Les petits-maîtres sont des adolescents ou des jeunes adultes. Évidemment, on compte aussi de vieux petits-maîtres, de vieux beaux (ou ex-beaux) et autres décatis, mais ceux-ci sont beaucoup plus rares et d’une génération précédente. Donc, comme beaucoup d’adolescents et de jeunes adultes de sexe masculin, ces gandins sont attirés par les filles ! S’ils fréquentent les petites-maîtresses, ils ne dédaignent pas aller butiner ailleurs, où les demoiselles sont aussi jolies mais de condition plus modeste. Les comédies des XVIIe et XVIIIe siècles mettent souvent en scène des petits-marquis, petits-maîtres ou autres jeunes chevaliers lorgnant du côté de la servante de la petite-maîtresse. Les grisettes font aussi l’affaire, surtout dans le Paris du XIXe siècle où celles-ci travaillent pour la plupart dans le secteur de la mode et sont coquettes, d’autant plus qu’elles ne sont souvent pas très farouches et beaucoup moins maniérées et ‘précieuses’ que les merveilleuses, cocodettes et autres crevettes. Les petits-maîtres et les petits-maîtresses ne sont pas tous non plus de haute condition… loin de là… Ils prétendent souvent, font des manières, entretiennent le mystère… Ils ont des allures qui les mettent au-dessus du style commun. Leur jeunesse leur permet de s’habiller élégamment ‘d’un rien’ dans un goût nouveau. Ils se vêtent différemment de la génération qui les précède. Si les habits sont auparavant longs, ils les raccourcissent ou les rallongent, et ainsi de suite dans un esprit de contradiction caractéristique permettant à la jeunesse du jour de s’affirmer, de se différencier et ainsi d’entrer dans sa vie autonome d’adulte.
Ci-dessus : Lithographie provenant du journal Le Charivari, du 1er décembre 1846 (le numéro inscrit est sans doute celui qu’a donné l’auteur à cette estampe dans la suite), de la série « Les grisettes », signée de Charles Vernier, (1813 – 1892) et ayant pour légende : « – Je vous présente mon ami Jules Frémichon…… il est le boute-en-train de la ville…… à Chaumont !…. » Ici des gandins noceurs draguent des modistes ou des chapelières. Charles Vernier a représenté les modes nouvelles dans des revues humoristiques, en particulier dans Le Charivari : les « travestissements parisiens », les bals de l’Opéra, les « physionomies des bals publics », les modes de Longchamp, les grisettes, etc. Le Charivari, qui serait le premier quotidien illustré satirique du monde, fondé le 1er décembre 1832, publie parfois des gravures de mode à la manière des journaux de mode de son époque.
Ci-dessous : Lithographie de la même série, du même auteur, du même journal, sans doute de la même année que précédemment et ayant pour légende : « Le siège de Sarragosse au Château rouge. – Voilà un quadrille un peu chochnosophe !….. mais ça ne fait rien, il devrait être défendu de faire des pluies de feu comme ça dans un lieu public où il y a tant de femmes enflammables [ainsi écrit] !….. » Nous sommes au bal parisien de Château rouge. La terminologie est un peu martiale, comme c’est la mode en particulier depuis le calicot. Le terme de « chochnosophe » est alors en vogue. Je renvoie à mes livres ceux qui ne connaissent pas ces termes et leur contexte. Les grisettes sont moins coquettes que ces gandins qui sont peut-être des calicots, des jeunes gens travaillant à Paris, des étudiants ou bien issus d’une jeunesse plus dorée. Je le répète, les styles comptent davantage que les conditions dans la petite-maîtrise.