’émaillerie et de la miniature. »
Photographie 2 : « Louis Duchêne & Cie, Genève. Montre de poche double-face, vers 1770. Or, diamants. © MAH, photo : M. Aeschimann. Inv. H 2008-136. »
Photographie 3 : « Christ Moricand, Genève. Étui avec montre, vers 1790. Serpentine, or repoussé et ciselé. © MAH, photo : M. Aeschimann. Inv. H 2008-135. »

Etuiavecmontrevers1790a300© Article LM

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Au lit au Moyen Âge

dame recevant ds sa chambredetail442Photographies dame recevant ds sa chambredetail3001 et 2 : 'Dame recevant depuis sa chambre'. Illustration de Histoire de Renaut de Montauban, Flandre, XVe s. Paris, © Bibliothèque de l'Arsenal, manuscrit n° 5072 Res., folio 202 verso.
Jusqu'au XVIIIe siècle le lit est un lieu de 'sociabilité' important. Durant l'Antiquité on y dort, se repose, banquette, mange, boit, discute … D'importants dialogues de Platon se font sur des lits. On continue de recevoir couché jusqu'au XVIIe siècle. J'en parle dans mon article sur Les Précieuses et les femmes de lettres. La ruelle, c'est à dire la petit rue qui longe le lit, est un lieu d'apprentissage du dialogue antique que la philosophie courtoise poursuit. C'est là que les fondements du 'savoir vivre' sont initiés. De la ruelle on passe au XVIIIe siècle à la table de toilette et de celle-ci au monde … au 'grand monde' comme on le dit entre autres au XIXe. Entre l'Antiquité et le siècle des Lumières il y a le Moyen âge où le lit occupe une place tout aussi importante. La première photographie semble accréditer le fait que les dames reçoivent dans leur chambre : dans la ruelle, bien avant le XVIIe siècle. Du reste le lit (en particulier le lit de jour) se prête tout à fait à cela. Il s'agit d'une pratique issue de l'Antiquité qui n'est pas propre à l'Occident mais aussi à l'Extrême Orient (voir les représentations du Bouddha Shakyamuni couché). Dans la photographie suivante c'est le roi qui réceptionne dans sa ruelle dans un lit qui est sans doute un meuble d'apparat et l'ancêtre du 'lit de jour'.
lit charlesVI300Photographie 3 : Illustration de Dialogues de Pierre Salmon et Charles VI. France, début du XVe s. Paris, © BnF, manuscrit français n° 23279, folio 19. Ici le roi Charles VI reçoit couché. A noter les poulaines (chaussures à bouts pointus) de celui-ci (les protagonistes de la première photographie en portent aussi mais un peu moins longues et pas décorées comme ici), son habit noir brodé aux fils d'or de textes et figures, ainsi que les chapeaux 'en turban' qui sont à la mode à cette époque.
L'exposition Au lit au Moyen Âge, qui se déroule jusqu'au13 novembre 2011 à Paris dans la Tour médiévale de Jean sans Peur, nous offre à l'aide d'un parcours photographique quelques informations sur sa fonction. On peut ainsi y lire : « Au XVe siècle, les grands procès sont jugés par le roi dans un lit de justice, espace surélevé à l’intérieur d’une clôture. Son trône est surmonté d’un dais et entouré de tentures, à l’image d’un lit, d’où le terme de lit de justice. C’est également allongés sur un lit que les grands donnent audience à leurs proches et alliés, astreints à demeurer debout. Paradoxalement, être couché est le signe d’un statut supérieur. Dans la chambre de parement, pièce destinée aux fonctions officielles, un lit d’apparat est dressé. Ce meuble de prestige est exposé aux yeux des visiteurs, sans qu’il en soit fait usage. Dans les cours royales et princières, il est de dimensions extravagantes, comme en témoigne la description d’une couverture de fourrure appartenant au roi Charles V (1364-1380) et dépassant les 38 m2 ! » Souvent on naît et on meurt dans le même lit. « Les défunts sont inhumés cousus dans leur linceul, à savoir le drap de leur lit, puis couchés dans la terre jusqu’à la consommation des temps. Le christianisme médiéval veut que les chrétiens soient enterrés ApparitionDameNature300acouchés sur le dos, face tournée vers le ciel. L’assimilation entre le sommeil et la mort est profonde : la tête du défunt est posée sur un oreiller.  » Le lit est donc un lieu de passage à la vie, à la mort, au rêve, au réveil, à l'autre. C'est un endroit particulièrement propice à la féérie, au plaisir, à la convalescence et au repos, ainsi qu'un endroit protecteur dans lequel on est au chaud ...  C'est donc tout un monde.
Photographie 4 : 'Un beau rêve : Dame Nature et ses oiseaux'. Livre des échecs amoureux, France, fin du XVe siècle, Paris, © BnF, manuscrit français n° 9197, folio 13. Voici ce que dit la Bibliothèque nationale de France au sujet de cet ouvrage : « Composé en prose par Évrart de Conty vers 1400, le Livre des échecs amoureux se présente comme le commentaire d'un poème allégorique inspiré du Roman de la Rose. Utilisant la symbolique des dieux antiques et du jeu d'échecs, Évrart de Conty relate le parcours initiatique d'un jeune prince, "l'Acteur", et traite ainsi "des mœurs et du gouvernement de la vie humaine". Au terme de sa quête, l'Acteur rencontre une jeune demoiselle avec laquelle il prend place autour de l'échiquier symbolique. À chacun des partenaires sont attribuées des pièces représentant autant de qualités ou de comportements relatifs à l'amour courtois. Chef-d'œuvre de l'enluminure flamande du XVe siècle, ce manuscrit comprend vingt-quatre peintures, œuvre du Maître d'Antoine Rollin. » Douze sont visibles ici et les autres ici.
Quelques lits : grecs 1, 2 et 3 ;  d'amour charnel durant l'antiquité ; au XVe siècle 1, 2, 3 (à noter la coiffure) et 4 ; de naissance ; d'une chambre de Louis XIV ; d'une chambre ou d'un boudoir du XVIIIe siècle ; de plaisir au XVIIIe siècle ; à l'antique en 1800 ; du XIXe siècle. Pour les différents modèles de lits voir proantic.com.
Photographie 5 : 'Un lit de parade géant'. Vie et miracles de monseigneur Saint Louis, France,  1480, Paris, BnF, ms. français 2829, folio 3 représentant l’auteur remettant son ouvrage au cardinal de Bourbon.

