Cet article suit celui-ci sur l'exposition rétrospective intitulée Hubert Robert, 1733-1808, un peintre visionnaire qui se tient au Louvre jusqu'au 30 mai 2016 ; le Louvre où le peintre a le titre de conservateur, et qu'il reproduit plusieurs fois (un exemple ci-dessus : Projet pour la Transformation de la Grande Galerie, 1796, © RMN-Grand Palais - musée du Louvre - / Jean-Gilles Berizzi).
L'exposition commence doucement, avec ses débuts lors de son voyage en Italie alors qu'il a vingt-et-un ans, et qui dure onze années, de 1754 à 1765. On y remarque des thèmes qui se prolongent dans toute son œuvre, qu'il peaufine jusqu'à la perfection. Celui de l'escalier est intéressant, car on retrouve un exemple au début et à la fin de sa carrière.
Le dessin ci-dessus est intitulé La Lingère et date de 1761 (© Sterling and Francine Clark Art Institute / Photo by Michael Agee, Williamstown, Massachusetts). Le titre vient sans doute du drap, posé sur la rampe de l'escalier au milieu du papier, oublié par une lingère. La peinture ci-dessous Le Ravitaillement des prisonniers de Saint-Lazare date de 1794, année où il séjourne dans cette prison pendant la Révolution. Ici ce n'est pas un drap qui est oublié, mais des prisonniers qui souhaitent ne pas l'être.
Le début de l'exposition ne m'a pas semblé extrêmement intéressant. On y trouve beaucoup de dessins dont le carnet d'esquisses ci-dessous datant de vers 1763-1764, pièce rare comme tous le carnets d'artistes conservés dans leur intégralité.
Cependant dans cette partie une peinture m'a beaucoup plu : La Grande Cascade de Tivoli (ci-dessous) de Jean-Honoré Fragonard (1732-1806), datant de vers 1760-1762. C'est un ami d'Hubert Robert. Tous les deux se côtoient pendant leur période romaine. Ils ont simplement une année de différence d'âge. Les deux peintres s'inspirent mutuellement et certains des sujets qu'ils développent alors sont les mêmes, comme c'est le cas pour cette peinture de J.-H. Fragonard dont le thème est repris plus tard par H. Robert. L'ensemble ressemble à un sexe féminin ouvert, avec son clitoris et sa végétation. Des lavandières y sont représentées et des jeunes hommes, dont l'un tendant le bras vers la cascade, et deux autres derrière une blanchisseuse dans une position suggestive, l'un des garçons ayant en plus sa chemise dépassant de sa culotte (photographies ci-dessous). L'encerclement par le pont, les rochers et les éléments végétaux font penser à un gouffre qui cependant est lumineux, ce qui est du plus bel effet, offrant un jeu particulièrement réussi non pas d'ombres et de lumières mais de couleurs.
C'est à partir de la partie de l'exposition sur les « Décors » que j'ai commencé à prendre la mesure de l'oeuvre d'Hubert Robert. L'ensemble de six panneaux (photographie ci-dessous) a été un déclic. Par la suite j'ai été petit à petit de plus en plus subjugué. Mais j'y reviendrai dans d'autres articles la semaine prochaine...
Dans Projet d'aménagement de la Grande Galerie du Louvre ci-dessous de vers 1785-1790, on est dans un projet, une vision. Dans ce futur, un homme de dos, habillé de rouge au premier plan et au milieu de la composition, semble surgir du début du XVIIe siècle (sous Louis XIII), avec son grand chapeau et sa cape. Cette galerie est un couloir du temps dont chaque œuvre suggère un moment. Outre le temps, l'artiste évoque aussi l'espace à travers la perspective du couloir et de Turcs enturbannés peints à droite de l'homme drapé de pourpre. D'autres visiteurs sont représentés mais tous allant dans un même sens... le sens de l'histoire.
Les quatre articles :
http://www.lamesure.org/2016/03/hubert-robert-1733-1808-un-peintre-visionnaire-1.html
http://www.lamesure.org/2016/03/hubert-robert-1733-1808-un-peintre-visionnaire-2.html
http://www.lamesure.org/2016/03/hubert-robert-1733-1808-un-peintre-visionnaire-3.html
http://www.lamesure.org/2016/03/hubert-robert-1733-1808-un-peintre-visionnaire-4.html