Petits-maîtres italiens

Après les petits-maîtres anglais (voir cet article), voici les italiens !

Merveilleuses et merveilleux

Photographie ci-dessus : Gravure de Cesare Vecellio (1521 – 1601, artiste italien, frère de Titien) avec une Vénitienne.

Bien évidemment, cette lignée se caractérise par son antiquité. J’en parle largement dans mon ouvrage sur Les Petits-maîtres du style de l’Antiquité au XIIe siècle. Ce livre est important pour comprendre l’antiquité des petits-maîtres, ce qu’ils sont et ce qu’ils représentent. On observe une véritable filiation sur plus de 2500 ans, et pourrait même remonter plus loin, voire beaucoup plus loin  (Égypte, préhistoire même…), bien que les sources manquent… Pourquoi ne se prolongeraient pas les surprises que j’ai eues en remontant dans le temps ? Ce voyage que j’ai fait et qui consiste à suivre la lignée des petits-maîtres est vraiment merveilleux, et je vous invite à l’entreprendre à travers mes ouvrages.

Pour en revenir au livre Les Petits-maîtres du style, j’y donne et décrit notamment nombre de petits-maîtres de l’époque romaine, comme le trossulus et la trossula qui ont toutes les caractéristiques. J’en parle dans cet ouvrage, car on les retrouve aussi dans la Gaule gallo-romaine. Même les petits-maîtres grecs sont connus dans les Gaules, la Grande Grèce allant jusqu’à l’actuelle ville de Marseille, et son influence bien au-delà. J’insiste sur le fait que ce livre est important pour comprendre les petits-maîtres en général et français en particulier.

Depuis l’Antiquité jusqu’à aujourd’hui, les noms donnés à des petits-maîtres italiens sont nombreux. La dominula et le dominulus romains ont des noms se traduisant directement par “petite-maîtresse” et “petit-maître”, dominus signifiant notamment “maître”, terme auquel est ajouté comme suffixe un diminutif. Cela donne au Moyen-Âge, dans les royaumes de l'actuelle France, la domnicella et le damiselet, puis la damoiselle et le damoiseau. De même le bellus homo romain aboutit au beau français, l’elegans homo et l’homo elegantissimus à l’élégant, l’urbanus et l’homo lautus et urbanus à la personne urbaine, le mundanus au mondain… Certains petits maîtres romains se caractérisent par leur avant-gardisme, comme avec la novatrix et le novator, d’autres par leurs goûts, par exemple pour la culture grecque, comme avec la graecula et le graeculus… Il y en a d’autres, comme le delicatus, l’elegantiae arbiter, l’erudito luxu, la lampadium… mais je m’arrête-là, car mon livre sur Les Petits-maîtres du style est toujours disponible à l’achat.

Au Moyen Âge, l’Italie, divisée en de multiples royaumes, entretient le merveilleux notamment à travers ses moeurs courtoises inspirées en partie des françaises. Si en France le XIIe siècle réinvente la modernité, aux XIVe, XVe et XVIe siècles, c’est à nouveau l’Italie qui le fait. Cette dernière redevient un modèle pour les petits-maîtres et l’art en général, ce qui aboutit à la Renaissance française du XVIe siècle.

Photographie ci-dessous : Autre gravure de Cesare Vecellio représentant une petite-maîtresse italienne (Gentildonne Venetiane), se colorant les cheveux en blond vénitien. On remarque ses hauts patins.

Merveilleuses et merveilleux

Le bellimbusto est un beau. Un cicisbeo est une sorte d’ami masculin dilettante d’une femme mariée, la divertissant, l’aidant et l’accompagnant lors d’occasions mondaines et divertissantes (représentations théâtrales, fêtes, réceptions, promenades, etc.) à la place de son mari. Il passe la majeure partie de la journée avec elle. Le cicisbeo est généralement beau, élégant et très bien élevé. On le retrouve déjà durant l’Antiquité romaine. Le damerino est un mirliflore. Ce nom fait pensé à celui de dameret médiéval (voir Les Petits-maîtres de la mode) dont le terme est encore en usage en France au XVIIIe siècle. Le vagheggino est une sorte de gandin galant. Le moscardino est un mollusque et aussi un gandin, un bellâtre. L’elegantone est un ‘costard’, un élégant bien habillé. Le gagà est un genre de dandy, ce dernier nom (dandy) étant aussi utilisé en Italie. Les Italiens appellent parfois ganimede un homme beau comme le prince troyen mythique Ganymède, devenu échanson de Zeus. Le zerbinotto est un jeune homme à la mode, élégant et galant. Le figurino est recherché dans sa mise. Le farfallone est un gandin léger et versatile. Le paino est un jeune homme d’une élégance raffinée dans la tenue vestimentaire et les manières. Le galletto (ce nom s’écrit peut-être aussi sgaletto, venant du verbe sgallettare signifiant « faire le coq ») fait étalage de vivacité, d’audace et même d’une aisance démesurée, en particulier avec les femmes. Le dongiovanni est une sorte de libertin, au sens récent du terme. D’autres noms sont en relation avec la butinage, comme avec le donnaiolo qui est un coureur de jupons, le seduttore, un séducteur, comme pour le tombeur de femmes, expression aussi utilisée en Italie. On constate que certains substantifs sont empruntés au français ou à l’anglais, comme avec le play-boy, qui est une autre sorte de seduttore, mondain, beau, charmeur et généralement riche, accompagnant des femmes, jeunes ou âgées, mais toujours belles et célèbres. Le gentiluomo rappelle le gentilhomme français, le bello et la bella, le beau et la belle, ou les équivalents romains. Le viveur est un… viveur, le nottambulo, un noctambule. Le signorino rappelle le petit-maître aussi par son nom. Il s’agit d’un jeune homme délicat, aux goûts raffinés ou difficiles. Le modaiolo est un fashionista, un modeux. Sans doute le terme de fashionista s’emploie aussi au féminin. Le manichino est un mannequin ou une personne y ressemblant.

Merveilleuses et merveilleux

Photographies ci-dessus et ci-dessous : Gravure de Jean-Jacques Boissard (1528 – 1602, humaniste français), de 1581, représentant une « Nouvelle mariée de Rome », une « Fille Romaine » et une « Femme Romaine ».
 

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