lit apparat300© Article LM

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Le temple du goût et la chercheuse d'esprit.

lachercheusedespritacteur300llachercheusedesprittitre300llIl a déjà été fait mention dans des articles de ce blog aux notions de goût et d'esprit :
Académies - Avoir de l'esprit ; Le bon goût ; Sur Le bon ton & le bon genre . Ce sont des éléments majeurs de la vie sociale et culturelle française des XVII et XVIIIe siècles.
Photographies : La Chercheuse d'Esprit, Opéra Comique. " De Monsieur Favart. Représenté pour la première fois, le [?] Février 1741. Avec le Compliment prononcé à la clôture du Théâtre, & les Airs notés. Le prix est de vingt-quatre sols. A Paris, Chez la Veuve Allouel, au milieu du Quay de Gêvres, à la Croix Blanche. 1741. Avec Approbation & Privilège du Roi. - Paris. Veuve Allouel. 1741. " On peut lire la pièce ici.
Dans cette oeuvre de Charles-Simon Favart (1710-1792), Monsieur Subtil veut se marier avec Nicette une jeune fille que sa mère (Mme Madré) dit être sans esprit. Nicette part donc en quête d'esprit. Elle trouve M. Narquois qui se vente d'avoir été obligé de quitter Paris parce qu'en ayant trop. Il lui demande : « … mais de quel espèce d'esprit voulez-vous, car il y en a de plusieurs sortes ? - NICETTE. Dame, je veux du meilleur. - M. NARQUOIS. De cet esprit, chef d'oeuvre de l'art, brillanté par l'imagination, et rectifié par le bon sens ? » M. Narquois ne pouvant rien pour elle, elle rencontre M. L'Éveillé qui se sert de son esprit pour duper. Il commence par lui faire des avances mais sa future femme arrive. Elle suggère à Nicette d'aller chercher de l'esprit ailleurs : auprès d'Alain, le fils de M. Narquois, aussi benêt qu'elle, et que la mère de Nicette souhaite épouser. Les deux jeunes personnes trouvent ainsi l'amour en cherchant à avoir de  l'esprit. Les parents ayant peur qu'ils en aient davantage décident de les marier.
lachercheusedespritpartition3decoupe400l« FINETTE.
Chaque esprit a bien son usage ;
L'esprit fin est un séducteur
L'esprit savant a pour partage
Souvent moins de bien que d'honneur,
L'esprit brillant fait grand tapage ;
Mais l'esprit doux va droit au coeur. »
Dans son ouvrage intitulé Le Temple du Goût, M. de Voltaire (1694-1778) dépeint une promenade avec des amis vers l'édifice où se trouve le dieu du Goût. Sur un ton badin il y décrit les rencontres qu'il y fait ou pas de tous les prétendants à y être. Sa critique touche aussi bien certains de ses contemporains que des auteurs et artistes plus anciens, en particulier du siècle qui le précède : le XVIIe français qui définit le goût avec passion notamment à travers sa langue, son art et sa littérature. Voltaire décrit ce temple :
« Simple en était la noble architecture;
Chaque ornement, à sa place arrêté,
Y semblait mis par la nécessité:
L'art s'y cachait sous l'air de la nature
L'oeil satisfait embrassait sa structure,
Jamais surpris, et toujours enchanté. »
En son temps, M. de Voltaire est un des représentants de ce goût du XVIIIe siècle français. La vision qu'il en a est donc intéressante. Elle se démarque de celle de Jean-Jacques Rousseau ou d'autres auteurs qui, au XVIIe siècle, donnent pourtant à l'art et à la langue de France toute leur virtuosité … Cet ouvrage se termine par ces mots du dieu du Goût :
« Adieu, mes plus chers favoris:
Comblés des faveurs du Parnasse,
Ne souffrez pas que dans Paris
Mon rival usurpe ma place.
Je sais qu'à vos yeux éclairés
Le faux goût tremble de paraître;
Si jamais vous le rencontrez,
Il est aisé de le connaître:
Toujours accablé d'ornements,
Composant sa voix, son visage,
Affecté dans ses agréments,
Et précieux dans son langage,
Il prend mon nom, mon étendard;
Mais on voit assez l'imposture,
Car il n'est que le fils de l'art;
Moi, je le suis de la nature. »
letempledugouttitretransparent300lCette idée du goût développée par M. Voltaire s'inscrit dans celle des Lumières qui trouve sa science dans la nature même et non pas dans l'artifice de l'art. Cette nouvelle optique du parti philosophique, dont les encyclopédistes sont des représentants, basée sur la connaissance concrète, façonne jusqu'à aujourd'hui le 'goût' qui s'appuie essentiellement sur les sciences et la logique : de l'observation de la nature, laissant peu de place à la rêverie et à la fantaisie, annonçant une aire 'pragmatique' et bourgeoise qui en refusant l'ignorance n'a fait que mettre en valeur la sienne propre.
Le texte de Voltaire est visible ici ou ici.  Il a donné lieu à des comédies ayant le même titre jouées dès la même année, comme celle-ci.
Dernière photographie : Le Temple du Goût, Comédie. " A La Haye, par la Compagnie. 1733. " Il s'agit d'une parodie de l'ouvrage de Voltaire du même nom, où le protagoniste se rend au temple du goût. Avant d'y arriver il est confronté aux faux goûts. Dans le temple sont représentés les écrivains, peintres musiciens et autres artistes étant dignes selon l'auteur d'être placés dans cet édifice. Dans l'avertissement de l'édition de Beuchot, on peut lire au sujet de cette comédie : « Voltaire, dans sa lettre à Thieriot, du 9 février 1736, attribue cette comédie à Delaunay; mais elle est de l'abbé d'Allainval. Quoique portant l'adresse de la Haye, elle avait été imprimée à Mantes, chez Tellier, qui, quelques années auparavant, avait été condamné au carcan par coutumace, pour avoir imprimé les Nouvelles ecclésiastiques. Lorsqu'il eut obtenu sa grâce, les jésuites lui firent imprimer la comédie antijanséniste intitulée la Femme docteur, afin, lui dirent-ils, de réparer le mal qu'il avait fait par l'impression des Nouvelles ecclésiastiques. Dans la comédie de d'Allainval, Voltaire figure sous le nom de Momus; un personnage appelé Kafener est évidemment Falkener, à qui est dédiée Zaïre; voyez tome Ier, du Théâtre. Beaucoup d'épigrammes furent lancées contre le Temple du Goût. Boindin, qui se reconnut dans Bardus ou Bardou, avait aussi fait une comédie qu'il intitula Polichinelle sur le Parnasse, et qu'il lut en plein café …. »

