La Nana et la nénette des années 1970

Merveilleuses et merveilleux

Ci-dessus : Dessin intitulé « La Conscience de Nana », avec pour légende : « – Cependant tu m’avais bien promis de t’y trouver ; tu m’en avais donné ta parole d’honneur ! – J’avais pas dit….. la plus sacrée. »

Cela m'attriste toujours de voir certains considérer les petites-maîtresses depuis la Révolution comme des sortes de prostituées ou des femmes faciles. Comme je le dis ailleurs, ce regard sur les merveilleuses, cocottes et autres lorettes vient que ce sont des femmes très libres, belles, jeunes et souvent affriolantes, et que les prostituées et autres les imitent pour attirer le chaland. Ce regard est sans amour et lui aussi concupiscent. Même lorsque Alexandre Dumas fils (1824 – 1895) publie La Dame aux camélias en 1848 et Demi-monde en 1855, et Émile Zola (1840 – 1902) Nana en 1880, ils évoquent le demi-monde avec une certaine tendresse et sans jugement. On retrouve cet esprit dans nombre de pièces, romans et autres œuvres (caricatures…) du XIXe siècle, où sont souvent soulignées les difficultés inhérentes à la condition humaine et à la condition sociale, et les efforts qui sont faits par certains pour y trouver leur bonheur. Ils dépeignent un monde souvent peu reluisant derrière les apparences de clinquant, mais avec de l’amour et de la sympathie pour leurs rêves de grandeur, de bonheur et de liberté… près pour cela malheureusement à des bassesses. Le demi-monde n’est pas celui des petites-maîtresses, bien que certaines en font partie, mais est fréquenté par quelques petits-maîtres et autres noceurs.

Le terme « nana » est employé dans la seconde moitié du XIXe siècle avec le sens argotique de concubine ou femme d’un souteneur , et prend rapidement celui de femme en général. Il est popularisé par l’héroïne du roman d’Émile Zola, Nana (1880), mais aussi par d’autres oeuvres comme la peinture d’Édouard Manet (1832 – 1883), réalisée en 1877, représentant une comédienne et intitulée du même nom. Dans la seconde partie du XXe siècle, ce terme porte une signification sympathique, toujours dans le sens de concubine (« c’est ma nana »), ou d’une jeune adulte pas encore sortie de l’enfance, ou bien encore d’une jeune fille se donnant des airs de femme. Dans « nénette » le suffixe « -ette » ajoute de l’affection et enlève le côté concubine.

Au début des années 1980, les nanas sont encore d’actualité, avec leurs habits fluos et mini-jupes, cheveux bouclés avec nœud dans les cheveux. Elles sont un peu plus vulgaires que les minettes, ayant moins de goût, mais avec davantage, ce que les Anglais appellent alors, de fun.

Ci-dessous : Chanson des années 1980 de Vivien Savage, intitulée La petite lady, décrivant une nana de l'époque : « […] la miss avec ses yeux d’renard / Derrière la voilette du chapeau avec une plume d’autruche / Pour faire plus beau […] elle est belle, / La p’tite lady déguisée comme un arc-en-ciel / Avec ses boots en peau d'serpent, / Ses collants roses fluorescents / Sa mini-jupe en skaï / Et comme ça swingue sous son chandail […] elle a comme un p’tit chat sauvage dans les yeux […] On dirait qu’le monde est à toi quand tu t’promènes / Sur ce quai d’gare, Cendrillon, tu marches comme une reine […] ». À noter un emprunt à la musique industrielle, surtout présent dans le dernier tiers de cette chanson, en fond 'musical'.

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