Catalogue de Goethe de gravures d’époque représentant des merveilleuses et des incroyables

En 1797, Johann Wolfgang von Goethe (1749 – 1832) a répertorié cinquante-sept gravures satiriques sur le sujet des merveilleuses et des incroyables. L’universitaire Klaus H. Kiefer a entrepris de retrouver ces estampes, ce qui a donné un petit livre (photographies), datant de 1988, où toutes sont présentées et la plupart avec une image. Elles datent toutes d’une période comprise entre 1794 et 1797 inclus. Cette recension de Goethe n’est bien sûr pas exhaustive. On observe que la production est parisienne, et que les artistes ayant réalisé ces œuvres sont nombreux, certains connus, d’autres non, et des anonymes.

Dans cette liste, le dessinateur le plus représenté est Louis-Léopold Boilly (1761 – 1845, voir sur cet artiste cette exposition), qui a surtout collaboré avec Salvatore Tresca (1750 – 1815) qui était non seulement graveur mais semble-t-il aussi éditeur et marchand d’estampes, ce qui était le cas d’autres graveurs et dessinateurs de ce genre, comme Jean Baptiste François Bosio (1764 –1827). Carle Vernet (1758 – 1836) vient ensuite, gravé par Louis Darcis (? – 1801), puis Pierre-Thomas Le Clerc (1740 – 1791) avec Pierre-Thomas Auvray (1740-1796) comme graveur…

Louis-Léopold Boilly, Carle Vernet et Pierre-Thomas Le Clerc sont donc les principaux dessinateurs de merveilleuses et d’incroyables de cette liste, et Louis Darcis, Salvatore Tresca, Pierre-Laurent Auvray, les graveurs les plus prolifiques. À l’époque, on se procurait ces estampes chez les « marchands de nouveautés ».

D’autres artistes graveurs et/ou dessinateurs, de la fin du XVIIIe siècle et officiant à Paris, ont pris comme sujet les merveilleuses et les incroyables, comme Philibert-Louis Debucourt (1755 – 1832), Claude-Louis Desrais (1746 – 1816), Nicolas Dupin le Jeune (1753 – ?), A. B. Duhamel (1736 – après 1800), Pierre-François Courtois (1736 – 1763), le baron Pierre Narcisse Guérin (1774 – 1833), Pierre Adrien Le Beau (1748 – 1773), Jean-Michel Moreau le Jeune (1741 – 1814), Augustin De Saint-Aubin (1736 – 1807), Étienne Claude Voysard (1746 – ?), etc.

Dès 1797, le Journal des Dames et des Modes a fait travailler de nombreux de ces artistes. Cependant, la plupart des estampes n’étant pas signées, il est difficile de savoir pour lesquelles.

Ce qui est sûr, c’est que les documents iconographiques d’époque sur ce sujet ne manquent pas, sans compter les peintures et les portraits miniatures ou pas, dont beaucoup représentent des incroyables ou des merveilleuses. J’en vois passer régulièrement en vente, notamment des portraits miniatures de 1795 – 1800 avec un incroyable ou une merveilleuse.

Par la suite, ce thème n’a pas cessé d’être représenté, en commençant par la série Le Bon Genre comprenant 104 planches publiées de 1801 à 1817, complétée entre 1818 et 1822 de 11 planches, d'où trois éditions de l'album complet datant de 1817 (L.-G. Michaud, imprimeur), 1822 (Crapelet, imprimeur) et 1827 (Vassal et Essling imprimeurs), cette dernière étant une réimpression de celle de 1822 avec des variantes (cf. : Le Bon Genre. : Réimpression du Recueil de 1827… avec une préface de Léon Moussinac, Paris : éditions Albert Lévy, 1931), tout cela sous la direction et avec des notices de Pierre de La Mésangère (1761 – 1831). Léon Moussinac cite plusieurs artistes collaborant à la réalisation de cette série, dont A. Dutailly, Lanté, Aug. Garneray, Pasquier, Carle Vernet (voir précédemment), Dominique Bosio (voir précédemment), J.-B. Isabey, Harriet, Garbizza… « L’attribution n’est pas toujours certaine, le plus grand nombre des planches n’étant pas signé ». Ces gravures étant éditées au fur-et-à-mesure à l'unité avant d'être rassemblées en recueil, elles peignent la mode du jour de jeunes gens à la mode que l'on appelait toujours des merveilleux et des merveilleuses.

Pierre de La Mésangère est à l'origine d'une autre série de gravures intitulée Incroyables et Merveilleuses, publiée par Le Journal des Dames et des Modes de 1810 à 1818, dessinées par Horace Vernet (1789 – 1863) et Louis-Marie Lanté (1789 – 1871), et gravées par Georges-Jacques Gatine (1773 – 1841-7)… Chaque estampe représente une seule personne à la mode des années 1810. Il ne s'agit donc pas à proprement parler d'incroyables et de merveilleuses du Directoire, mais comme déjà dit, ces désignations sont encore utilisées au début du XIXe pour des personnes à la mode, en particulier celle de « merveilleux ». D'autres séries d'estampes sont publiées dans la même veine.

A partir de 1830 et les débuts de la mode romantique en France, on emploie moins le terme de « merveilleux », mais on représente les merveilleuses et les incroyables du Directoire qui deviennent un sujet très apprécié jusqu’aux années folles incluses, le premier tiers du XXe siècle trouvant une inspiration dans la mode libre, voire libertaire de la fin du XVIIIe. Voir cet article, cet autre, celui-ci, celui-là, etc.

M. Klaus H. Kiefer a complété ce travail en 2012 : Voir ici.

Merveilleuses & merveilleux