© Article LM

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Dessins anciens

DessinStJeanBaptiste300Le 26 novembre prochain, la maison Tajan présente des dessins anciens à la vente à Paris (catalogue ici).
Photographie 1 : « Ecole française du XVIIIe siècle. Saint Jean-Baptiste. Gouache sur vélin. 11 x 16 cm ».
Photographie 2 : « Charles Nicolas COCHIN (Paris 1715 – 1790). Allégorie de l'astronomie. Crayon noir. 6,5 x 12 cm. Signé et daté en bas à droite de " 1740 ". Dessin préparatoire à la vignette " La Géométrie assise à une table de travail, avec trois amours lisant ", du livre de l'Abbé Deider, « Le calcul différentiel et le calcul intégral » (voir l'Abbé Deider, " Le calcul différentiel et le calcul intégral " Paris, Jombert, 1740, in-4°, Livre I, p.I) ».CochinGeometrie400

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Académies - Avoir de l'esprit.

wuietPhotographie 1 : Gravure de la fin du XVIIIe siècle : « Mlle Caroline Wuïet Pensionnaire de la Reine, et Membre décoré de l’Académie des Arcades. » Composé par Muncian d’après le portrait de Mr. de Romany [sans doute François Antoine Romany - vers 1756 - 1839]. Gravé par Vangelisty (graveur de la fin du XVIIIe siècle et début XIXe). Dimensions : 26,2 x 21,9 cm. Caroline Wuiet baronne d'Auffdiener (I766-I835) est née en France. Romancière et compositeur elle a écrit par exemple : Esope au bal de l’opéra ou Tout Paris en miniature (1802). L'Académie des arcades ou plutôt des arcadiens, est une société littéraire fondée à Rome par Christine de Suède en 1690. Chaque membre y prend le nom d'un berger d'Arcadie, comme Mme Duplessy qui est agréée en qualité de pastourelle, sous le vocable de Bérénice, et reçoit à titre d'apanage la province d'Argolide.
'Avoir de l'esprit' est une notion primordiale de la courtoisie et de la galanterie française. Enfin surtout avant le XXe siècle. On trouve encore des traces de cela dans l'humour anglais dénué cependant de toute sensualité si ce n'est celle du plaisir qu'il procure. Avant de devenir tel qu'il est aujourd'hui, c'est à dire la plupart du temps très gras, l'humour français est tout aussi fin bien que différent. Avant le XIXe siècle, en France, avoir de l'esprit est une chose primordiale pour toute personne de qualité. Il existe un véritable 'esprit français' teinté de galanterie, de plaisir et de finesse présent particulièrement dans les cercles et autres ruelles du XVIIIe et des siècles précédents, mais aussi ailleurs. Cet 'esprit' s'exprime aussi à travers les académies. Les écrits de Platon qui est à l'origine de la première académie, sont pleins de celui-ci. Nombreux sont les subtils et plaisants traits d'humour qu'on peut y lire …
Depuis l’Académie de Platon, fondée à Athènes en 387 avant J.-C., de nombreuses autres académies se sont formées, en particulier à l’époque moderne à partir de la Renaissance.
voiture300Photographie 2 : « Vincent Voiture de l'Académie française né à Amiens et mort à Paris dans un âge fort avancé. Gravé par E. Desrochers [Etienne-Jehandier Desrochers (1668-1741)] à Paris chez Daumont rue St. Martin. En prose ainsi qu'en Poésie D'un Style délicat et fin ; Dans ses écrits Voiture allie Le tendre et le galant, le Simple et le badin. » Il est intéressant de noter que celui-ci n'a rien publié de son vivant alors que sa notoriété de poète auprès de ses contemporains est considérable. Il est un fait que l'esprit est une chose bien vivante qui peut très bien se passer de l'écrit ; même si celui-ci permet une transmission partielle à travers les âges.
Lorsque le cardinal de Richelieu fonde l'Académie française en 1635, c'est en s'inspirant des cercles des précieuses qui discutent sur les termes de la langue française. Mais  les femmes n'y sont pas admises (ce qui est injuste lorsque l'on sait leur travail pour en faire ce qu'elle est aujourd'hui) ; et ce sont de nombreux habitués de leurs lumières qui sont parmi les premiers représentants de l'Académie française, comme Vincent Voiture (1597-1648), Jean-Louis Guez de Balzac (1597-1654), Jean Desmarets de Saint-Sorlin (1595-1676), Jean Ogier de Gombauld (1576-1666), Claude Malleville(1597-1647), Antoine Godeau (1605-1672), Philippe Habert (1605-1637), François Maynard (1582-1646), François de Cauvigny sieur de Colomby (1588-1648), Marc-Antoine Girard sieur de Saint-Amant (1594-1661), Claude Favre de Vaugelas (1585-1650), et sans doute d'autres.
Gilles Ménage (1613-1692), plus jeune que Vincent Voiture, est aussi un habitué des précieuses. Molière s'est inspiré de lui pour écrire le personnage de  Vadius de sa pièce Les Précieuses ridicules. Malgré ses entrées dans ce monde galant et des écrits comme son Dictionnaire étymologique ou Origines de la langue française,  il n'est jamais élu membre de l'Académie française.
menage300Photographie 3 : « Gilles Menage Poète et grammairien français de l'académie de Crusca établie à Florence né à Angers l'an 1613 mort à Paris l'an 1692 âgé de 79 ans. E. Desrochers fecit et excudit rue du foin près de la rue St-. Jacques à Paris. Soit injustice soit envie Menage dans l'académie Ne put jamais être reçu Mais ses ouvrages font connaître Que jamais homme n'a mieux su Ce qu'il faut Savoir pour en être. »
Pour finir voici un extrait du chapitre intitulé 'De la Mode' des Caractères de Jean de La Bruyère (1645-1696) élu à l'Académie française en 1693, dans lequel il est question de l'esprit fin de Vincent Voiture et de Jean-François Sarrasin (1614-1654) ami de Gilles Ménage : « Voiture et Sarrazin étaient nés pour leur siècle, et ils ont paru dans un temps où il semble qu'ils étaient attendus. S'ils s'étaient moins pressés de venir, ils arrivaient trop tard ; et j'ose douter qu'ils fussent tels aujourd'hui qu'ils ont été alors. Les conversations légères, les cercles, la fine plaisanterie, les lettres enjouées et familières, les petites parties où l'on était admis seulement avec de l'esprit, tout a disparu. Et qu'on ne dise point qu'ils les feraient revivre : ce que je puis faire en faveur de leur esprit est de convenir que peut-être ils excelleraient dans un autre genre ; mais les femmes sont, de nos jours, ou dévotes, ou coquettes, ou joueuses ou ambitieuses, quelques-unes même tout cela à la fois : le goût de la faveur, le jeu, les galants, les directeurs, ont pris la place, et la défendent contre les gens d'esprit. »

