« Pour la beaulté de la chose mesme en soy »

Les Petits-maîtres du style

La phrase de ce titre est une citation de Montaigne dans l’orthographe de l’époque, alors que dans un contemporain, cela donne : « Pour la beauté de la chose même en soi ».

Pour ceux qui ne comprennent pas, cela leur serait peut-être plus facile si on remplaçait le terme de « beauté » par celui de « bonté », cette dernière étant reconnue pour ne pas attendre de gratification autre que celle d’être. Il me semble qu’il en est de même pour la beauté. Ce que l’on aime vraiment, on en n’attend rien d’autre que le fait d’être.

La beauté des rythmes vit en elle-même. Elle est comme un bijou. Un bijou, un monstre peut le porter, cela ne lui enlève rien de sa valeur. Peu importe si certains se servent de ces rythmes pour cacher leur vilenie, ou leur misère comme c’est sans doute mon cas. Ce qui est précieux est précieux en soi, et aucun désir ne peut corrompre cela. Je le répète, un diamant reste un diamant même dans la fange. De même la mode reste la mode.

Voilà une histoire où, pour une fois, je ne me mets pas du côté du philosophe : Il s’agit d’Antisthène (445 – 365 av. J.-C.) qui demandait à un jeune homme essayant de ressembler à une statue : « Le bronze a-t-il une voix dont il tire de la gloire ? » « Non, lui répondit le petit-maître, mais il a sa beauté. » « N’as-tu pas honte, répliqua le philosophe, de vouloir ressembler à une chose inanimée ? ». Là est pourtant toute la philosophie du gandisme : N’être qu’une belle statue.

Mais est-ce vraiment possible d’être sans mouvement sans être mort ? La beauté de la statue elle-même a son rythme, son harmonie (celle de ses formes…). Une jeune femme contemporaine demandait à un vieux Tibétain s’il était vrai que certains Tibétains pouvaient léviter, voire voler. Il lui répondit que oui. Elle se mit à rire en disant que cela était impossible. « Ce n’est pas difficile, répondit-il ; ce qui est difficile c’est de ne pas bouger. »

Merveilleuses & merveilleux