Il me semble que nous sommes à une époque où on nous impose majoritairement le glauque, le stupide et le pervers. Il suffit de regarder autour de soi pour s’en persuader, avec tous ces gens qui se masquent même dans la rue, qui forcent les autres à le faire à l’intérieur, avec le passe-sanitaire que l’on rend obligatoire (personnellement je ne suis pas vacciné, et ne porte un masque que lorsque l'on m'y oblige et sur lequel est marqué « TYRANNIE »), avec tout un camaïeu de pollutions et tant d’autres horreurs dont nous subissons le spectacle et l’humiliation quotidiens… Même ce que j’analyse dans ce blog comme étant positif, bon et beau, ne l’est souvent qu’en partie… parfois même en très petite partie. C’est en particulier vrai pour les mouvements de mode du XXe siècle et de ce début de XXIe. C’est la raison pour laquelle jusqu’à présent je n’ai pas parlé de cela et me suis cantonné aux petits-maîtres de l’Ancien régime, comme premier palier pour évoquer l’élégance. Je me rends bien compte que les petits-petits-maîtres et encore davantage les élégances d’un kaloskagathos grec, d’une persona virtuosa romaine, d’une gente dame, d’un bel sire, d’une personne courtoise, galante ou honnête français n’intéressent presque personne, et que les gens préfèrent pour la plupart vivre masqués, bétonnés, dans l’illusion d’écrans et d’ondes électro-magnétiques portant une infinité de mensonges comme celui que d’être égoïste consiste à être altruiste. Il faut donc prendre ce que j’écris, en particulier sur les mouvements de mode du XXe et début XXIe siècles, comme un espoir et une recherche d’émerveillement dans un monde plus proche et contemporain… démarche sans doute stupide. Mais la vie m’a appris que l’espoir, même s’il n’est peut-être rien, que de la fumée, fait toute la vie de l’être humain (ou de la plupart), que sans lui ce dernier n’est généralement que perdu dans les ténèbres qu'elles soient réelles, créées (comme l'égoïsme ou la méchanceté) ou subies. Gardons donc l’espoir.
Après cette introduction, j'en viens à mon article. Ces derniers temps, j’ai croisé plusieurs fois dans Paris des hommes portant des talons hauts assez carrés, comme au XVIIe siècle, avec des cheveux assez longs et bouclés, une ou deux boucles d’oreilles, des bijoux… Cela donne un style que l’on pourrait qualifier de féminin aujourd’hui, mais que l’on retrouve assez chez les gommeux, les petits-maîtres et de manière générale chez les hommes de l’Ancien Régime. Ces derniers pouvaient être beaucoup plus délicats dans leur mise que ceux d’aujourd’hui, comme aux XVIIe et XVIIIe siècles, avec leurs grandes perruques, leurs dentelles, etc.
Il semblerait que ce soit le créateur anglais Thom Browne qui ait remis au goût du jour les talons pour hommes en 2017. Certains mannequins masculins auraient même refusé de défiler pour lui à cause de cela (voir ici).
En 2020 cette tendance est devenue courante dans les défilés de mode (voir ici) et aussi dans la rue comme on peut le constater. Évidemment, la mode vestimentaire pousse à cette sorte d’androgynie, le prêt-à-porter s’accordant très bien de cela. Mais ce n’est pas nouveau. Ce mouvement a commencé dans les années 1980 avec Jean-Paul Gautier et notamment ses jupes-hommes. Dans les années 1990, beaucoup de jeunes hommes s’habillaient en reprenant des stéréotypes vestimentaires homosexuels, sans être de cette affinité sexuelle. En 1994, le journaliste britannique à The Independent, Mark Simpson, inventa le terme de « métrosexuel » pour un homme fortement soucieux de son apparence, quel que soit son genre ou son orientation sexuelle. Cette évolution s’est donc faite naturellement. Comme l’écrivait Géraldine Dormoy, le 19 janvier 2011 dans cet article : « Loin des drag queens déjantées des années 1990, la figure transgenre des années 2010 frappe par son naturel. » Voir aussi cet article et celui-ci. Le mot « transgenre » n'est pas ici anodin, et éclipse le positif de cette mode qui remet au goût du jour une caractéristique importante de la masculinité. Dans les modes d'autrefois, cet aspect que l'on appelle aujourd'hui féminin était au contraire considéré comme faisant partie de la panoplie masculine. Mais aujourd'hui, le transgenre marque un véritable malaise porté par un mondialisme qui nivelle et gomme toutes les particularités, et notamment les différences.