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Civilité

suitedelacivilitefrancaiseelementsdepolitesseC'est le deuxième article que j'écris sur la civilité (voir le précédent ici). De nombreux livres sont édités sur ce sujet en particulier du XVIIe siècle au XIXe. Les 24 et 25 septembre 2010, à Nantes, le commissaire priseur Philippe Kaczorowski propose à la vente quelques ouvrages sur ce sujet (voir catalogue ici) ; avec en particulier : le Nouveau Traité de la Civilité qui se pratique en France parmi les honnêtes gens (que je décris dans l'article précité), suivi de Suite de la civilité française, ou traité du Point d’Honneur, et des règles pour converser & se conduire sagement avec les Incivils & les Fâcheux (photographie de gauche), d'Antoine de Courtin, dont les deux volumes in-12 datent de 1679 et 1680 ; et celui intitulé Éléments de Politesse et de Bienséance, ou la Civilité qui se pratique parmi les honnêtes gens. Avec un nouveau traité sur l’Art de plaire dans la Conversation, de Mr Prévost, datant de 1784 (photographie de droite).

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La civilité

educationau18esieclejeunefille240.jpgalmanachallemeandXVIIIelareverencerecadre300Photographie 1 : Détail d'une estampe intitulée « L'instruction » [texte en allemand et en français] d'un almanach allemand de l'année 1779. Photographie 3 : feuille complète. Photographie 2 : Gravure avec pour titre 'La révérence', du même almanach, présentant un homme dans une posture ressemblant tout à fait à la figure du Petit-maître en Chenille décrite dans l'article du 16 mars 2009. Il est donc fort probable que cette attitude découle de la révérence.

Comme je l'ai dit dans un précédent article, Charles Duclos (1704-1772) écrit que le français est le plus sociable des hommes. De là vient son goût pour la mode, le bon ton, la politesse, l’éducation, le savoir-vivre … Antoine de Courtin (1622-1685) publie en 1671 un Nouveau traité de la civilité qui se pratique en France parmi les honnêtes gens. Il écrit que la civilité « n’est que la modestie et l’honnêteté que chacun doit garder dans ses paroles & ses actions. » almanachallemandeducationau18esieclecalendrier300-copie-1Il commence par expliquer qu’elle doit venir de l’intérieur, puis formule différentes règles de langage, de maintien, de propreté, de politesse, d’usages (à table, au bal …), d’hospitalité, d’écriture, de bienséance … Le but est de ne pas déplaire et de plaire non seulement aux yeux du corps mais aussi à ceux de l’âme ; d’être naturel, modeste, faire des présents, avoir de l’hospitalité, de la contenance, de l’humilité et de la bienséance, d’être propre et à la mode, d’estimer les autres plus que soi-même, d’être mesuré, respectueux, d’avoir du discernement, de la bonne humeur. Le livre finit par ces mots : « Il est donc certain que l’usage pourra polir, abolir & changer peut-être une partie des règles que nous donnons ; mais néanmoins comme la civilité vient essentiellement de la modestie, & la modestie de l’humilité, qui est le souverain degré de la charité, & qui comme les autres est appuyée sur des principes inébranlables : c’est une vérité constante, que quand même l’usage changerait, la civilité ne changerait pas dans le fond ; & que l’on sera toujours civil, turcaretdujour3000.jpgquand on sera modeste, quand on sera humble ; & toujours humble, quand on aura la charité chrétienne, qui nous porte à obliger tous ceux que nous pouvons, même contre nos propres intérêts. » Pour finir voici une définition de la civilité que j'apprécie tout particulièrement et qui est tirée du même ouvrage : « d’après les anciens », la civilité est « une science qui enseigne à placer en son véritable lieu ce que nous avons à faire ou à dire ».

Photographie 4 : Gravure n°2 tirée de Manières et Modes, avec pour légende : « Turcaret du Jour prenant une leçon de tournure. » C'est en 1709 qu'Alain-René Lesage (1668-1747) publie la pièce de théâtre intitulée Turcaret. Cette satire des milieux financiers fait scandale à sa parution. Elle dépeint notamment le personnage de 'Turcaret', financier parvenu dépourvu d'éducation. L'image ici date de la toute fin du XVIIIe siècle ou du début du XIXe, et présente un de ces financiers cherchant à acquérir du style. Les deux personnages représentés sont à la mode à cette époque, mais la tenue d'incroyable du petit Turcaret accentue son ridicule.

Photographie 5 : Dans La Comédie de notre temps (1874-1876), Bertall (1820-1882) occupe tout un chapitre à « La civilité » qui commence par cette vignette.civilitel300.jpg

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Paris sous la neige

171209jardinsenatfontaine4300Il a neigé aujourd'hui toute la journée sur Paris.
J'ai pris cette photographie dans le jardin du lieu où je travaille.

J'EN PROFITE POUR VOUS SOUHAITER A TOUS DE TRES BONNES FETES !

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Le bon goût


Photographies : "Le Triomphe du Goût."

Trois gravures de 1767, d’après Charles Nicolas Cochin le Fils (1715-1790) gravées par Nicolas De Launay (1739-1792), avec : "Le Goût gémit sous les lois de la Folie." "Le Goût commence à s’affranchir des liens de la Sottise." "Le Triomphe du Goût."


