Photographies du haut et de droite : Gravure de Salvatore Tresca (1750-1815), artiste sicilien né à Palerme et établi à Paris. En 1788 il grave « divers sujets à la manière pointillée anglaise » (Histoire de l'art pendant la Révolution 1789-1804 par Jules Renouvier et Anatole de Montaiglon, 1863). Il est à l'origine de plusieurs estampes caricaturant des incroyables, la plupart signées « Tresca sculp. » : Les Croyables au Perron, Les Croyables au tripot, Point de convention, et La Folie du jour. Les trois premières estampes représentent de vrais et faux incroyables : des agioteurs, des joueurs de carte, une merveilleuse qui refuse une avance malhonnête d'un incroyable. Dans la quatrième qui est celle présentée ici : « un jeune homme, en culotte collante, et une jeune femme, en robe diaphane, dansent un pas de boléro devant un ménétrier. On ne saurait imaginer une mise en scène plus piquante des travers et des grimaces des habitués des bals de l'hôtel Mercy et de l'hôtel Thélesson. » (ibid.). La signature laisse à penser que Salvatore Tresca s'inspire de l'oeuvre d'un artiste. On a ainsi attribué certains des dessins à l'origine de ces gravures à Louis-Léopold Boilly (1761-1845). Les deux protagonistes de l'image dansent donc soit le boléro soit une valse. La merveilleuse porte une des toilettes du Directoire que la baronne de Vandey appelle dans son ouvrage intitulé Souvenirs du Directoire et de l'Empire (1848) « simples et élégantes », très transparente comme celle qu'elle décrit : « Sa robe en tulle n'avait en dessous qu'une mousseline tellement claire, qu'on pouvait distinguer la couleur de ses jarretières. » Ici on aperçoit sous la longue robe une véritable mini-jupe. Cela accentue le caractère lascif de cette chorégraphie suggéré aussi par le mouvement où les corps et les regards se croisent aux rythmes du violon. La caricature du musicien en alcoolique, assis au milieu de bouteilles de vin, avec la pièce de monnaie dans sa bouche donnée pour sa prestation, insiste sur l'aspect assez 'licencieux' de cette danse ; que le titre de l'estampe rend encore plus flagrant : 'La Folie du jour'.
Photographie de gauche : Gravure datée de 1802, ayant pour légende : « Costume de Bal », et représentant une merveilleuse et un incroyable dansant.
Le boléro comme la valse sont des danses importées à Paris à la fin du XVIIIe siècle. Dans son livre déjà cité, la baronne de Vandey relate un épisode où, après un dîner chez M. de Talleyrand, on demande à un des frères Garat (soit le tribun, soit le chanteur à la mode) tout juste revenu d'Espagne de danser un boléro avec Mme Talien. C'est une nouvelle manière à la mode au temps du Directoire et par la suite ; mais peut-être moins que la valse qui supplante après la Révolution les danses de cour comme le menuet. Elle est d'abord pratiquée par les jeunes merveilleuses et incroyables. Elle se s'adonne en couple fermé, et s'associe parfaitement avec les nouveaux vêtements légers et donnant beaucoup de liberté aux mouvements ainsi que les chaussures sans talon permettant de passer facilement de pas sautés à des pas glissés.
Photographies : Danses d'avant la Révolution. Gravures provenant d'un almanach allemand de 1779 : Zachenbuch zum Nuken und Bergnugen, Goetingen, J. C. Dieterich, avec de nombreuses gravures liées à la mode et pratiques civiles de cette époque et ayant des légendes en allemand et français. La première est intitulée 'Habillements de Danse' et la seconde 'La Danse'.