Manches gigot

L’histoire de la mode est parsemée de stratagèmes redessinant les silhouettes, en particulier à partir de la fin du Moyen-Âge. Le postiche est l’un d’entre eux. Il s’agit d’un élément ajouté ou d’un rembourrage rendant plus grand un élément de la tenue (cheveux, partie du corps…). À partir de vers 1807, il fut de bon ton d’élargir les épaules de la tenue des femmes. Dans la seconde partie des années 1820, ces rembourrures descendirent un peu plus bas, sur le haut des bras puis de plus en plus bas, prenant toujours davantage d’ampleur, comme les robes d’alors. C’est cela que l’on a appelé « manches gigot ». J’en donne plusieurs exemples dans ces articles : ici, ici, ici, ici, ici et ici.

Dernièrement, j’ai découvert que ces manches étaient déjà renflées au niveau de la chemise (chemise de corps) de la femme, en croisant, par hasard, une peinture du XIXe siècle (voir photographies), en cherchant un lieu pour prendre une collation, un dimanche matin assez tôt. Cette oeuvre est exposée au rez-de-chaussée de l’Hôtel Providence, à Paris. Elle représente une jeune dame, de trois-quarts dos, une partie du dos et tout le bras dénudés, laissant tomber sa chemise avant sa robe, pour rentrer dans une baignoire dont l’eau coule encore par un robinet. Comme on peut le lire sur ce site : « Au milieu du 19ème siècle, la généralisation de la machine à vapeur rend possible la réalisation de réseaux d’adduction sous pression desservant les logements individuels. Sous le second Empire, l’arrivée du Baron Georges Eugène Haussmann (1809-1891) à la préfecture de Paris agit comme un accélérateur. » La toilette se modernisait donc, et nous avons dans ce tableau un témoignage émouvant et rare d’une double pratique liée à la mode et à l’hygiène !

B
Je suis en train de lire l'autobiographie de Paul Poiret qui évoque avec bonheur ces manches et aussi sa mise au point de robes plus pratiques pour les dames qui désormais prenaient des transports en commun...
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L
Oui, les crinolines et les manches gigot posaient quelques problèmes, notamment dans les trains, et les caricaturistes de l'époque ont beaucoup plaisanté sur ce sujet. Ceci dit, on a aussi brocardé les robes entravées de Paul Poiret qui poussaient les merveilleuses d'alors à n'avancer qu'à petits pas.
Merveilleuses & merveilleux