Avoir du goût est une notion importante de la culture française. Le bon goût est considéré comme plus ‘élevé’ que le bon sens comme l’indique cette définition du XVIIIe siècle du Dictionnaire critique de la langue française de J.-F. Féraud datant de 1787-1788 : "On borne la sphère du bon sens, aux choses plus sensibles, et le bon goût à des objets plus fins et plus relevés. Encycl. Entre le bon sens et le bon goût, dit La Bruyère, il y a la différence de la cause à l'effet. — La distinction de l'Encyclopédiste est plus juste." Il s’agit d’un principe primordial de l’élégance française. La finesse, l’esprit, sont des marques du bon goût.

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Les mécanismes du temps.

Les arts décoratifs et les sciences du XVIIIe siècle sont florissants. Les objets mesurant le temps sont parmi ceux qui synthétisent le mieux le mariage de ces deux éléments en une harmonie qui redouble la beauté de ces oeuvres. Il en résulte la plupart du temps une grâce où les contraires s'assemblent et se fondent. Les formes sinueuses du XVIIIe siècle s'insinuent dans la finesse des mécanismes. Les volutes rocailles imaginaires soutiennent le parfait agencement du fonctionnement industrieux. La raison scientifique rejoint l'âme créatrice ; la connaissance retrouve l'imaginaire. Le rythme des rouages s'écoule au fil de l'art. L'horloge embrasse l'espace sur sa mesure en un flottement musical cadencé ; elle le condense en une marche calquée sur l'univers, ou plutôt sur la danse de la terre parmi les étoiles. Les anciens disent que l'art est une imitation ... la montre imite le temps ; le montre, et place au milieu de ce gigantesque mouvement l'homme qui semble pouvoir le tenir dans sa main. Certaines montres du XVIIIe siècle et d'avant sont des objets d'une extrême finesse. Le Louvre en expose parfois des exemples magnifiques, des condensés de beauté, des gouttes de vie cristallisée dans son rythme.

La galerie Wanecq (www.wanecq.com) propose les cartels de la photographie ci-dessus. Les deux premiers possèdent un socle. L'un est d'époque Régence (1715-1723), en marqueterie de bronze et d'écaille. Le second est d'époque Louis XV (qui règne jusqu'en 1774). Il est de « forme violonée », « marqueté en contrepartie de motifs de branchages fleuris en corne teintée verte, rouge, bleue et en étain ». L'ornementation est de bronze ciselé et doré, avec au sommet un cartouche feuillagé sur une petite terrasse rocaille ajourée. Les épaulements sont agrémentés de rinceaux ainsi que les pieds et le socle. La porte est décorée d'une applique à motif de branchages sur fond de chicorée. Le cadran émaillé est de Patris à Bruxelles. Quelques détails de cet objet sont présentés dans la photographie de fin d'article. Les deux autres sont du même auteur : Jean-Joseph de Saint-Germain (1719-1791) dont la passion pour la botanique se retrouve sur ces exemples. L'un est en bronze « ciselé et doré de forme mouvementée à décor d’agrafes feuillagées, de lys, tournesols et roses. » Le tournesol symbolise l'astre solaire, la rose l'amour et le lys la pureté et la royauté. Il a un cadran émaillé avec des chiffres romains pour les heures, arabes pour les minutes, et des aiguilles en bronze doré, comme pour l'autre cartel d'époque Louis XV. Ce dernier est en bronze ciselé et doré, de style rocaille avec un décor de rinceaux feuillus portant des fruits, avec sur la partie basse un cartouche.

Si le temps passe, il est difficile pour l'homme d'en avoir une notion précise sans recourir à des instruments. Le petit-canon du Palais-Royal est une de ces références, car il tonne tous les jours à midi précise jusqu'en 1911. On peut y lire l'inscription : « horas non numero nisi serenas » (« Je ne compte que les heures heureuses »). C'est en 1786 que l'horloger Sieur Rousseau l'offre au jardin. Les jours de soleil, une loupe est censée allumer la mèche. Alfred De Musset (1810-1857) écrit dans un article du journal Le Temps du 27 octobre 1830 : « les provinces ! Qui se règlent toujours sur Paris avec plus d'exactitude que la montre d'un pédant sur le canon du palais-royal ». Une autre manière d'ajuster sa montre est de le faire à partir d'un régulateur : une horloge de référence dont le mécanisme est précis sur plusieurs jours. Il s'agit généralement d'une horloge de parquet, plus au moins d'une hauteur d'homme, avec un corps (le cabinet) en bois et un mécanisme à poids avec un balancier battant la seconde. On en trouve chez les horlogers et les grandes maisons aristocratiques et bourgeoises. Elle est souvent finement ouvragée comme dans l'exemple de la photographie qui appartient à la galerie Wanecq. Ce régulateur de parquet est d'époque Louis XV (circa 1755) en « placage de satiné dans des encadrements d’amarante et des filets de bois de rose. » La boîte, de « forme violonée sur plinthe », est ornée de bronzes rocailles fleuris dans leur dorure d’origine. Le mouvement entraîne un mécanisme sur huit jours. Le cadran est un disque de métal sur fond de bronze doré guilloché, avec des chiffres arabes pour les minutes, des chiffres romains pour les heures, des aiguilles pour les heures, les minutes, et une trotteuse en acier bleu. « L’échappement à chevilles de type Lepaute » marque « les heures et les demi-heures sur timbre ». Cadran et platine sont signés 'Ageron, Paris'. L'estampille 'B. Lieutaud' est inscrite derrière la tête du régulateur et en bas de la caisse. »

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Pot-pourri : Les lapalissades, la magie, les putti, les "Rôles" des Compagnons, Charles Nicolas Cochin …

Dans plusieurs traditions, les œuvres poétiques sont appelées des ‘fleurs’. Voici plusieurs fleurs mélangées et fermentées assemblées en un pot-pourri qui espérons-le offrira à votre âme une agréable odeur. 

