Dernièrement je lisais un article du journal Kairos, se présentant lui-même avec humour comme « le journal belge mondial », de juin-août 2022, intitulé « L’obsolescence programmée ou l’Âge du kleenex » du dossier spécial sur la Décroissance (cliquer sur la photographie ci-dessous pour lire l’article). La mode y est incluse. Elle est sans doute la plus vieille manifestation de l’obsolescence programmée. Ce n’est pas celle-ci que j’apprécie, mais celle qui, acceptant que tout soit mouvement, que tout bouge, renouvelle constamment ses rythmes, du fait de cette réalité et non pas pour suivre l’industrie du prêt-à-porter. Elle est portée par la jeunesse, nouvelle, gaie, pétillante, belle, provocatrice, novatrice… Ce n’est pas à la mode elle-même que je m’intéresse mais aux mouvements de modes.
Je crois en la gaieté, l’invention, le vivre ensemble, la joie… une véritable « communion », mot qui peut sembler désuet… mais pourquoi suivre la mode, sinon aussi afin de marquer son amour du vivre ensemble ? Ce que je dis peut paraître contradictoire : invoquer d’un côté la distinction, l’originalité… et de l’autre la communion. Mais la contradiction est à l’essence même des mouvements de mode qui jouent en même temps sur la nouveauté (l’invention, l’originalité…) et l’imitation… les deux étant des points fondamentaux dans le domaine de l’art en général.
Je ne suis pas la mode, et mon blog en est la preuve, traitant avant tout des modes passées, ne concédant rien à la modernité pour la modernité… ne cherchant pas à plaire, ni à rendre d’actualité… mais montrant les mouvements de modes passés comme les documents d’époque nous les dévoilent.
Les mouvements de modes fournissent une poétique (l’étude des rythmes) simple. Ils sont aussi l’expression d’un savoir être ou plus exactement d’un savoir image. Dans un autre article j’aborderai l’importance de l’image (imago) dans la mode et la philosophie antique.
Il est très intéressant d'y déceler ce qui ne change pas. Évidemment seul le changement ne change pas, mais on distingue d’autres éléments récurrents dans les mouvements de mode et les petits-maîtres qui les font et les portent, comme l’inventio et l’imitatio dont je viens de parler, ou encore l’actio : la mise en mouvements de nouveaux rythmes liés à la musique, à la danse, au costume, au langage, à l’art, à la littérature, etc.
Dans l’expression « mouvements de modes », le terme de « modes » peut aussi bien être au féminin qu’au masculin. Mais ici les modes au masculin ne sont ni les ‘hautes’ (musique classique, sciences…), ni les ‘basses’ (vie courante…), mais entre les deux, même si tout interagit.
Les mouvements de modes et la plupart des petits-maîtres se distinguent de la mode. Les babas, les bcbg ou les existentialistes ne suivaient pas la mode du moment… et pourtant… Peut-on dire qu’un néo-dandy ou un honnête-homme du début du XXIe siècle suit la mode de son temps ? Bien au contraire… On peut même, et doit ajouter les décroissants dans les mouvements de modes, car ils proposent un autre mouvement de l’être humain et de la société… un mouvement en opposition avec la toute sainte croissance.
La plupart du temps les mouvements de modes se sont démarqués de la mode, bien que généralement copiés par elle. Ils ont souvent un caractère subversif ou merveilleux : invraisemblable, une distinction qui fait ressembler les petits-maîtres à des Martiens. Ils sont comme des ballons d’hélium multicolores surnageant au-dessus du commun tout en y étant tenus par un fil. Un rien pourrait les faire s’envoler comme des anges. Bien sûr, parmi eux il y a aussi des modeux, mais la contradiction, je le répète fait partie de la petite-maîtrise, pas une contradiction stupide, mais un clair-obscur, des tonalités diverses qui font sa richesse.