« Paroles, paroles, paroles et encore des paroles, toujours des paroles » chantait Dalida. Selon Thalès (VIIe – VIe siècle av. J.-C.), le premier des sept sages de la haute Antiquité : « Être loquace n’est pas une marque d’esprit. » Il poursuit : « Avec sagesse, attachez-vous à une seule chose, / Choisissez une seule chose belle, / Et vous assécherez l’intarissable caquetage des bavards. » « Myson [VIe siècle av. J.-C., un autre des sept sages] disait que ce n’est pas dans les mots qu’il faut chercher l’intelligence des choses, mais dans les choses celle des mots, parce que les mots sont subordonnés aux choses et non les choses aux mots. » (Source). La parole doit être l’ombre de l’action et non pas l’action l’ombre de la parole, et encore moins la parole être sans action. Cela est vrai pour les thèmes ‘sérieux’. C’est pour cela que j’écris peu sur de tels sujets, car je suis incapable d’agir.
LA LANGUE. Cependant, la langue a son importance dans le domaine de l’élégance. S’exprimer dans un français gracieux est une beauté, et je regrette souvent mon manque de style, et de pratiquer très médiocrement cette langue. Je fais des efforts, notamment pour ne pas employer de mots anglais.
La langue est la première manifestation du style. Si celle de France est belle, c’est en particulier grâce aux XVIe et XVIIe siècles et un travail approfondi sur celle-ci dans les réunions, ruelles, salons, académies… Le langage porte une idée de la vie en communauté et forme l’individu. Au commencement est le verbe… Pour qu’il évolue, il est nécessaire de ne pas choisir la facilité et de toujours chercher le mot, l’expression et la tournure de phrase les plus appropriés.
LA GRAMMAIRE. Cette langue a sa grammaire, qui est l’art de mettre en relation des lettres, et donc des mots, des phrases… d’une manière écrite ou parlée, ce qui forme un style, une manière, un mode. Comme pour tous les modes, dont la mode, cet art implique l’imitation et l’invention.
LA POÉSIE. La poésie fait en particulier usage de cette seconde catégorie : de l’invention. L’univers contemporain, technologique et numérisé, véhicule une langue très peu poétique. La poésie n’est plus à la mode, alors qu’avant notre temps technologique elle l’est énormément. Le poète est un créateur et même considéré comme un être inspiré : un trouveur (troubadour ou trouvère au Moyen Âge).
LA RHÉTORIQUE. Dans l’Ancien Régime, l’écriture est très liée à la parole. On lit à haute voix. Quant à la poésie, elle l’est beaucoup à la musique. La grammaire, elle, se rapproche de la rhétorique, qui est l’art de mettre en action la langue, par la parole, le geste, l’intonation, etc.
Dans l’élégance, toutes ces ‘sciences’ sont importantes : La grammaire comme référence (imitatio), la poésie comme art de composer (inventio) et la rhétorique pour ce qui est du domaine de la représentation (repraesentatio), c’est-à-dire de l’action (actio : uox, gestus…).
Pour beaucoup de philosophes, la façon de s’exprimer est primordiale et la technique utilisée (la tekhnê, τέχνη), la manière d’organiser son discours afin de révéler le vrai et le juste. Avoir de la méthode est particulièrement important à des époques où une grande partie des transmissions se font de manière orale. Elle permet de faire retenir et de retenir, d’apprécier et de produire un beau discours… Bien sûr, comme toutes les bonnes choses elle a son miroir : celui de la persuasion, du mensonge… la société contemporaine se construisant en grande partie sur cette base qui fait miroiter et reflète des réalités mensongères.