Certaines lapalissades contiennent des vérités : comme dire que ce qui est petit n'est pas obligatoirement le moins grand, ou que ce qui est peu impressionnant n'est pas toujours le moins influent ... Il existe un enseignement tibétain très élaboré (avec de nombreux développements et commentaires) constitué à partir de quelques lignes de poésie. On ne mesure pas toujours le côté ‘anecdotique’ de certains faits influençant durablement la culture. Même le terme de ‘lapilassade’ vient d’une erreur de lecture (voir Wikipedia). Dans un prochain article, nous donnerons l’exemple des contes de fées d’abord publiés d’une façon très discrète et toujours dans des petits formats. Pourtant ils influencent tout un imaginaire occidental. Mais tout cela arrive-t-il vraiment par hasard ? Derrière ‘l’anecdote’ se cache souvent un contexte qui n’attend qu’à s’exprimer. Les choses simples recèlent parfois de grandes vérités. Il suffit de regarder autour de soi. Le Mystère est partout … Il est nécessaire parfois de garder sur le monde une vision douce : re-garder, d’avoir conscience que nous n’appréhendons qu’une toute petite partie de la réalité. Il y a de la relativité dans ce que nous disons ou faisons, ce que nous sommes ; mais aussi de la magie qui nous accompagne tout le temps. Dans l’iconographie des beaux-arts, le putto représente un peu cela. On met en scène cet enfant en train de faire doctement des activités sérieuses d’adulte. Son origine est antique et nous a été transmise par l’Italie. Dès le XVe siècle, ce pays est le modèle de l’Europe et en particulier de la France. Artistes et artisans italiens sont appelés et accueillis, puis imités. Ils apportent avec eux l’usage d’inclure dans nombre de leurs productions des iconographies d’enfants batifolant en se consacrant à différentes occupations qui gardent le nom italien de ‘putti’ (‘putto’ au singulier). Le XVIIIe siècle français en inclut partout. Ils sont plus ou moins indirectement associés à cupidon (Eros) bien que ne portant pas d’ailes.  On les représente parfois appliqués à des tâches humaines « sérieuses », mettant celles-ci en perspective et rappelant peut-être que même si les adultes semblent graves, ils sont avant tout préoccupés par le jeu, le divertissement et l’amour, et qu’au-delà des contingences vitales, c’est cela souvent qu’ils recherchent. 

L’estampe ci-dessus est du XVIIIe siècle. Elle met en scène des putti architectes prenant des mesures. Jean-Michel Mathonière a gentiment écrit pour nous au sujet de cette gravure ce qui suit. Nous l’en remercions vivement. Cela dévoile, si c’est nécessaire, combien certaines choses, plus ou moins anodines d’apparence, peuvent cacher de grandes significations. Avant de le citer je dois dire que c’est vraiment par hasard  que je l’ai rencontré (j’ai été plus prompt que lui à me procurer cette estampe), et que si je suis un passionné de mesures, d’architectures, de banquets, de Platon, de Pythagore et des orphiques, je ne me suis jamais intéressé à la franc-maçonnerie, contrairement à Jean-Michel Mathonière (www.compagnonnage.info) qui est historien des compagnonnages de métier ; comme tel, il s'est penché aussi sur la symbolique de la franc-maçonnerie ancienne et est également collectionneur d'objets d'époque sur ces sujets souvent confondus, au demeurant à tort. « On trouve de nombreux putti tailleurs de pierre et/ou architectes sur certains frontispices des "Rôles" des Compagnons Passants tailleurs de pierre du XVIIIe siècle. Les Rôles sont tout à la fois l'emblème sacré de la société compagnonnique (ils ne sont présentés qu'exceptionnellement à la vue des Compagnons, notamment durant leur initiation), son règlement administratif et le support de la recension des passages des Compagnons dans la ville (chaque ville-siège détient son Rôle). Les quelques Rôles qui nous sont connus pour le XVIIIe siècle possèdent généralement des frontispices illustrés, plus ou moins symboliques. C'est le cas pour les Rôles de Paris de 1726 et 1769 (il s'agit d'archives privées, compagnonniques, et encore "secrètes" car toujours plus ou moins en usage rituel). Sur celui de 1769 notamment, les Compagnons tailleurs de pierre se sont représentés sous les traits de putti. Faute de suffisamment d'archives sur les Compagnons, il est difficile de savoir si cette iconographie est un simple emprunt ou non à l'iconographie architecturale du XVIIe siècle, où l'on trouve très souvent des putti architectes et/ou artisans. On trouve plusieurs beaux exemples dans les gravures des frontispices de traités d'architecture des XVIIe-XVIIIe siècles, et aussi dans l'oeuvre gravée de Sébastien Le Clerc. Il est cependant à noter que cette iconographie architecturale d'origine savante ou artistique, comporte de nombreux clins d'oeil à la symbolique compagnonnique (on pourrait souvent croire qu'il s'agit de symbolique maçonnique... sauf que la franc-maçonnerie spéculative ne naît qu'au début du XVIIIe) : équerre, compas, sphère armiliaire ou globe terrestre (la gnomonique fait partie des connaissances très prisées par les Compagnons tailleurs de pierre), tracés géométriques, Minerve, etc. La gravure reproduite ici est intéressante quant aux éléments géométriques mis en évidence : le théorème de Pythagore (avec les trois carrés de progression 3-4-5) et un des corps platoniciens, le dodécaèdre. »

Pour ce qui est du Pythagorisme, certaines des ‘théories’ de cette secte (durant l’Antiquité on appelle ‘sectes’ les mouvements philosophiques et parfois religieux comme les orphiques, les stoïciens, les épicuriens …) me sont particulièrement chères, comme celles liées à l’harmonie, à la musique et aux rythmes, dont j’ai fait plusieurs fois des allusions. Rappelons encore que les chiffres liés à l’Harmonie n’ont rien de secret. Il faut cependant avoir une certaine réceptivité à l’Intelligence, la Beauté, l’Amour, pour les comprendre et surtout les vivre.