Rappelons que durant l’Antiquité, et jusqu’au XIIIe siècle, l’habit masculin divergeait peu du féminin, la base pour les deux étant la tunique et le manteau. Dans les pays du nord de l’Europe, comme la France, les militaires et certains travailleurs comme les paysans, portaient aussi la braie, l’ancêtre du pantalon, puis les chausses. Ailleurs, et en particulier dans l’aristocratie, la bourgeoisie et le clergé, la tunique et le drapé restaient de rigueur. Au Moyen Âge on appelait « robe » l'habillement, ainsi que l'ensemble des habits taillés dans une même étoffe (un même drap) ou appartenant à un même ensemble, de même que l'habit de dessus masculin ou féminin, la tunique et toutes sortes d'habillements : robe de nuit, robe linge, etc. Le terme de « garde-robe » vient de là. À partir du XIIIe siècle, le vêtement devint beaucoup plus cousu, et donc genré, les corps de la femme et de l’homme étant différents non seulement au niveau de la forme mais aussi de la physiologie, la femme ayant un rythme menstruel, des grossesses, etc. Mais l’homme se parait autant que la femme, voire davantage. C’était en particulier le cas aux XVIe et XVIIe siècles, avec les parements et les dentelles multiples, les perruques, etc. Les mignons du XVIe siècle et d’autres hommes aussi portaient des boucles d’oreille, des colliers (de perles par exemple), des bagues…
La mode vestimentaire féminine empruntait parfois au vestiaire masculin. La tenue féminine d’équitation notamment copiait la masculine en y ajoutant la robe. Les femmes montant à cheval étaient appelées des « amazones ». Ce n’est qu’avant la première guerre mondiale (1914 – 18) que les femmes prirent à grande échelle des éléments du costume masculin dans la vie courante, ce qui fut en particulier le cas après cette guerre, avec la garçonne des Années folles. À partir de la légalisation de la pilule contraceptive (1967 en France), la mode féminine devint de plus en plus masculinisée, mais toujours pas l’inverse, quoique les hippies femmes comme hommes se ressemblaient beaucoup avec leurs cheveux longs et leurs tenues fleuries. À partir des années 1980 et surtout 2010 l’apparence masculine devint plus féminine. Je le répète, il ne s’agit pas de s’habiller en fille, comme peuvent le faire les transsexuels ou certains fétichistes, mais de reprendre des codes vestimentaires qui étaient autrefois aussi masculins, comme les cheveux longs, les hauts talons, la robe, etc. Il est amusant de constater, que ce sont souvent des hommes musulmans ou africains qui ont remis au goût du jour dans la rue la robe chez les hommes.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la masculinité ne consiste pas obligatoirement à un dépouillement ou une sobriété vestimentaire. Le caractère mâle ne s’identifie pas à cela, au contraire. Dans la nature, les animaux mâles sont généralement beaucoup plus coquets que les femelles. Ils cherchent beaucoup plus à séduire que ne le font ces dernières. Ils se parent de crinière, de merveilleuses plumes et de multiples autres ornements parfois somptueux. Cela est donc naturel à la masculinité. Ce jeu de la séduction permet aussi de transcender le désir ou de le maîtriser, afin de ne pas être dans l’expectative d’un désir assouvi dans le futur, mais dans le plaisir de l’instant qu’apporte le soin de la séduction… de la parade… le jeu des apparences…