Cochin fils (Charles Nicolas Cochin – 1715-1790) est le dessinateur et graveur de cette estampe anciennement découpée du livre Traité d’Architecture. Au sujet du dessinateur, on peut lire une courte biographie le concernant sur www.artheque.com : « La notice sur Cochin le fils est forte, en effet l’oeuvre dessinée et gravée est considérable, ne relève de la gravure de moeurs et de genre que pendant les premières années de sa longue, brillante et féconde carrière ; ce sont les portraits et surtout les illustrations qui remplissent tout le reste. Encore faut-il, pour représenter ici Cochin le fils, oublier qu’il est le plus souvent son propre graveur (voir, par exemple, l’un de ses types de Paris, le Tailleur pour femme), et que c’est par exception, et surtout dans la période de ses débuts, qu’on le voit travailler d’après les autres (témoin sa planche de la Foire de campagne de Boucher). Né à Paris le 22 février 1715, il avait de qui tenir et taillait le cuivre dès l’âge de 12 ans ; il acheva sa formation chez Le Bas, et l’observateur né, l’excellent dessinateur qu’il était se doubla ainsi d’un graveur possédant à fond toutes les ressources du métier. Remarqué de bonne heure, du reste fort adroit à profiter des occasions et servi par une chance exceptionnelle, Cochin fut nommé, à 24 ans, dessinateur et graveur des Menus Plaisirs (1739), à point nommé pour assister à une série de fêtes qui devaient 1ui fournir l’occasion de plusieurs chef-d'œuvres : il s’agit des vastes et magnifiques compositions commémorant les réjouissances données à Versailles lors des deux mariages du Dauphin, fils de Louis XV, en 1745 et 1747, gravées les unes par son père : les autres par lui-même (Cérémonie du mariage de 1745 dans la chapelle de Versailles. Décoration de la salle de spectacle ; le Jeu du Roi,), et aussi des planches, guère moins importantes, qui conservent le souvenir des pompes funèbres célébrées à la même époque. Désigné par Mme de Pompadour pour être l’un des compagnons de son frère, M. de Vandières (le futur Marquis de Marigny) lors du voyage d’œuvres de 1749-1751, Cochin se révèle, au retour, comme critique et comme apôtre du grand art ; il abandonne l’observation et l’étude de mœurs, il vise au style et ne voit dans ses compositions que matière à d’inépuisables allégories ; en même temps, sans cesser de produire, il conseille, il dirige, et tant par sa place de secrétaire et historiographe de l’Académie que par ses relations d’amitié avec Marigny, il exerce une influence marquée dans le monde de l’art. Agréé à l’Académie le 29 avril 1741, académicien le 4 décembre 1751, secrétaire et historiographe en 1755, conseiller en 1774, Cochin le fils mourut le 29 avril 1790, ayant joué un rôle et tenu une place remarquables dans sa production. «On trouve dans ses ouvrages, écrit l’abbé de Fontenay (Dictionnaire des artistes, 1776), cet esprit, cette pâte, cette harmonie et cette exactitude qui constituent l’excellence de la gravure.»

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La musique et le style

Pour commencer, il y a le mouvement qui est inhérent à l'individu et aux choses vivantes en général. Il en résulte du rythme. Ensuite des associations se forment et des styles en découlent qu'on invente et/ou que l'on suit. Le mouvement est donc associé au rythme qui l'est évidemment à la musique, à la danse, à la poésie et à la langue. Les rythmes collectifs nécessitent une entente cordiale et solidaire, une certaine finesse et un respect de l’autre. L’invention de nouveaux rythmes est dévolue durant l’antiquité grecque aux poètes, au moins en ce qui concerne le culte du dieu du vin Dionysos avec les prémisses puis l’invention du théâtre.
Certains ont étudié les meilleurs moyens de diriger ce besoin d'action collectivement sous la forme de choeurs et à travers les sciences telles que la philosophie, la poésie, les mathématiques, l'art, la religion ... Par 'choeurs', nous entendons le groupement de plusieurs personnes associant différents rythmes : chants, musiques, paroles, mouvements et danses. Deux catégories de rythmes prévalent : ceux du corps et ceux de la parole, les uns étant souvent liés aux autres. La musique est leur combinaison. Cette double conception, vocale et gymnique, est en particulier présente dans l'éducation athénienne où les exercices physiques sont aussi importants que ceux relevant du verbe. Dans ceux du corps, il y a la danse, la gymnastique et la guerre. Ceux de la parole incluent le chant, la poésie, la musique et toutes les autres formes écrites ou parlées. Ces rythmes sont réglés selon différents rites. Le théâtre qui en est un des principaux est né dans les rituels donnés en l'honneur de Dionysos et en particulier dans le détachement de comédiens des choeurs. Les muses sont parmi les inspiratrices et les révélatrices de ces rythmes. Dans cette fonction, elles président à l'éducation des enfants. Si aujourd’hui on les compte comme étant au nombre de neuf, et si elles sont bien définies, autrefois, elles sont invoquées sous diverses appellations distinctes dans plusieurs parties de la Grèce, considérées comme des nymphes, associées par exemple aux cours d’eau, aux sources et aux grottes. Primitivement, on communie donc avec elles surtout dans des lieux naturels.

Les changements continuels, les mouvements inhérents à toutes choses (même celles inanimées sont mues) impliquent les créations et les modifications des styles. Le style réside dans la capacité de s’adapter et de créer des rythmes. Une personne ayant du style a une connaissance intuitive des bons rythmes, une intelligence se caractérisant par une extrême sensibilité. Elle agit en conséquence uniquement sur le moment présent qu’elle entend avec acuité et dans lequel elle s’insinue par voie de fait avec beaucoup d’habileté. Chaque style a sa musique, sa mode, son art, sa philosophie, sa langue …, tout ce qui résulte de mouvements qui lui sont propres.

Photographie
 : Mercure Galant, Avril 1688, comprenant un Essai de Pastorale, Pour un Concert à Madame la Dauphine, avec une petite pièce musicale se déroulant « dans les Campagnes de Versailles » et mettant en scène Hymen, Amour, Bergers, Bergères, un Chœur etc.

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Le Chiffre, le Signe et le Verbe.

undefinedPhoto : Bergère inscrivant le Chiffre d'Amour sur un arbre (voir description plus loin).

Le chiffre est un symbole (ou plutôt un logogramme) associé le plus souvent à une valeur numérique, mais pas seulement. Le symbole implique une convention et donc sa connaissance, d'où le caractère plus ou moins secret de certains chiffres qui prennent l’apparence d'un langage spécifique s'adressant à des initiés. L'Alchimie utilise une écriture chiffrée. Le soufre est le chiffre du feu etc. Les chiffres agissent à la façon de ceux représentés dans le livre de magie appelé aussi grimoire, altération du mot grammaire. Le Verbe et sa grammaire sont en effet témoins de vie. Un autre mot appartient à la même famille que ‘grammaire’ et ‘grimoire’, c’est ‘grimace’. Son origine est le mot francique (de la tribu des Francs) grîma signifiant « masque ». Le masque est porteur de grammaire, de signification et d’action (voir article du 17 décembre 2007 sur Le théâtre antique et les conventions … classiques …). On peut le comparer à un chiffre car comme lui il imite, symbolise, représente. Si un chiffre en tant que valeur numérique sert pour appréhender, comprendre et agir, il en est de même pour les autres chiffres et le masque (surtout dans le cadre de rituels pour ce dernier). Le terme de ‘chiffres’ est utilisé en musique pour représenter des notes sous la forme de lettres ou de nombres, ou indiquer des accords. De même, par ce mot on entend (cela est attesté au moins depuis le XVIe siècle par chyfres) les lettres initiales des prénoms et du nom d’une personne. Ainsi retrouve-t-on nombre de ceux-ci inscrits dans divers endroits (reliures de livres, frontons, vaisselle …) afin de signifier la personne même et dans le cas des objets, à qui ils appartiennent. Les pythagoriciens donnent aux chiffres comme valeur numérique une action. Ils permettent de « parler » de la divinité, de choses difficilement explicables. Plusieurs écoles philosophiques de l’Antiquité les utilisent pour expliquer l’Un en le divisant etc., afin de signifier le Cosmos dans son entier et les rythmes qui sont impliqués, la musique qui en découle, celle du nombre, des rythmes imités dans la parole, les chants, les danses … mais nous verrons cela dans un autre article.

De nombreuses théories sous-tendent que nous sommes entourés de signes, comme celle ‘des signatures’ en botanique élaborée de façon « officielle » (par écrit) au IIe siècle après J.-C. par le médecin grec Claude Galien (131-201). Ne dit-on pas que la Nature est un livre ouvert ? Dans ce cas les signes sont des êtres vivants (ou des choses) ou des parties de ceux-ci. Ils font référence à une vérité ou à la probabilité de celle-ci et à sa manifestation, ou bien à une imagination créatrice . Ils peuvent représenter quelque chose sous une forme ou une autre (dessin, son, couleur, geste…) par similitudes ou conventions. Au terme ‘signe’ sont associés dans la langue française ceux de  : signification, signifiant, signifié, signature, signal etc. Les couleurs, formes, symboles, signes … ont leurs significations qui varient selon les sociétés. En Chine, le jaune est réservé à l’Empereur. En France, certaines familles ont toujours leurs couleurs, leurs armoiries … Rien n’empêche une personne de posséder les siennes. Le blason a valeur d’énoncé, de langage, avec sa science : l’héraldique. Ces emblèmes peuvent être utilisés d’une manière raffinée. Ils marquent l’indépendance de chaque famille, maison, région, pays, parfois d’une seule personne … D’autres signes ont valeur de formulation : ceux d’une tenue vestimentaire ou qu’on affiche autour de soi. A la Révolution, la cravate et le collet noirs (couleur portée en signe de deuil en mémoire des victimes) ou verts des Incroyables suscitent des réactions violentes de la part de certains révolutionnaires qui les leur arrachent. Ceux qui ne portent pas la cocarde d’abord bicolore puis tricolore peuvent être punis de prison. Et lorsque certains la manipulent pour la rendre discrète et plus élégante, ils sont rappelés à l’ordre. Pourtant ces trois couleurs ne sont pas contre la royauté puisque le bleu et le rouge sont celles de Paris, et le blanc celle du Roi, de la France et du royaume.  

Les tapisseries de La Dame à la Licorne, du XVe siècle et conservées au Musée national du Moyen-âge (Thermes et Hôtel de Cluny) à Paris, proposent de magnifiques exemples de symboles assemblés d’une façon particulièrement harmonieuse dans la pure tradition courtoise. On y retrouve armoiries, bestiaire, plantes, gestes, postures, vêtements …, agencés en tableaux allégoriques d’une grande finesse d’exécution et de langage. Cela peut nécessiter un déchiffrage. A ceux pour qui l’entreprise semble trop grande, qu’ils fassent comme les mélomanes qui apprécient certaines musiques profondément sans savoir pourquoi ou certains poètes inspirés par la Muse qui écrivent en suivant une grammaire élaborée mais comme de façon fortuite, comme guidés par la divinité et ceux qui se laisseront aimer leur chant … se laisser séduire, accepter la convention d’Amour, sa cour toujours renouvelée, en sachant relativiser en connaissance de la mesure de soi-même. En Asie, il y a une pratique dont les tibétains sont passés maîtres : le mandala, dont le terme provenant du sanskrit signifie cercle. Il est le plus souvent employé pour représenter et entrer dans le palais d’une divinité et servir de support de méditation. Il symbolise la plupart du temps un environnement sous une forme symbolique pouvant être considéré comme protecteur. 

Dans tous les cas, ces symboles sont l’expression d’une relation avec le monde, l’entourage, des moyens de s’affirmer, de créer, de recevoir … de communiquer … Dans un prochain article nous parlerons plus spécifiquement de la langue française.

Photo : Bergère, habillée à l’antique et parée de couronnes de fleurs, inscrivant le Chiffre d’Amour sur un arbre. Elle tient de la main droite sa houlette (bâton de berger) et de la gauche un ‘crayon’. Près d’elle se trouve son troupeau de moutons et à ses pieds coule un ruisseau. Frontispice d’Idylles et Poèmes champêtres, de M. Gessner, traduits de l'allemand par M. Huber, Lyon, chez Jean-Marie Bruyset, 1762. Format in-8°. Cette estampe est gravée par Claude Henri Watelet (1718-1786) d’après Poussin.

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La mesure de la France

La France a une figure d'hexagone régulier particulièrement harmonieuse. Cette forme, telle qu’on la connaît aujourd'hui, est déjà plus ou moins établie au XVIIIe siècle. Pour une grande partie, ses frontières (mers, montagnes …) sont naturelles. Paris, sa capitale, est située en plein milieu de son horizontale et au quart nord de sa verticale. L’équilibre est parfait ! Voilà une mesure d’excellence !

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La carte dépliante présentée ici est celle d’un almanach de 1756 de très petites dimensions : mesurant 6 x 9,5 cm, au joli titre d’Étrennes Mignonnes … Dans le prochain article un autre almanach sera exposé mais de mode !

 

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Merveilleuses & merveilleux